Malgré notre longue habitude de la couture et bien qu’au
moment des grandes présentations saisonnières nous absorbions les collections à
la cadence de quatre ou cinq par jour, nous restons passionnées du beau métier,
et particulièrement à cette époque de l’année. Sans doute parce que ce
renouveau de la couture correspond au renouveau de la nature, et que ce
renouveau est aussi une espérance ; et puis, si les collections d’hiver
sont belles, celles de printemps sont si charmantes !
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Jean PATOU : robe de jersey de laine gris, corsage
moulant attaché sur une épaule, jupe drapée, massée à gauche ; toque de
feutre vert piquée d’un couteau vert et d’un couteau gris de PATOU.
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Madeleine VRAMAMT : deux-pièces de crêpe noir à tunique
largement plissée, collier et bracelet de métal doré. Grand canotier de Jane
BLANCHOT paille fine noire et écharpe de soie frangée.
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Georgette DE TRÈZE : charmant chapeau printanier à bord
rond, en crinol bleu marine, légèrement incurvé en capote, garni, sur la
droite, d’un gros nœud de taffetas bleu a pastilles blanches.
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Ce que nous apportent celles de ce printemps 1947 ? Une
floraison de tailleurs, d’ensembles (manteaux sur tailleurs ou sur
robes-manteaux) de deux-pièces, de juvéniles paletots de tons pastellisés où
s’opposent l’uni et la fantaisie dans les nuances claires les plus exquises que
dominent les bleus très pâles aux tons de lin et de ciel ; tous les
jaunes, du jaune-paille à l’ocre soutenu ; tous les blonds, ceux de
l’écaille, de la cannelle et du tabac ; les verts très doux et les blancs.
Parmi cette fraîcheur jaillit parfois la flamme d’un beau
rouge ou la note chantante d’un vert-billard, jade ou véronèse ; mais,
surtout, ce que nous ramène ce printemps, c’est le bleu marine garni de blanc.
Ceci pour les tailleurs et ensembles que l’on porte du matin
à dix-sept heures. Pour l’après-midi et le soir, je crois qu’on n’a jamais vu
tant de noir, lui aussi souvent égayé de blanc ou de la note claire et raffinée
des manteaux ou paletots sous lesquels se cachent les robes entre dix-sept et
vingt-quatre heures !
Ce que les collections nous apportent au point de vue de la
silhouette ?
Des jupes qui s’allongent, mais dont la ligne fourreau
s’accentue, et des jupes portefeuilles ; sauf pour le sport, moins de
jupes plissées. Des jaquettes de tailleurs classiques ouvertes très en pointe
sur de la lingerie, des basques très variées de longueur et de coupe, les unes
très raccourcies, arrondies et fuyantes (Lucien Lelong, Schiaparelli) ;
les autres très longues rappelant la forme de celles des jaquettes d’hommes
(Marcel Rochas) ; les unes et les autres à poches assez nombreuses et
s’ouvrant souvent sur des gilets ou effets de gilets en trompe-l’œil.
Elles nous apportent d’innombrables petites robes, de
robes-manteaux, de deux-pièces exacts ou simulés, de robes, enfin, dont le
corsage très simple est collant, moulé ou chemisier, et les jupes très
travaillées enroulées sur elles-mêmes, en volants plats ou étages, en tuniques
qui sont souvent plissées à la mécanique (plissés soleil, accordéon ou paille),
disposées en tabliers repliés sur eux-mêmes, asymétriquement ou coquilles.
Sur la base mince du fourreau, les mouvements d’écharpes
drapées et nouées autour des reins, ou posées en travers de la jupe, restent
nombreux, de même que les fermetures en diagonale, partant de l’épaule droite
pour aboutir à la hanche gauche.
L’épaule reste élargie, mais ronde, très féminine ; les
manches, très souvent montées raglan ou komino, sont droites et trois-quarts,
courtes et plissées sur le bras juste au-dessus du coude, ou très courtes
couvrant simplement l’épaule.
Les mêmes règles s’imposent au jeu charmant des toilettes
imprimées.
Le piqué, la toile et le linon blancs ont comme garnitures,
sur les robes bleues ou noires, reconquis une place prépondérante ; ce ne
sont que biais étroits ou larges, lisérés, cols, revers-noués, gilets, guimpes
mettant leur juvénile fraîcheur, leur gaieté si absolument printanière sur le
fond sombre de la toilette.
Combien de grands chapeaux, canotiers ou capelines, sont
conçus pour accompagner ces ensembles, ces robes, en noir et blanc, en bleu et
blanc ; ce sont des mélanges de feutre et de paille, l’un dessus l’autre
dessous, de tissu tendu ; de grands couteaux en bataille les parent, des
ailes envolées, des oiseaux couchés, des nœuds de ruban posés sur la nuque ou
accrochant un relevé, et aussi d’enveloppantes et nuageuses voilettes ;
ces grands chapeaux sont beaux, ils ont une classe et une allure inouïes portés
avec les fourreaux.
Les petits chapeaux sont délicieux, plus faciles à porter
évidemment. Ce sont de petites formes emboîtant bien la tête, aux bords dégagés
et ronds dérivant de la cloche, du breton ou du bob, souvent traités en capote,
en coiffe ou en bonnet. De grosses touffes de fleurs extraordinairement belles
les garnissent, ou bien de gros nœuds, des poufs de ruban, des traînées de
plumes légères qui frôlent la joue et tombent sur l’épaule. La transparence des
matériaux dont ils sont faits : crin, crinol, dentelle de paille et tulle
tendu bouillonné ou coulissé, se mêle, là encore, à la transparence, à la
fluidité des voilettes claires.
G.-P. DE ROUVILLE.
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