Frappé de la vigueur, de la robustesse, de la longévité de
ses compatriotes de la plaine hongroise, où les plus que centenaires sont
légion, de leur remarquable résistance aux affections de tout ordre, le
professeur Szent-Gyorgyi, titulaire du prix Nobel pour sa découverte de l’acide
ascorbique, en discerna vite la raison.
Celle-ci réside dans l’emploi important du piment, ou
poivron doux, dans l’alimentation, ainsi que dans l’usage presque immodéré d’un
condiment : le paprika, dans la préparation des mets. Or le paprika n’est
autre qu’une poudre à base de piment (Capsicum frutescens) doux, et très
vraisemblablement de piment fort, ce dernier généralement connu sous le nom de
poivre de Cayenne.
CONSTATATIONS DÉTERMINANTES.
— Afin de mettre au point l’étude de toutes les
questions concernant le piment, on institua en Hongrie un institut botanique et
biochimique. Les travaux de cet institut déterminèrent les recherches,
expériences, observations des professeurs de chimie biologique, Demole en
Suisse, et Genevois en France.
Les piments, largement cultivés dans le Sud-Ouest de la
France, sont, en effet, particulièrement riches en acide ascorbique ou vitamine
antiscorbutique (vitamine C), en vitamine B1 et B2,
et les sortes rouges en carotène (provitamine A).
Or, si le scorbut grave est inconnu en France, il est établi
qu’un organisme largement pourvu d’acide ascorbique possède un haut degré de
résistance contre les affections grippales, les fatigues hivernales, la
fragilité de la peau, le déchaussement des dents, etc., manifestations
fréquentes d’un scorbut larvé. Il est également établi que, même en temps
normal, la population française est carencée en vitamine C, mais que 50 milligrammes
d’acide ascorbique dans la ration alimentaire en constituent le principal
remède.
SOURCE DES BIENFAISANTES VITAMINES.
— La vitamine antiscorbutique n’existe que chez les
végétaux consommés à l’état frais. La viande, les œufs, les matières grasses
n’en contiennent pas. Les choux, déjà riches en soufre, en contiennent probablement
(1 à 2 grammes au moment de leur cueillette), mais cette teneur en acide
ascorbique n’est pas stable.
Le jus des agrumes : citrons, mandarines, oranges,
clémentines, pamplemousses, en comporte de 6 à 8 grammes par litre. C’est
une source très importante et très stable, mais aussi la plus coûteuse, en
raison du prix de revient, avec les agrumes d’importation, puisque cela
impliquerait en temps normal la consommation de 300.000 tonnes de
celles-ci. Or, actuellement, sont plus que rares les personnes qui peuvent
s’assurer des oranges, mandarines, citrons, etc., en quelque sorte inexistants.
Le piment doux, source puissante de vitamines, contient 2 à
3 grammes d’acide ascorbique par kilogramme de fruits frais. Son prix de
revient s’établit de 20 à 30 francs le gramme, alors qu’il doit être
multiplié par 10 lorsque cet acide est demandé aux agrumes.
Le professeur Genevois a soumis à une étude chimique très
poussée les fruits d’une vingtaine de variétés de piments doux des cultures
d’Antibes, de la Drôme, du Bordelais, etc., pour déterminer le pourcentage de
vitamines hydrosolubles B1, B2, C, contenues par
kilogramme de fruits. Ce sont les variétés à fruits rouges qui se classent en
tête.
La concentration des deux vitamines B y est du même
ordre que dans les meilleurs légumes verts, dont le type est le savoureux petit
pois. Le piment est également riche en citrate de potasse, dans les proportions
de 10 à 20 grammes par kilogramme de fruits frais, l’un des sels
particulièrement utiles à l’organisme, le sang et l’urine en contenant environ
1 gramme par litre.
Nous examinerons en août, période de grande production des
piments, doux et forts, quelles sont les variétés les plus qualifiées et aussi
le parti que vous en pouvez tirer décorativement au cours de la période des
chasses.
A. DE BRETEUIL.
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