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Causerie médicale

Médications de choc

Ce sont là des thérapeutiques nouvelles, découvertes en Europe, mais particulièrement étudiées en Amérique, au cours de ces dernières années ; elles ont pour caractère commun de provoquer une perte de connaissance, accompagnée de convulsions, et s’adressent à certaines maladies mentales, jusqu’ici jugées rebelles à tout traitement. Comme leur nom l’indique, ce sont des méthodes brutales, choquantes, qui ne sont pas dépourvues de danger (0,5 p. 100 de mortalité, en moyenne) et d’accidents, notamment de fractures, mais les résultats, sans être absolument constants, sont assez encourageants pour en faire l’application à des cas considérés auparavant comme inguérissables.

Trois procédés sont actuellement en usage :

Le choc insulinique.

— L’injection intramusculaire ou intraveineuse d’une dose calculée d’insuline détermine d’abord un état de somnolence, avec transpiration et forte salivation, puis une période de confusion mentale, avec tremblement et chute de température ; vers la troisième heure se produisent des spasmes, des convulsions qui s’exagèrent de plus en plus, avec un état de coma, qu’on interrompt, au bout d’un quart d’heure au maximum, par une injection de sérum sucré.

C’est surtout dans les formes de démence précoce qu’on a enregistré les meilleurs résultats, allant jusqu’à plus de 50p. 100 de guérisons, avec un important pourcentage d’améliorations notables.

Le choc par le métrasol.

— Il s’agit d’une substance chimique qui, injectée dans les veines, donne lieu, tout d’abord, à des sensations extrêmement pénibles (sensation de mort prochaine), cinq à dix secondes plus tard survient la perte de connaissance, suivie de convulsions épileptiformes.

Cette méthode cède le pas de plus en plus à celle du choc électrique.

Choc électrique.

— On fait passer par le crâne un courant électrique de 70 à 80 volts sous 300 à 1.000 milliampères pendant un à cinq dixièmes de seconde ; la perte de connaissance est immédiate, suivie d’une phase convulsive, après laquelle le malade s’endort généralement et ne se souvient de rien au réveil.

Les meilleurs résultats ont été obtenus dans les psychoses maniaques dépressives, les états mélancoliques, la schizophrénie (dont la démence précoce est la manifestation la plus fréquente).

On a encore essayé cette méthode dans d’autres cas, tels que névroses, épilepsie, paralysie générale, avec des résultats encore incertains.

Comme il a été dit, ces méthodes ne sont pas sans danger ; en nombre de cas, on a observé des fractures, des lésions articulaires à la suite des convulsions, des accidents divers, allant jusqu’à quelques cas de mort.

Ces derniers se raréfieront de plus en plus avec un choix plus attentif des sujets à traiter. D’une façon générale, les meilleurs résultats ont été obtenus chez des sujets jeunes, et les statistiques publiées aux États-Unis sont des plus encourageantes.

On cite, par exemple, le cas d’un écrivain tombé dans un état de dépression complet, refusant toute nourriture, qui, après cinq ou six chocs électriques, a retrouvé toute sa vigueur intellectuelle et repris le cours d’une brillante activité.

À ces médications de choc on peut ajouter une nouvelle thérapeutique chirurgicale qui semble plus audacieuse encore, la lobotomie préfrontale, qui consiste, avec les précautions que l’on devine, à pratiquer une incision dans les lobes frontaux du cerveau.

Cette intervention a été appliquée à des cas d’angoisse, d’obsession, d’irritabilité, d’hypochondrie, ainsi qu’à la démence précoce, avec de nombreux cas de guérison. Le Times citait dernièrement le cas d’une femme accusée de divers méfaits, perverse de nature, que le juge envoya dans un asile psychiatrique où elle se soumit volontairement à la lobotomie préfrontale ; six semaines après l’opération, son état mental était complètement modifié ; elle était devenue une personne normale et modeste !

Dr A. GOTTSCHALK.

Le Chasseur Français N°614 Juin 1947 Page 508