Les années se suivent sans se ressembler. En 1946, c’est la
superbe rose de la classe des hybrides de Pernet, André Le Troquer,
qui gagna la médaille d’or. Cette année, cette médaille fut enlevée par une rose
américaine, car les variétés de rosiers français, sans doute plus délicats,
furent défavorisées par les intempéries : gelées rigoureuses et répétées
qui freinèrent la végétation, vagues de chaleur qui précipitèrent la floraison
en fatiguant les rosiers.
Alors que deux des variétés américaines, en pleine
floraison, témoignaient d’une exubérante végétation, que les rosiers
multiflores (floribunda) français étaient couverts de roses, la plupart
des variétés françaises étaient de vigueur moyenne. Cette différence paraît
avoir été motivée par le porte-greffe. Tandis que nos rosiers sont greffés sur
églantiers (Rosa canina) dans le Centre et le Nord, sur rosiers des
Indes (Rosa indica major) dans le Midi, les variétés américaines ont
pour porte-greffe Gloire des Rosomanes, qui se comporte admirablement en
Californie. La vigueur de ces rosiers américains et leur affinité avec le
porte-greffe sont telles que ni les rigueurs de l’hiver, ni les vagues de
chaleur de mai-juin n’ont eu d’action défavorable sur eux.
Les nouvelles variétés de roses présentées à Bagatelle, sont
l’objet d’examens et de jugements très attentifs. Les variétés de rosiers nains
sont suivies pendant deux années de suite et les variétés sarmenteuses (Rosiers
grimpants) pendant trois années. La première année, le jury cote en juin les
qualités d’ensemble, la floribondité et le parfum. Une délégation de celui-ci
cote, en fin d’été, la vigueur, la résistance aux maladies, la beauté du
feuillage. Dans l’intervalle, une commission les cote de nouveau en juillet, en
septembre, puis la seconde année en mai et tout au début de juin (tout au long
des périodes de floraisons, les roses épanouies sont comptées chaque semaine et
totalisées) alors que le jury juge définitivement dans la première quinzaine de
juin, de la deuxième et de la troisième année, cette dernière pour les rosiers
grimpants.
Le jury comportait cette année deux Américains, dont miss
Totty ; un Belge, un Hollandais et un Tchécoslovaque, en plus d’une
vingtaine de juges français. Les travaux ont été suivis avec une grande
attention et un vif intérêt par Mme Vincent Auriol,
qu’accompagnaient Mme Roger Verlome, femme du préfet de la
Seine, et Mme Le Troquer.
Deux médailles d’or, l’une pour les Français, l’autre pour
les Étrangers, en plus des certificats, sont destinées à récompenser les originateurs.
La médaille d’or réservée aux roses françaises ne peut être attribuée que si le
nombre de points est supérieur à celui totalisé par la première des roses
étrangères, ce qui ne fut pas le cas cette année.
C’est pourquoi seule une médaille d’or fut décernée à la
première des roses américaines.
Cette variété est Applause (Applaudissement), aux
belles roses rouges aux pétales enroulés dont l’originateur est M. H. C. Swim.
C’est une hybride de thé à la végétation régulière, fournissant des roses rouges
en quantité. Elle s’est témoignée résistante aux maladies et a donné en deux
ans 155 fleurs. Elle a surclassé Janetha Armstrong, du même
originateur, au moins aussi généreuse et florifère parce que celle-ci s’est
montrée moins résistante aux maladies.
Les certificats de Bagatelle ont été attribués aux variétés,
à Vox populi, rosier sarmenteux hybride de thé à fleurs rouges en
bouquets sur lesquels on a coupé 724 roses dans les deux années
d’observation. Un autre au rosier polyantha multiflore floribonda Français,
et le troisième à Minerve, rose simple aux couleurs brillantes cœur
mordoré et extrémité des pétales d’un rose velouté admirable.
Ajoutons que la variété Charles Mallerin, d’un beau
rouge pourpre intense au bouton presque noir, et parfumée, qui a été classée à
Lyon, cette année, la première du concours de la plus belle rose de France,
n’était pas fleurie et n’a pu être cotée.
Le concours de 1948 s’annonce bien, la lutte sera chaude
entre les différentes variétés naines dans leur seconde année d’observation et
sarmenteuses dans leur troisième année. Il se pourrait que le classement
favorise le no 2215 rouge ou le no 6357 blanc
soufré, à moins qu’un Rosier nain surclasse l’un et l’autre.
A. DE B.
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