L’aviculture, qui avait remarquablement évolué entre 1918 et
1940, et s’était orientée vers les races possédant des lignées de grandes
pondeuses, est de nouveau l’objet d’une attention particulière dans le bons
sens, ce qui exclut les emballements par trop marqués. La majorité des sociétés
d’aviculture ont compris que, si les expositions qu’elles organisent doivent
toujours comporter des sujets remarquablement racés à titre de modèles, leurs
organisateurs devraient tenir compte du côté utilitaire ; de la production
de l’œuf comme du poulet, en attendant la reprise généralisée des
indispensables concours de ponte.
Il existe maintenant d’excellents instruments de production
en deux groupes ; des races françaises sélectionnées ou en cours de
sélection généalogique pour la ponte. La plus évoluée est la blanche Gâtinaise,
sélectionnée assez massivement dans ce sens, depuis environ vingt-cinq ans, et
qui comporte des familles de grandes pondeuses. Sa voisine de terroir, la Bourbonnaise,
qui, dans un avenir déterminé, doit donner également de bons résultats. La Bresse
noire et sa très voisine, la Caussade, plus basse sur pattes (cette
dernière surtout localisée dans le Sud-Ouest), la Bresse blanche, dont
quelques lignées ont témoigné de performances intéressantes dans des concours
de ponte anglaise. Il s’ajoute à ces races, assez diffusées, d’autres races
régionales ou locales dont quelques-unes : Bresse grise, La
Flèche du Mans, Géline de Touraine, dont les qualités de chair sont
très prisées. Et je n’oublie pas la Faverolles, qui fournit de si beaux
poulets précoces.
Considérez à part la Marandaise, qui a dans ses
lointains ascendants le Combattant anglais, puis, plus postérieurement,
maintes races asiatiques, pour lesquelles se manifesta successivement de
l’engouement. Cette dernière, dont il faut reprendre sévèrement la sélection,
présente cette particularité de pondre des œufs à la coquille dense et
résistante, fortement pigmentée, ocrée, brune, lavée, panachée de violet
aubergine. Les caractéristiques de cette race tiennent très vraisemblablement
de ses multiples ascendants et de la composition du sol. C’est originairement
une poule commune, une poule de ferme de la région de Marans, au plumage varié,
dont on a essayé de constituer des types. On en reprend aujourd’hui
l’épuration, qui sera l’œuvre des années à venir.
Toutes ces races possèdent des facultés de ponte en
puissance qu’il importe de dégager, de sérier, de sélectionner, de fixer, de
perfectionner sans cesse avec esprit de suite et continuité. Toutes sont dotées
d’incontestables qualités de chair qui valorisent les coquelets, et même les
poules après leur première année de ponte.
Le deuxième groupe comporte les races et les familles très
évoluées, par des sélections courantes, quelques-unes depuis une quarantaine
d’années. On en a constitué des lignées de célèbres pondeuses, qui,
effectivement comme spectaculairement, font valoir d’extraordinaires facultés
de ponte dans les concours de ponte, lesquels en établissent l’incontestable
valeur.
La plus célèbre est la Livourne, une race
méditerranéenne (avec l’Ancone, la Bresse noire, les espagnoles Minorque
et Andalouse) que les Américains ont guérie de ses tares (notamment de
la diphtérie à l’état en quelque sorte endémique) et par sélection ont fait la
svelte Leghorn, qui fut pendant des années la plus remarquable pondeuse
du monde.
Elle est toujours très grande pondeuse de beaux œufs blancs,
très tard en saison, car, plus nerveuse que lymphatique, elle demande peu à
couver ; mais malgré l’excellence des souches françaises, elle a dû
partiellement céder le pas à des races à deux fins dont les coquelets font de
beaux poulets et dont les poules, surtout après leur première année de ponte,
étant remises rapidement en condition, font de belles poulardes. Au contraire,
l’ossature de la Leghorn ne se couvre que de très peu de chair ;
les coquelets font de petits poulets de grains très acceptables ; mais la
poule n’est jamais assez dodue après sa ou ses deux années de ponte pour faire
une volaille appréciable. C’est la pondeuse industrielle plutôt que la poule de
ferme et familiale.
Les autres races d’origine étrangère, mais de souches
françaises, depuis environ vingt-cinq années, et dont nous n’avons plus à
introduire de reproducteurs, sont : la Wyandotte blanche, type utilité
qui surclasse la Leghorn surtout comme pondeuse d’arrière-saison et
d’hiver ; un des meilleurs spécialistes de cette race, M. Bullier,
déclare « qu’elle est unanimement reconnue en France comme la plus forte
pondeuse d’hiver et la moins sujette aux ralentissements dus aux
intempéries », ce qui est exact. C’est une poule de plaine comme de
montagne.
Les aviculteurs français ont obtenu des performances de
ponte de la Wyandotte nettement supérieures à celles des aviculteurs
américains. Ces derniers, réalistes avant tout, paraissent accorder aujourd’hui
aux lignées Rhode-Island la faveur qu’ils réservaient aux Wyandottes
jusque-là, en attendant que la Hy-Line (que le Chasseur Français
a décrite) détrône la première. Quoi qu’il en soit, la Rhode Island donne
d’excellents résultats dans le Midi et de très bons poulets. Et dans la
majorité des régions où le préjugé des pattes jaunes s’en retourne avec les
vieilles lunes, ces races qui pondent des œufs teintés font de bonnes poules
grasses même après leur deuxième année de ponte.
Très appréciée aussi est la Sussex herminée, race
constituée en Angleterre, qui ressemble comme le ferait une sœur à la Bourbonnaise ;
mais elle est plus massive que cette dernière.
Sélectionnée pour la ponte d’œufs teintés, elle tient d’un
de ses ascendants (le Dorking) une remarquable qualité de chair. Aussi
cette race à deux fins, dont il existe d’excellentes souches françaises, est
très recherchée à la fois pour la ponte et pour faire du poulet. Elle convient
à l’élevage fermier qui l’adopte largement, à l’élevage familial et à la
production industrielle qui valorise œufs et poulets.
Claude AXEL.
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