Plusieurs abonnés du Chasseur Français m’ayant écrit
pour me demander comment empêcher leur chien d’avancer jusqu’au gibier après
avoir marqué un arrêt, je vais tâcher de traiter ce sujet de façon générale,
car cette faute se renouvelle assez fréquemment avec les jeunes chiens.
Voilà un cas où la mise au down impeccable sera d’un grand
secours. Quand on amènera Tom sur le gibier, on lui attachera au collier un
cordeau d’une dizaine de mètres, puis, le mettant à bon vent, on le fera quêter
dans un couvert.
Aussitôt qu’il manifestera avoir connaissance de gibier, on
s’emparera de l’extrémité du cordeau et on fera coucher le chien, soit au bras
levé, soit par un coup de sifflet discret, et, s’approchant de lui et lui
passant la main sur la tête, on le fera relever en lui disant
« coule ». Après quelques mètres, on le fera coucher à nouveau, et
ainsi de suite jusqu’à ce qu’il prenne l’arrêt ferme ou que les perdreaux
s’envolent. C’est surtout sur ce gibier que l’on tâchera d’opérer ; en ce
cas, on fera coucher Tom et on le laissera au down pendant quelques minutes.
Si, après quelques séances, le chien laissé libre continue à
avancer sans ordre après avoir arrêté, il faudra employer le collier de force
(collier à pointes intérieures). Au lieu d’une dizaine de mètres, on fixera à
ce collier un cordeau d’au moins 20 mètres dont on tiendra l’extrémité.
Quand Tom esquissera un arrêt, on le laissera faire ; s’il avance sur le
gibier, on attendra que le cordeau soit bien tendu et, par une secousse
énergique, on l’arrêtera et le fera coucher. S’approchant, on le fera couler
jusqu’au départ du gibier. À ce départ, une nouvelle secousse le fera coucher.
En répétant cet exercice, Tom, s’il n’a pas été gâté par des courses sur le
gibier, devra s’arrêter de lui-même quand il aura connaissance de gibier, ou
alors il n’y aura plus qu’à employer le dernier moyen : le coup de fusil.
Ce moyen, un peu brutal, n’offre pas le danger que l’on pourrait croire quand
il est employé judicieusement.
À cet effet, on confectionnera des cartouches à demi-charge
de poudre et de petit plomb. Quand le chien aura marqué l’arrêt et continuera à
avancer sans ordre, on lui tirera bas une de ces cartouches. Il ne
faudra le faire qu’à une grande distance, de 25 à 40 mètres au minimum.
Après trois ou quatre coups de fusil tirés dans ces
conditions, il est bien rare que le chien ne s’immobilise pas sur l’émanation.
Il faudra alors s’approcher, le caresser et le faire couler.
J’ai usé nombre de fois de ce procédé et n’ai jamais blessé
un chien.
L’un d’eux, un Pointer qui appartenait à un de mes collègues
de la rédaction du Chasseur Français, fut guéri de ce vice tant qu’il
fut entre mes mains, mais y retomba quand il eut affaire à son propriétaire.
Le collier de force peut être confectionné par n’importe
quel bourrelier : six à huit pointes à tête assez large et de 3 à 4
centimètres de longueur, enfoncées dans la bande de cuir, celle-ci doublée par
une autre bande de cuir cousue sur les têtes de clous, anneau et boucle comme à
un collier ordinaire.
Avec cet instrument, il ne faudra agir qu’avec modération et
sang-froid, car une simple traction occasionne une assez forte douleur.
Un dresseur de Seine-et-Marne, au lieu de cravache, se
servait à l’entraînement d’une canne-fusil, tirant la cartouche 9 millimètres
chargée à petit plomb.
Quand son chien essayait de monter dans le vent ou
d’accompagner un lièvre, si le coup de sifflet restait sans effet, la charge de
petit plomb lui arrivait dans les fesses. Je lui ai connu des chiens bien mis
par ce moyen ; ajoutons qu’il est l’inventeur d’un appareil permettant de
calmer l’allure des chiens trop fougueux et les empêchant de mettre le nez à
terre.
A. ROHARD.
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