On préconise surtout, comme moyen d’apporter un remède
efficace à la sous-production de bons fruits, les traitements rationnels des
arbres. Beaucoup de producteurs se mettent, d’ailleurs, en mesure d’effectuer
ceux-ci dans de meilleures conditions.
Lutter contre les parasites pour sauver la récolte est
certainement une chose nécessaire ... Mais il faut aussi que cette récolte
soit susceptible d’être commercialisée ...
Et, pour cela, il faut que les arbres soient capables de
produire des fruits prisés du consommateur, ce qui n’est malheureusement pas
toujours le cas.
Dans nos vergers de pommiers, par exemple, que trouve-t-on,
en effet ? Un nombre souvent considérable de sortes de fruits dont
beaucoup ne se recommandent ni par la beauté, ni surtout par la qualité.
Il faut, de toute nécessité, supprimer ces non-valeurs. Ce
serait peine perdue, en effet, que de leur donner des soins coûteux, puisque la
récolte n’en peut pas trouver de débouchés. Mais il ne faudrait pas non plus
les conserver et les laisser sans soins au milieu du verger, car ils
constitueraient une véritable pépinière de parasites, lesquels se répandraient
ensuite sur les arbres du voisinage.
Il n’est cependant pas nécessaire, pour revaloriser un
verger, d’arracher tous les arbres dont les produits ne sont pas susceptibles
d’être commercialisés. Ces arbres peuvent, en effet, rapidement procurer des
récoltes de beaux et bons fruits si on les regreffe en bonnes variétés de
commerce.
La méthode de greffage la plus courante pour les gros arbres
est la greffe en couronne, qui se pratique à peu près à l’époque où
l’arbre à greffer serait en fleurs, c’est-à-dire, pour le pommier, dans le
courant de la deuxième quinzaine d’avril.
Pour pouvoir greffer en couronne, avec toutes chances de
succès, à l’époque voulue, deux opérations préalables sont nécessaires :
1° Se procurer de bons greffons de la variété à greffer ;
2° Rabattre l’arbre à regreffer.
Choix et prélèvement des greffons.
— Ceux-ci doivent être à l’état de repos absolu de la
végétation. On les coupe habituellement courant janvier ou février, et, en ce
qui concerne le pommier, on les pique de quelques centimètres en terre au pied
d’un mur à l’exposition du nord. On les y reprendra au moment de greffer.
Les meilleurs greffons sont des rameaux de l’année
précédente, bien aoûtés, exempts de germes de maladies (de chancre notamment)
et d’insectes (puceron lanigère par exemple). Il n’est pas nécessaire, comme
beaucoup le croient, de prendre du bois de deux ans ou plus.
Le prélèvement des greffons au moment du greffage, à la
rigueur possible pour la greffe en fente du pommier, n’est pas possible pour la
greffe en couronne.
Rabattage des arbres à greffer.
— C’est de décembre à fin février, c’est-à-dire lorsque
la sève est en repos complet, que doivent être rabattus les arbres.
Cette opération consiste à enlever toutes les
branches secondaires et les moins bien placées des principales et à couper les
autres à une longueur de 40 à 50 centimètres. On fera la coupe
perpendiculairement à la direction de la branche. Il sera ainsi plus facile,
par la suite, de poser les greffons, et surtout de faire la ligature
(fig. 1).
Quelques cultivateurs préfèrent laisser les branches plus
longues et les conserver plus nombreuses. Ils gardent aussi des rameaux
secondaires, pensant qu’ainsi la sève remontera plus aisément dans la branche.
Lorsqu’on opère de cette façon, il faut, après le greffage, exercer une
surveillance constante pour éviter que ces tire-sève ne prennent la
prédominance sur les greffes, et, comme, malheureusement, on oublie trop
souvent de le faire, la sève qui se dépense ainsi est perdue pour les greffes.
Quoi qu’il en soit, les deux méthodes : rabattage
court et rabattage long, ont leurs partisans et leurs détracteurs.
Toutes les deux peuvent convenir. Toutefois, avec la seconde, au prix d’une
surveillance assidue, on peut reconstituer plus rapidement un arbre.
Époque du greffage.
— Pour pouvoir greffer en couronne, il est nécessaire
que la sève circule avec assez d’activité pour que l’écorce se détache nettement
du bois. Cette époque correspond à peu près à celle de la floraison des arbres.
Pratique du greffage en couronne.
— Avant de greffer, on commence par rafraîchir les
coupes de rabattage, soit à l’aide d’une grosse serpette, soit avec une plane
de charron. Il faut, en tout cas, obtenir une coupe parfaitement nette, surtout
au pourtour, où se trouve la zone génératrice. Le milieu pourra être légèrement
bombé pour faciliter l’écoulement de l’eau.
Les greffons sont taillés en long biseau avec un outil bien
tranchant. On leur laisse seulement deux ou trois yeux, puis on les glisse sous
l’écorce, que l’on a préalablement fendue légèrement d’un coup de greffoir. On
peut même préparer leur place avec une spatule en os ou en buis, évitant ainsi
d’émousser la pointe des greffons (fig. 3).
On peut, autour d’une branche un peu grosse, mettre quatre,
cinq ou six greffons. En tout cas, il ne faut pas les économiser, chacun des
greffons constituant un tire-sève qui favorise la cicatrisation.
Quelques greffeurs font au greffon un épaulement qui
permet de le faire reposer sur la tête du sujet. La taille s’en trouve rendue
un peu plus difficile, mais le résultat est souvent meilleur (fig. 2).
La pose des greffons terminée, on met une ligature, puis on
garnit soigneusement de mastic toutes les parties à vif de la branche greffée,
les côtés des fentes et enfin les extrémités des greffons. Cette opération est
de la plus grande importance. Même bien faite, en effet, une greffe mal
mastiquée est généralement perdue.
Tuteurage des greffes en couronne.
— La greffe en couronne reprend très facilement en
général, mais manque un peu de solidité. Aussi, dès que le greffage est
terminé, y a-t-il lieu de placer une baguette en face de chaque greffon,
baguette que l’on attache sur la branche greffée et qui servira par la suite à
soutenir les pousses des greffons. Ce tuteurage évitera bien des accidents et,
notamment, le décollement qui se produit souvent à la suite d’un ouragan
survenant pendant la belle saison.
E. DELPLACE.
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