Les feuilles remplissent dans les essences fruitières un
rôle important, sur le développement de la charpente, sur la fructification,
sur l’abondance et la qualité des produits. Il est donc nécessaire, pour le
praticien, de connaître toutes les fonctions foliaires, leur comportement, afin
d’intervenir en apportant les modifications toutes les fois que ces fonctions
ne sont pas conformes aux résultats cherchés.
Description de la feuille.
— La feuille est une lame verte, aplatie, portée sur la
tige des arbres. Elle présente trois parties : le limbe, en forme
de lame étalée ; le pétiole, à section plus étroite, qui porte le
limbe ; la gaine, plus ou moins aplatie, qui rattache le pétiole à
la tige. L’insertion des gaines sur la tige se fait sur un renflement ou
nœud. De chaque côté de la gaine, se trouvent deux appendices foliacés
appelés stipules. Dans l’angle formé par le pétiole et la tige, se
trouve un œil latéral et des yeux stipulaires, ces derniers moins visibles.
À l’approche de l’automne, la feuille se vide des
matières utiles qu’elle renferme dans les tissus au profit des organes de
réserve que constituent la tige et les racines. Une couche de liège se forme en
travers du pétiole, au-dessus de l’œil latéral, et la feuille privée de
nourriture se détache de l’arbre.
Constitution du limbe de la feuille.
— Une coupe pratiquée transversalement dans le limbe de
la feuille nous montre, de la partie supérieure à la partie inférieure, un
épiderme supérieur incolore, de grandes cellules perpendiculaires à cet
épiderme appelées palissades, puis plusieurs assises d’autres cellules
lâchement unies entre elles, irrégulièrement disposées, entre lesquelles
existent des cavités ou lacunes, et enfin un épiderme inférieur. Ces tissus
sont protégés extérieurement par une assise de cellules épidermiques, ayant
leur paroi externe plus épaissie par une transformation de la cellulose
constitutive de la paroi en un nouveau composé, la cutine. L’ensemble
des couches cutinisées de la membrane constitue la cuticule. Cette
couche est peu perméable aux liquides et aux gaz, inattaquable par le ferment
de la putréfaction des organes végétaux. La cuticule préserve l’épiderme, la
cutine est insoluble dans l’eau, l’alcool et l’éther, elle se dissout dans la
potasse concentrée bouillante. C’est à la faveur de la cuticule que
l’arboriculteur et le viticulteur peuvent employer les produits insecticides et
fongicides sans provoquer des brûlures sur les feuilles, fruits et fleurs. On a
remarqué qu’après une période de 12 à 15° C, s’il survenait une baisse de
5 à 7° C, tous les traitements effectués à cette époque produisaient des
brûlures partielles, ou totales, sur les bourgeons et les jeunes feuilles. À
cette température, la cutine ne se forme pas sur les tissus des plantes, la
cuticule ne peut être renforcée par cet enduit protecteur, elle perd sa
résistance et se laisse attaquer par les produits plus ou moins toxiques. Le
praticien doit, à partir de 5 à 7° C, cesser tous les traitements, jusqu’à
ce que la température remonte à 16 ou 17° C. À ce moment la cutine se
forme ; cette couche mettra les organes d’essences fruitières à l’abri de
ces brûlures. En viticulture et en arboriculture, on ne doit procéder au
soufrage que lorsque la température est au-dessus de 15° C, afin que le
soufre puisse se transformer en acide sulfureux, qui détruit le mycélium des
blancs se trouvant à la surface des feuilles.
Répartition des feuilles sur la tige.
— La disposition des feuilles sur la tige du poirier
suit très régulièrement une spirale. Deux tours complets de spires sont
nécessaires pour rencontrer la feuille placée immédiatement au-dessus de celle
dont on est parti, cette feuille est la sixième rencontrée. Cette disposition
rigoureuse des yeux est mise à profit par les arboriculteurs pour former les
arbres en pyramide, en fuseau. Les branches charpentières disposées
régulièrement en spirales autour de l’axe central, la tige, permettent
d’obtenir le maximum de pénétration de la lumière entre chacune d’elles. Les
coursonnes sont bien aérées, ensoleillées, présentent une végétation très
active. La formation des productions fructifères se trouvant favorisée,
celles-ci auront une végétation continue, donneront des récoltes régulières et
des fruits de qualité.
Ces résultats seront maintenus en taillant les coursonnes
des parties inférieures des branches charpentières plus longues que celles du
sommet. La surface foliaire des coursonnes de la base, étant plus importante,
équilibrera l’arrivée de la sève élaborée dans les parties de l’arbre où elle a
tendance à diminuer.
La disposition des yeux sur le rameau de poirier permet au
praticien de modifier la forme pyramidale du poirier et la transformer en une pyramide
ailée ou pentagonale.
Obtention de la pyramide ailée.
— Cette forme se compose, comme la pyramide ordinaire,
d’une tige verticale sur laquelle s’insèrent les branches charpentières de
longueur décroissante à mesure qu’elles se rapprochent du sommet. Mais elle en
diffère du fait que les branches, au lieu d’être situées dans des plans
divergents, forment cinq plans verticaux situés à égale distance. Les cinq
sommets des charpentières réunis donnent un pentagone, et la projection de
cette forme sur le plan horizontal représente une étoile à cinq branches.
Choisir des variétés de poirier à branches dressées,
greffées sur franc (provenant de semis) : William’s, Beurré d’Amanlis,
Beurré Hardy, Clapp’s Favorite, Louise-Bonne, Beurré, Dumont, Comtesse de
Paris, Doyenné du Comice, Duchesse d’Angoulême, Olivier de Serres, Bergamote
Esperen.
Après la plantation, le scion de poirier est attaché, dès
que le tassement du sol a eu lieu, sur un tuteur en fer, fixé au pied dans un
dé de pierre. Cinq fils de fer partent du sommet de ce tuteur, maintenus
écartés les uns des autres par un intervalle égal pour constituer les cinq
ailes de la pyramide. Les cinq fils de fer sont arrêtés à 30 centimètres
de hauteur sur un piquet enfoncé dans le sol, à une distance égale à la moitié
du diamètre de la forme à établir. À la formation des rameaux sur la tige, on
fixe un liteau, au piquet, d’une part, à la hauteur des rameaux qui se
développent, et, d’autre part, au fil de fer correspondant, afin de lui
conserver son inclinaison de 42° avec la tige et sa position symétrique. En
examinant une des ailes individuellement, elle représente une demi-palmette
oblique.
Cette forme est très décorative pour le jardin
d’amateur ; elle devra être réservée aux arboriculteurs aimant à surmonter
les difficultés.
Fonctions de la feuille.
— Les feuilles sont les organes respiratoires
des plantes. Elles absorbent de l’oxygène de l’air et rejettent l’acide
carbonique ; ce phénomène a lieu le jour et la nuit. Il varie selon les
conditions extérieures, son intensité diminue lorsque la température s’abaisse
et quand l’éclairement augmente.
Les feuilles transpirent par leurs stomates de la face
inférieure ; elles sont le siège d’une transpiration très active qui
provoque une véritable aspiration de la sève brute et une concentration de
celle-ci. Ce phénomène augmente avec la température, avec l’intensité de la
lumière et l’état de sécheresse de l’air ambiant. La transpiration croît depuis
le lever du soleil, jusqu’à 3 heures de l’après-midi et décroît ensuite
jusqu’au soir ; elle est presque nulle la nuit. Les plantes évaporent
d’autant moins d’eau que la terre est plus riche en principes fertilisants.
Plus un sol est fertile, plus l’eau contient en dissolution des matières
fertilisantes. Dans ces conditions, il suffit d’une absorption d’eau
relativement faible pour assurer l’alimentation de la plante. Il résulte de ce
qui précède que les engrais solubles, en réduisant la transpiration, permettent
aux plantes cultivées de résister à la sécheresse. Une terre devra, d’autre
part, être d’autant plus fumée qu’elle est plus sèche.
Les feuilles assimilent le carbone de l’air sous
l’influence de la lumière solaire, les feuilles et les parties vertes du
végétal dédoublant le gaz carbonique de l’air en carbone qu’elles assimilent et
en oxygène qu’elles rejettent.
C’est par l’intermédiaire de la chlorophylle, qui a la propriété
de capter l’énergie des radiations solaires, que la plante peut rompre l’union
intime du carbone et de l’oxygène dans le gaz carbonique et combiner à son
profit le carbone, l’eau et les sels minéraux. La conséquence de cette fixation
du carbone est la formation dans les feuilles de l’amidon et des sucres, qui
sont pris par le courant de la sève, entraînés par les vaisseaux libériens des
nervures, puis par ceux de la tige, vers les organes de formation et
d’accroissement. Cette migration a lieu jour et nuit.
E. DEAUX
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