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Viticulture

Les herbicides

Comme leur nom l’indique, ces produits sont destinés à la destruction des herbes — les mauvaises, s’entend.

Il est à se demander si, dans un vignoble, il est nécessaire de procéder à la destruction des plantes parasites ; on ne peut d’emblée donner une réponse soit positive, soit négative.

Aussi allons-nous étudier rapidement les trois questions suivantes :

    a. La destruction des mauvaises herbes est-elle nécessaire au vignoble ?
    b. Quels sont les produits à utiliser ?
    c. Comment peut-on les employer ?

La première question peut être résolue par la négative dans les contrées où la vigne est la seule production, dans certains terrains argilo-calcaires très pierreux où « l’herbe pousse à regret » et dans quelques autres cas (main-d’œuvre suffisante, nombreuses façons culturales, etc.).

Mais, dans beaucoup de propriétés de polyculture, là où la main-d’œuvre est limitée et quelquefois déficiente, la réponse est positive.

Parmi les principaux produits à utiliser, nous pouvons retenir ceci :

Il y a une trentaine d’années, le procédé Rabaté a connu une grande vogue. Il consistait à traiter, au printemps, surtout les céréales d’hiver par un arrosage d’acide sulfurique dilué de dix fois son volume. Cette méthode a été et est encore très appréciée. Mais le produit est d’une manipulation assez dangereuse et demande beaucoup de précautions. Toutefois, il faut reconnaître que son emploi a donné des résultats décisifs et constants. Nous ignorons si ce procédé a été employé au vignoble.

On lui a reproché de décalcifier la partie arable des terrains non calcaires et de changer ce que nous appelons son pH (lisez : tendance acide ou alcaline du sol).

Plus tard, on lui a préféré le mélange cyanamide-sylvinite, qui avait l’avantage d’apporter au sol l’azote, la potasse et la chaux, en petite quantité il est vrai.

La cyanamide est un produit assez dangereux à manipuler : il est recommandé de se servir pour son épandage d’un distributeur d’engrais.

Il est certain que ce serait un produit à essayer dans les vignes, où il apporterait trois éléments fertilisants nécessaires.

Les praticiens de cette méthode ont constaté qu’elle donnait de meilleurs résultats si on épandait le produit par temps de gelée.

Un autre produit est le chlorate de sodium phénolé.

Nous avons assisté, il y a quelques années, au traitement d’une parcelle enherbée, à l’aide de ce mélange.

Au bout de huit jours, nous avons constaté que les graminées de prairie étaient radicalement détruites. Quant aux plantes à racines profondes, type chardon, les feuilles étaient brûlées ; la végétation, momentanément arrêtée, reprenait au bout de six semaines.

Le résultat n’était pas total, il n’était que partiel. Malgré tout, il est quelquefois intéressant de retarder de plus d’un mois la végétation des plantes parasites à racines profondes.

Il existe dans notre pays des maisons sérieuses fabriquant des produits herbophages bien étudiés, livrés avec le mode d’emploi et références. Ce sont, en général, des produits de synthèse nouveaux.

Enfin, il y a les hormones ; les lecteurs de cette revue ont fait connaissance avec ces nouveaux venus par une étude de M. A. de Breteuil, parue dans le numéro d’octobre-novembre. L’auteur nous promet de revenir sur cette question en temps opportun.

D’après lui, les hormones détruisent les plantes, y compris leurs racines ; c’est donc un herbophage qui aurait cette propriété à dose normale, s’entend, ce qui est de la plus haute importance pour un produit dont l’emploi est facile.

Nous résumerons la question des herbophages ou herbicides dans la vigne en prévenant les intéressés de ne jamais dépasser les doses indiquées sur le mode d’emploi du produit, d’éviter de toucher la vigne par ses feuilles, sarments ou ceps, et de faire un traitement préventif dès l’apparition de la végétation indésirable, alors que les racines sont peu profondes, sauf pour le désherbant cyanamide-sylvinite, où on peut forcer la dose sans inconvénient.

Qu’ils ne croient pas supprimer par ces procédés les ronces ni les chardons, sans nuire d’une façon notable à la végétation et à la fructification de la vigne. Là, le remède serait pire que le mal.

Mais, lorsqu’on prépare un terrain pour l’encépagement et ailleurs qu’au vignoble, tous les espoirs sont permis.

V. ARNOULD,

Ingénieur agronome.

Le Chasseur Français N°619 Avril 1948 Page 78