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Un bon fromage d'été

Le Port-Salut

Choix d’un fromage.

— Les spécimens à pâte molle, tels Brie, Camembert, Maroilles, etc., fournissent un rendement plus élevé en fromage fait que les pâtes sèches, un peu plus de 14 kilogrammes, contre un peu moins de 13 kilogrammes par hectolitre de lait pur, ce dont on tiendra compte en établissant le prix de vente. Mais les premiers ont le défaut d’exhaler une odeur forte et présentent les risques de coulage ou de frisure pendant la période estivale. Comme les pâtes sèches sont beaucoup demandées en été, on a intérêt à les substituer aux pâtes molles affinées avec le concours des pénicilles et des oïdiums odorants. On évite ainsi les accidents de fabrication qui occasionnent des pertes. Un spécimen très apprécié est le Port-Salut, une imitation du Port-du-Salut de l’Abbaye de la Trappe, qui jouit d’une réputation mondiale.

Matériel de fabrication.

— Le matériel essentiel comprend des moules en forte tôle d’acier étamée, percés de trous. Les grandes formes ont 27 centimètres de diamètre et 9 centimètres de hauteur ; les petites formes mesurent 18 centimètres de diamètre et 6 centimètres de hauteur. Elles donnent des fromages pesant respectivement 2 kilogrammes et 1 kilogramme. Chaque moule est accompagné d’un disque compresseur, sur lequel viendra s’appuyer le tampon de la presse chargée d’expulser le sérum.

Dans les petites fromageries, on utilise les presses murales, tandis que, dans les grandes, on a recours aux presses à manivelle ou, mieux encore, on se sert des presses à levier réglable, permettant d’augmenter progressivement les pressions, à mesure que le niveau du caillé s’abaisse dans les moules.

Emprésurage.

— Le lait est mis en présure aussitôt la traite terminée, sans attendre qu’il se refroidisse. Sa température ne doit pas être inférieure à 30°. Au-dessous de 30°, il faut le réchauffer. On calcule la dose en tenant compte de la température, de manière que la prise se fasse en 30 minutes. Avec la présure au titre de 1/10.000e, le lait étant à 30°, la dose à employer est de 15gr,5 pour 100 litres ; elle ne sera plus que de 14gr,5 et 13gr,5 si la température est de 32° ou de 34°, en admettant des laits acidifiés aux alentours de 20° Dornic.

Dans la pratique, on peut rectifier l’acidité, ainsi que la richesse en graisse, en ajoutant au lait frais une certaine quantité de lait écrémé acide. Si un lait donne 40 p. 100 de gras dans le sec, et que l’on veuille abaisser le pourcentage à 35 p. 100, on mélangera 5 litres de lait écrémé dans 35 litres de lait pur. Il en est de même pour rectifier l’acidité.

Pressage des fromages.

— Le lait coagulé est divisé finement à la lyre et, après avoir retiré le plus gros du sérum, le caillé est chauffé à 36-37°, sans cesser de brasser, jusqu’à ce que les grumeaux aient la taille d’un grain de blé et qu’ils se soudent lorsqu’on les serre dans la main.

Les moules étant sur la presse, tapissés intérieurement d’une mousseline, on les remplit de caillé, on replie le linge et l’on fait agir la presse sous une pression de 4 ou de 2 kilogrammes, suivant qu’il s’agit de grands ou de petits moules.

Une heure après, on retourne les fromages en changeant les étamines. Les pressions sont portées à 6 ou à 3 kilogrammes, suivant le format. Deux heures plus tard, on effectue un deuxième retournement, puis un troisième, en portant les pressions finales à 14 et 7 kilogrammes, suivant le format.

Affinage.

— Au sortir de la presse, les spécimens sont mis à ressuyer sur le saloir pendant une douzaine d’heures, puis on les saupoudre de sel demi-fin bien sec, en deux fois, à douze heures d’intervalle, à la dose de 25 à 30 grammes par kilogramme de pâte. Le sel fondu, les Port-Salut sont descendus à la cave, où règnent une température de 12° et une hygrométrie de 90° environ.

Ces conditions observées, la caséinification s’effectue en sept ou huit semaines. On l’active en faisant évaporer de l’eau sur un réchaud, ou on la retarde en utilisant des substances happantes, telles que chaux vive, ou chlorure de calcium. Les fromages placés sur des étagères en sapin sont retournés tous les jours. Quelques lavages à l’eau tiède aminciront l’épaisseur de la croûte et élimineront les oïdiums odorants qui pourraient communiquer à la pâte une saveur autre que celle du Port-Salut.

C. ARNOULD.

Le Chasseur Français N°608 Août 1948 Page 178