La loi du 13 mai 1946 apporte des modifications dans
l’assiette des impôts directs dont nous allons examiner les principales, avec
le plus de détails possible.
Révision des bilans.
— Les entreprises passibles de l’impôt sur les
bénéfices industriels et commerciaux ont pu déjà, en vertu des articles 69
et suivants de l’ordonnance du 15 août 1945, et de l’article 25 de la
loi du 23 décembre 1946, procéder à la réévaluation de leur actif et de
certains éléments de leur passif. L’article 1er de la loi, paragraphe 1,
précise que cette faculté pourra s’appliquer au bilan du dernier exercice clos
en 1947 ou l’un des exercices suivants. L’amortissement correspondant à la
nouvelle valeur comptable sera réparti sur la durée probable des éléments à
amortir. Les entreprises qui ont déjà procédé à cette réévaluation pourront
bénéficier des avantages ci-dessus ; les modalités d’application sont
fixées par décret du 15 mai.
Avant le 1er janvier 1949, un décret fixera
les conditions et les délais dans lesquels les amortissements admis en
déduction des bénéfices imposables devront être réinvestis en installations ou
en matériels productifs. À défaut de ce réinvestissement dans les délais
prescrits, ils seront rapportés aux bénéfices en vue de l’établissement de
l’impôt. Le taux de l’impôt est porté à 28 p. 100, sur la partie nette
imposable, pour les bénéficiaires de dispositions ci-dessus.
Exploitation continuée par un ou plusieurs héritiers ou
successibles en ligne directe ou par le conjoint survivant.
— Dans ce-cas, la taxation de la plus-value du fonds de
commerce (éléments corporels et incorporels) est reportée au moment de la
cession ou de la cessation de l’exploitation par l’article 7 ter
du Code des impôts directs ; l’article 2 de la loi étend le bénéfice
de cette disposition aux successibles ou héritiers en ligne directe qui
continuent l’exploitation, d’une part, au précédent exploitant ou à son
conjoint survivant, d’autre part, qui constituent exclusivement entre eux une
société en nom collectif, en commandite simple ou à responsabilité limitée, à
condition que les évaluations des éléments d’actif existant lors de la cession
ou cessation par le précédent exploitant ou lors de son décès ne soient pas
augmentées à l’occasion de la transformation de l’entreprise en société.
Bénéfices commerciaux. Forfait.
— Ce mode d’imposition est étendu à tous les
contribuables autres que les sociétés, et ceux qui ont opté pour l’imposition
d’après les bénéfices réels, dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 5 millions,
s’il s’agit de redevables dont le commerce principal est de vendre des
marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur
place, ou de fournir le logement, ou 1.200.000 francs s’il s’agit d’autres
redevables. En cas de cession ou de cessation d’entreprise dans un délai de
cinq ans après la création ou l’achat de celle-ci, les gains exceptionnels
provenant de la vente du fonds de commerce ou de la cession des stocks et des
éléments de l’actif immobilisé sont imposés en sus des bénéfices réalisés
depuis le 1er janvier de la dernière année d’exploitation, sur
déclaration du contribuable dans les délais prescrits, qui peut opter pour
l’imposition d’après le bénéfice réel. Les contribuables qui demeureront ou se
trouveront nouvellement placés en 1948 sous le régime du forfait pourront, dans
un délai de un mois à partir de la promulgation de la loi, demander à être
soumis au régime de l’imposition d’après le bénéfice réel.
Salaire du conjoint.
— L’article 4 de la loi stipule que, dans la
limite de 150.000 francs, une rémunération non inférieure au salaire moyen
départemental pourra être remise au conjoint participant effectivement à
l’exercice de la profession, sous réserve que ce salaire ait donné lieu au
versement des cotisations prévues pour la sécurité sociale, les allocations
familiales et autres prélèvements sociaux en vigueur. Cette disposition est
applicable aux cédules des professions industrielles, commerciales et non
commerciales depuis le 1er janvier 1948, avec régularisation depuis
cette date.
Bénéfices commerciaux. Calcul de l’impôt. Taux.
— Toute fraction du bénéfice imposable inférieure à
1.000 francs est négligée, l’impôt ne porte que sur la fraction de
bénéfice qui excède 60.000 francs, pour les particuliers et les associés
en nom collectif. Le taux est de 24 p. 100, il est réduit de moitié en ce
qui concerne les gains exceptionnels réalisés en cas de cession ou de cessation
totale ou partielle d’entreprise, il est élevé à 28 p. 100 pour les
bénéficiaires de la réévaluation des bilans et pour les entreprises imposées
aux taux réduit (nous examinerons prochainement le régime du taux réduit).
Bénéfices non commerciaux. Calcul de l’impôt. Taux.
— Toute fraction de bénéfice inférieure à 1.000 francs
est négligée, l’exonération à la base est de 60.000 francs, le taux est de
21 p. 100 et de 24 p. 100 pour les charges et offices. Ces taux sont
réduits de moitié en ce qui concerne les gains exceptionnels provenant des
cessions de charges ou d’offices, la réalisation des éléments d’actif affectés
à l’exercice de la profession, ou des indemnités reçues en contre-partie de la
cessation de l’exercice de la profession ou du transfert d’une clientèle.
À compter du 1er juillet 1948 entrera en
vigueur le régime de la perception à la source. Cette partie étant très
importante, nous lui réserverons une causerie spéciale. Notons qu’il ne s’agit
pas d’une mesure générale pour les professions non commerciales et que les
redevables conserveront le système de la déclaration-contrôlée avec en plus
celui de l’évaluation administrative.
Impôt général sur le revenu. Taux.
— Pas de modifications dans le calcul des parts (voir Le
Chasseur Français, no 608, juin-juillet 1946), dont chacune
bénéficie d’une exonération de 100.000 francs. Les taux à appliquer sont
les suivants, par part :
12 |
p. 100 sur la fraction comprise entre |
100.000 |
et |
200.000 |
francs. |
24 |
— |
200.000 |
— |
500.000 |
— |
36 |
— |
500.000 |
— |
1 million |
de francs. |
48 |
— |
1 million |
— |
2 millions |
— |
60 |
p. 100 sur la fraction supérieure à |
2 millions. |
Les taux de 48 p. 100 et 60 p. 100 sont portés
respectivement à 54 p. 100 et 70 p. 100 pour les contribuables
célibataires, divorcés ou veufs n’ayant pas d’enfants à leur charge et
n’entrant pas dans l’un des cas énumérés à l’article 117 du Code des
impôts directs.
Pour les exercices 1948 et 1949, les années de captivité des
anciens prisonniers de guerre ne rentreront pas dans le décompte des 3 années
de mariage. Dans les impôts à déduire il y aura lieu de compter, dès la
déclaration de 1948, le quart de l’impôt général sur le revenu de l’année
précédente.
Diverses dispositions de détail sont prévues pour la fraude,
le recouvrement, la contribution foncière non bâtie, etc., que nous examinerons
au moment de l’étude séparée de chaque catégorie.
Ernest-Bertin MARILLIER.
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