Dernièrement, il est paru ici des articles sur les
spaniels ; de très élogieux sur le cocker et sur le welsh spaniel, ainsi
que quelques mots aimables sur le springer, mais dits en passant seulement.
Cependant, ce dernier a des adeptes et qui sont de fervents
amateurs, et, cet hiver, il y eut autant d’épreuves sur le terrain pour
springers qu’il y en a eu pour les cockers.
Si les cockers sont utilisés en France depuis longtemps, les
springers, par contre, étaient moins connus, mais le réveil, pour eux, vient de
sonner.
Chaque épreuve réunissait dans leur catégorie sept
ou huit engagements, et parmi ces concurrents pas de médiocrités, tous se sont
classés, tous sont des chasseurs endiablés, ardents et souples en même temps.
J’en ai fait naître pour ma part quinze en 1947 ; tous
ont chassé dès leurs premières sorties.
C’est que, dans le springer, il n’y a pas deux
catégories ; en Angleterre, leur pays d’origine, on n’en a jamais fait un
chien d’exposition, mais surtout un chien de travail, rustique, bâti pour la
résistance, le travail dur qui lui est demandé au bois, au fourré, au marais.
Sa résistance est énorme ; plus haut sur pattes que le cocker, moins
handicapé dans les ronciers par ses oreilles moins longues, moins pesantes, il
franchit sans se fatiguer les obstacles qu’il rencontre, les fossés, les
rideaux, les accidents de terrain les plus variés et souvent difficiles ;
il va à l’eau comme un canard et il excelle dans la recherche et le rapport du
gibier tué ou blessé ; c’est un retriever inné qui ne craint pas de
rapporter les plus gros lièvres. Moins poilu, moins frangé que le cocker, il ne
ramasse pas comme lui les « tignons » et autres graines si
désagréables qui se trouvent dans les marais secs et herbeux, et il est de ce
fait d’un entretien plus facile.
Son dressage n’est pas compliqué, l’essentiel est de lui
imposer le down au départ du gibier, et bientôt il prendra des arrêts, qu’il
maintiendra jusqu’au coup de langue qu’on lui donnera pour le faire bourrer,
car, contrairement au chien d’arrêt, il force la pièce plutôt que de couler, ce
qui est un gros avantage au fourré, quand on a un faisan qui piété, ou, au
roncier, un lapin que le chien trop ferme à l’arrêt ne sait pas faire partir.
Et, toutes ces qualités importantes mises à part, vous avez,
en dehors de ces heures sportives, le meilleur compagnon que vous puissiez
désirer : doux, aimant, caressant et aimant être caressé.
Puis, rentré au logis, si on l’accepte à l’appartement,
c’est un sage, il se pelotonne dans un coin et prend un repos souvent bien
mérité.
Je n’ai pas encore connu un springer boudeur ; il est
gai, toujours content, sans être fougueux.
Le premier springer que j’ai eu m’avait été offert chiot,
par un ami ; c’était en 1938, je n’étais pas autrement emballé ; je
le gardai plutôt pour faire plaisir à cet excellent ami, qui m’avait fait tant
d’éloges sur cette belle race ; mais ce petit chiot, en grandissant, m’a
complètement conquis par son intelligence, ses démonstrations d’amitié ;
et ses premières sorties, vers l’âge de sept à huit mois, me l’ont fait aimer
plus qu’aucun autre n’avait su le faire.
Je l’ai perdu pendant la guerre, mais, dès la Libération,
j’en recherchai ; j’ai eu la chance de trouver à acquérir deux chiottes de
sang différent ; elles ont deux ans et demi maintenant et n’ont fait que
confirmer et augmenter l’engouement que m’avait inspiré mon premier élève de la
race.
Je n’ai plus que huit chiens : ce sont huit
springers ; c’est assez dire combien ils m’ont accaparé, moi qui, pendant
ma longue carrière, n’avais eu que des pointers et des setters, et aussi
quelques cockers ; mais les springers les ont supplantés ...
Émile HERBELIN.
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