Accueil  > Années 1948 et 1949  > N°622 Octobre 1948  > Page 217 Tous droits réservés


Le « CHASSEUR FRANÇAIS » sollicite la collaboration de ses abonnés
et se fait un plaisir de publier les articles intéressants qui lui sont adressés.

L'épinard

Ce légume, fort probablement importé en Espagne par les Maures, qui eux-mêmes le tenaient des habitants de l’ancienne Perse, ne fut cultivé en France qu’à partir du XIIe siècle.

Le type-primitif fut celui à graines piquantes, qui correspond à la variété appelée de nos jours « d’Angleterre », puis, sélectionnée, on obtint une autre race à feuilles plus épaisses, plus amples, à graines non piquantes, dénommé « de Hollande », du nom de son pays d’origine.

Depuis, l’intérêt croissant porté à cette plante fut la cause de la création de nombreuses variétés nouvelles. Les buts visés par les obtenteurs furent, en la circonstance, assez différents les uns des autres. C’est ainsi que pour les semis de printemps, — ceux que l’on fait de février à mai — il fallait vaincre chez la plante sa tendance naturelle à monter en graines dès l’arrivée des premières chaleurs, en créant des variétés chez lesquelles cet inconvénient était, pour le moins, atténué. Par contre, il en allait autrement pour les variétés utilisées en vue de la production automnale et hivernale ; l’épinard étant relativement rustique, c’est surtout l’augmentation de rendement qu’il y avait lieu d’envisager.

Parmi les multiples variétés que l’on a obtenues en tenant compte de ces deux particularités, nous nous devons de signaler :

Variétés d’été.

Épinard de Rueil, vigoureux, de premier intérêt pour la culture d’été. Épinard lent à monter ; résiste bien à la chaleur.

Variétés d’automne et d’hiver.

Épinard géant d’hiver, grande rusticité, fort rendement.

Épinard monstrueux de Viroflay, très vigoureux, rustique. Épinard amélioré de Versailles, lent à monter au printemps. Pour la culture d’automne, il faut veiller à ce que le terrain soit sain et perméable à l’eau, afin d’éviter la pourriture des plantes sous l’effet d’un excès d’humidité ; par contre, pour les semis de printemps et d’été, il faut choisir un sol frais et, si possible, légèrement ombragé. Une fumure constituée par 120 kilogrammes de fumier bien décomposé, 5 kilogrammes de superphosphates et 2 kilogrammes de sulfate de potasse ou de chlorure de potassium conviendra pour un are de superficie. Une telle fumure produira les meilleurs résultats si on ajoute sur cette même surface 2 à 3 kilogrammes de nitrate de soude après l’éclaircissage.

Pour la facilité des façons culturales et des récoltes ultérieures, il y a lieu de diviser le terrain en planches de 4 rayons, séparées entre elles par des sentiers de 0m,40. Les rayons doivent être distants de 0m,25 les uns des autres au minimum. Les graines sont enterrées à deux ou trois centimètres de profondeur environ, puis on tasse le sol à la batte ou avec le dos d’une pelle. En général, la levée à lieu dans la huitaine ; si la sécheresse est forte, il est bon de donner quelques arrosages pour faciliter la germination des graines.

Pour les semis d’automne, on utilise 300 grammes de graines à l’are ; pour ceux de printemps, qui ne donnent souvent qu’une seule récolte, on sème plus dru, environ 400 à 450 grammes. À l’automne, on ne fait le plus souvent qu’un seul semis, entre le 20 août et le 10 septembre. La cueillette commence 35 à 40 jours après le semis et se poursuit jusqu’à la fin du printemps, époque à laquelle les plantes montent, en graines. Les semis de printemps se font, suivant les régions, à partir du début de mars et sont renouvelés tous les quinze jours jusqu’à fin mai, pour obtenir une production soutenue.

Le terrain n’est pas, dans ce cas, occupé très longtemps, l’épinard pouvant alors être cueilli vers le 20e jour. Pour hâter la récolte, il y a nécessité, dès les premières chaleurs, d’arroser abondamment. Les premiers semés peuvent parfois fournir deux récoltes si la température se maintient à un degré peu élevé.

Le rendement, pour les semis d’automne, peut varier de 250 à 300 kilogrammes à l’are et celui des semis de printemps de 60 à 100 kilogrammes.

L’épinard est susceptible de contracter différentes maladies : le blanc ou meunier, qui se présente sous la forme de taches blanchâtres sous les feuilles et entraîne leur dessèchement ; il se combat par des soufrages.

La jaunisse ou mildiou, caractérisée par une sorte de moisissure qui recouvre la surface des feuilles ; les organes attaqués cessent de se développer, puis se dessèchent également.

La mosaïque, qui cause la disparition graduelle des pieds. La seule manière efficace pour la combattre consiste à ne faire revenir l’épinard au même endroit qu’à intervalles de 4 ou 5 ans.

En dehors des maladies, un certain nombre d’insectes peuvent également occasionner de sérieux ravages dans les cultures d’épinards : le ver blanc, le ver gris, qui rongent les racines, sont parmi les plus dangereux. Des binages fréquents et un peu profonds sont à conseiller. Le ver blanc, en particulier, redoute beaucoup le brassage des terres. La désinfection du sol à l’aide de poisons dégageant des vapeurs toxiques produit d’assez bons résultats. Le sulfure de carbone, l’acide cyanhydrique sont utilisés à cet effet par injection.

A. GOUMY,

Ingénieur horticole.

Le Chasseur Français N°622 Octobre 1948 Page 217