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Le rationnement des moutons

La ration d’un animal doit satisfaire à un ensemble de conditions, dont certaines — apport énergétique, minimum de protides et de sels minéraux — ont déjà été étudiées dans de précédents articles.

Elle doit, en outre, ne pas être trop encombrante et contenir une quantité suffisante d’eau. Ces deux nouvelles conditions, bien que moins importantes que les précédentes, ne doivent pas être négligées si l’on veut obtenir des rendements maxima.

Le volume de la ration.

— L’ensemble des aliments de la ration doit fournir à l’animal tous les éléments qui lui sont utiles, et cela sous un volume proportionnel à celui de son tube digestif.

Les fourrages grossiers, tels que les pailles, contiennent peu d’unités nutritives par kilo. Le mouton est amené à en absorber une grande quantité sans pouvoir satisfaire son appétit et couvrir ses besoins alimentaires. Cette masse volumineuse et lourde dilate exagérément son tube digestif et, sur les jeunes surtout, provoque des déformations du squelette, qui nuisent à l’avenir du sujet.

Seules les matières sèches, c’est-à-dire ce qui reste des aliments lorsqu’on en a évaporé l’eau, comptent pour l’appréciation du volume.

Les tables de composition des fourrages donnent leur teneur en matières sèches (M. S.). Le coefficient d’encombrement s’obtient en divisant le poids des matières sèches de la ration évalué en kilos par le nombre d’unités fourragères (U. F.) qu’elles renferment :

Coefficient d’encombrement = M. S.
———
U. F.

Ce coefficient varie avec les espèces animales et, dans la même espèce, avec l’âge, la taille et la production.

C’est ainsi que pour les ovins on retient généralement les chiffres suivants :

Brebis de petite taille au début de la lactation. 1,3 à 1,6
Brebis de petite taille en fin de lactation. 1,3 à 1,7
Brebis de grande taille au début de la lactation. 1,3 à 1,7
Brebis de grande taille en fin de lactation. 1,3 à 1,8
Agneaux récemment sevrés. 1,2 à 1,4
Agneaux adultes à l’entretien. 1,4 à 1,8
Agneaux à l’engrais. 1,3 à 1,7

On voit donc que les jeunes agneaux ou les brebis au début de la lactation doivent recevoir des rations moins volumineuses que les adultes à l’entretien ou les brebis en fin de lactation.

Dans tous les cas, on a intérêt à distribuer des rations peu encombrantes et à se rapprocher le plus possible des chiffres minima du tableau.

L’apport d’eau de boisson.

— L’eau est indispensable à l’organisme animal. Celui du mouton en demande moins cependant que ceux des bovidés ou des équidés. Cette eau est apportée, d’une part, par les aliments ; d’autre part, sous forme d’eau de boisson. La teneur en eau des différents fourrages est très différente. Tandis que la betterave, les pulpes, l’herbe jeune en contiennent jusqu’à 90 p. 100, les grains, les tourteaux, les sons n’en renferment que 10 à 14 p. 100.

On comprend aisément que l’abreuvement devra être d’autant plus copieux que la ration sera composée d’aliments plus secs.

Pratiquement, on a intérêt à laisser boire les moutons souvent et à volonté une eau propre et tempérée.

En partant des différentes données que nous avons énumérées, on peut établir et vérifier une ration à l’aide des tables reproduites dans les principaux agendas agricoles.

On dispose généralement d’un certain nombre de matières fourragères. Il faudra choisir, en se basant sur le principe des équivalents fourragers, celles qui donnent l’unité fourragère au moindre prix.

Exemple de ration (d’après A.-M. Leroy) pour agnelles d’un an pesant 45 kilos, que l’on veut voir prendre un gain de poids quotidien de 50 grammes.

On trouve dans les tables que ces animaux ont besoin, par jour, de 0,77 U. F., se décomposant ainsi :

Ration d’entretien 0,58 U. F.
Ration de production (croissance) 0,37x0,050 0,19   —
  ————
0,77 U. F.

D’autre part, la ration doit contenir 79 grammes de matières azotées digestibles. On satisfera ces différentes exigences si l’on distribue :

  MATIÈRES sèches. UNITÉS fourragères. MATIÈRES azotées digestibles
  kg. U. F. gr.
3kg,500 de pulpe de betteraves ensilée 0,420 0,26 17
0kg,300 de balle de blé 0,254 0,10 03
0kg,850 de regain de luzerne 0,714 0,34 55
0kg,050 d’avoine 0,043 0,05 04
0kg,025 de tourteau de lin 0,022 0,03 07
  ——
1,453
——
0,78
——
86
Coefficient d’encombrement = M. S.
———
U. F.
= 1,453
———
0,78
= 1,86

Ces notions peuvent sembler un peu théoriques. Elles ont cependant été établies en partant de rations distribuées dans les bons élevages. Fruit de l’expérience plus que du calcul, elles donnent la possibilité de composer des menus rationnels et de vérifier si une ration donnée est bien capable de satisfaire aux exigences variées des animaux. Elles permettent d’expliquer beaucoup d’insuccès et de rectifier de nombreuses fautes d’alimentation.

R. LAURANS,

Ingénieur agricole.

Le Chasseur Français N°622 Octobre 1948 Page 225