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Les canes pondeuses

Un élevage démocratique.

— Les canards domestiques sont des oiseaux sympathiques, moins exigeants que les poules sous le rapport de la nourriture, des soins, du logement, et de croissance beaucoup plus rapide. En choisissant une race pondeuse, dans le genre des Coureurs Indiens et des Kakis, on peut être assuré que leur ponte dépassera sensiblement celle des meilleures poules, tout en étant d’un entretien moins onéreux.

En admettant que les œufs de cane ne soient pas tout à fait aussi délicats, comme goût, que ceux de poules, quand on les mange à la coque, ils les remplacent avantageusement dans tous les apprêts culinaires, ceux de la pâtisserie et de la confiserie, d’autant plus qu’ils sont sensiblement plus gros, leur poids moyen étant de 70 grammes environ, tandis que les œufs de poule pèsent couramment 10 grammes de moins,

Une autre particularité en faveur des canards, c’est qu’ils s’accroissent rapidement, un caneton de dix à douze semaines est au point pour les navets, tandis qu’il faut attendre cinq à six mois pour qu’un poulet, élevé en liberté, soit véritablement marchand. En outre, comme les canards ne sont pas des oiseaux gratteurs et qu’ils ne débordent pas les parcours clôturés, ils causent très peu de préjudices dans les cours, les bosquets, les jardins, pelouses et autres parcours, qu’ils débarrassent des larves, des insectes, des mollusques et autres parasites malfaisants. On peut même, après la récolte des légumes foliacés, les lâcher dans les potagers, afin qu’ils fassent la guerre aux loches et aux limaces ; Enfin, s’il y a à proximité des habitations des fossés croupissants, des mares et autres pièces d’eau favorables à la multiplication des moustiques, les canards goberont les larves de ces malfaisants insectes, contribuant à améliorer l’état sanitaire des lieux.

Pour ces diverses raisons, d’autant plus que, présentement, le grain est rare et cher, les petits éleveurs ont intérêt à créer et à peupler une petite canardière avec une demi-douzaine de canes pondeuses, accompagnées d’un mâle. Ils en retireront, bon an mal an, environ 500 œufs de consommation et une douzaine de canetons de table venant agrémenter le menu familial. En doublant et en triplant cet effectif, on récoltera deux ou trois fois autant d’œufs et on pourra orienter l’élevage du côté de la vente.

La petite canardière.

— Pour loger six canes et un mâle, 3 à 4 mètres d’espace suffisent amplement. Si on ne peut pas distraire un coin de remise ou d’écurie, à usage de canardière, on construira une hutte ou une logette quelconque, en pisé ou en clayonnage, que l’on recouvrira de chaume, la meilleure des couvertures. Dans tous les cas, la bâtisse sera édifiée à un endroit sain, légèrement surélevé, en ayant soin de recouvrir le sol d’une litière abondante fréquemment renouvelée, afin d’éviter la souillure des œufs par les excréments. Les canes pondant presque toujours le matin, on n’effectuera le lâcher que lorsque la ponte sera terminée, afin d’éviter qu’elles ne perdent leurs œufs.

Les meilleures pondeuses sont les canes Coureur Indien, qu’elles soient jaunes ou blanches. La moyenne des œufs pondus est de 200, ceux-ci étant à coquille blanche, non bleutée, comme ceux des autres canes. Toutefois, si on vise à produire conjointement des œufs et des canetons ; on adoptera les Kakis Campbell, issus de croisements entre les Rouen et les Coureurs. La ponte est un peu plus faible que celle de ces derniers, mais les canetons sont très précoces, et leur poids se rapproche sensiblement de celle des Aylesbury.

Incubation des œufs.

— La durée de l’incubation des œufs de cane est de trente jours. On peut les faire éclore dans des couveuses artificielles, à condition de les humidifier davantage que les œufs de poussins, plus particulièrement à partir du quinzième jour, en poussant la saturation jusqu’à 95° aux approches de l’éclosion. Quant à la température, on la maintiendra, comme pour les poussins, entre 39° et 39°,5 au début, pour terminer à 40° et 40°,5 vers la fin.

Si l’incubation était conduite par des poules, des dindes ou des canes, les œufs seraient toujours placés sur la terre même, afin qu’ils bénéficient de la moiteur du sol qui compensera les pertes d’humidité occasionnées pendant les trente jours que dure l’incubation, du fait de la porosité de la coquille.

Élevage des canetons.

— Les jeunes canetons, dont le poids à leur naissance est d’environ 60 grammes, en pèsent le double, soit 120 grammes, vers la fin de la première semaine. Leurs poids se trouve encore doublé la deuxième semaine, si on leur fournit à satiété une nourriture qui leur convient, c’est-à-dire une pâtée bien équilibrée en tous les principes, mais toujours plus molle que celle des poussins, leur préhension avec leur bec en spatule n’étant pas aussi commode. Dans tous les cas, il est inutile de leur donner du grain. Ci-après, une bonne formule de rationnement :

Orge en farine 100 grammes.
Petit son de blé 100
Tourteau de soya ou autre 100
Verdures hachées (orties, etc.) 200
Lait écrémé Q.S.p. 500

À défaut de lait écrémé, le pétrissage se fera avec des eaux grasses ; mais, pour combler le déficit d’azote, on incorporera en plus 100 grammes de farine de viande ou de poisson. Avec cette nourriture, les canetons pèseront 600 à 650 grammes à un mois et 1kg,750 à deux mois. Il suffit de les conserver une à deux semaines de plus pour que leur poids atteigne et dépasse 2 kilogrammes. Le moment est venu de livrer les sujets destinés à la consommation.

Pour éviter les maladies.

— En observant méticuleusement l’hygiène, c’est-à-dire en lavant souvent le réfectoire et les mangeoires, en ne mettant à couver que des œufs bien embryonnés, provenant de reproducteurs vigoureux et en bonne santé, on évitera, en grande partie, les maladies héréditaires et épidémiques qui sont l’apanage des élevages négligés, notamment le coryza, la diphtérie, la coccidiose, les entérites parasitaires et les indigestions ingluviales.

Pour empêcher les décès imputables aux bronchites et aux pneumonies, on interdira aux jeunes canetons l’accès des mares tant que leurs plumes ne seront par recouvertes de l’enduit cireux qui s’oppose à la pénétration de l’eau, laquelle occasionne, en s’évaporant au soleil, des refroidissements parfois mortels. Les autres affections (diarrhée, constipation, anémie et rachitisme) sont surtout imputables à la défectuosité du rationnement.

Alimentation des pondeuses.

— Il n’est pas possible de stimuler ni de soutenir la ponte des canes si on ne leur fournit pas les matériaux nécessaires à l’élaboration de leurs œufs, dont la teneur en protéine et en matières grasses est élevée. En principe, il ne faut pas trop compter sur les ressources naturelles des parcours en proies vivantes, peu abondantes en hiver et en été, mais surtout sur le contenu de la mangeoire. Ci-dessous un modèle de pâtée bien adaptée aux besoins d’une ponte intensive :

Pommes de terre cuites 2,000 kilogrammes.
Farine d’orge 0,750
Son de froment 0,700
Tourteau indigène 0,750
Minéraux (sel, charbon, poudre d’os) 0,150
Orties, choux, salades hachées, etc. 1,700
Lait écrémé 4,000
 
Total
———
10,000
———
kilogrammes.

À défaut de lait écrémé, incorporer dans le mélange 500 grammes de farine de viande ou de poisson et pétrir avec des eaux grasses, en donnant la pâtée chaude pendant la saison froide.

Mondiage d’ARCHES.

Le Chasseur Français N°622 Octobre 1948 Page 226