Qui peut le demander.
— Le bénéfice de la propriété commerciale est accordé
aux commerçants, aux industriels et aux artisans.
Il consiste notamment en ce que les preneurs de ces baux à
loyer de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal peuvent prétendre
au renouvellement de leur bail lorsqu’il arrive à expiration.
Conditions exigées.
— Ce renouvellement ne peut être invoqué que par des
locataires ou leurs ayants droit, qui justifient soit d’une jouissance
consécutive de deux années en vertu d’un ou plusieurs baux écrits successifs,
soit d’une jouissance consécutive de quatre années en vertu, ou bien d’un ou
plusieurs baux verbaux successifs, ou bien de baux écrits ou verbaux
successifs.
Délai de la demande.
— Le preneur doit faire la demande en renouvellement
s’il s’agit d’un bail écrit, dans le délai maximum de deux ans et minimum de
six mois avant l’expiration du bail ou avant l’expiration de sa prorogation
s’il en existe une.
Lorsqu’il s’agit d’un bail verbal ou d’un bail comportant
plusieurs périodes et que le bailleur dénonce le bail à l’expiration de l’une
des périodes autres que la dernière, la demande en renouvellement doit être
formée dans le mois qui suit le congé.
Forme de la demande.
— La demande en renouvellement doit être signifiée au
bailleur par acte extrajudiciaire. Elle mentionne la forme et le délai dans
lequel doit être donné le préavis du propriétaire qui veut exercer le droit de
reprise.
Procédure en cas de désaccord.
— Si les parties intéressées ne parviennent pas à s’entendre
au sujet du renouvellement du bail, le différend est porté devant les
tribunaux.
Essai de conciliation en justice.
— C’est le président du tribunal civil qui doit être
d’abord appelé à statuer. Il est saisi soit par lettre recommandée avec avis de
réception, soit par déclaration faite au greffe de ce tribunal. Ce magistrat
s’efforcera, si possible, de concilier les parties. S’il n’y parvient pas, deux
hypothèses peuvent être envisagées : le bailleur peut consentir au
principe du renouvellement du bail, mais n’être pas d’accord avec son locataire
sur les conditions de ce nouveau ; le bailleur peut aussi se refuser au
renouvellement du bail.
Désaccord sur les conditions du bail.
— Lorsque le désaccord porte seulement sur les
conditions du renouvellement du bail, par exemple sur le prix, sur la durée, le
président du tribunal civil peut charger un expert de rechercher tous éléments
d’appréciation permettant de fixer équitablement les conditions du nouveau
bail.
Sauf accord entre les parties, la durée du nouveau bail est
égale à la durée du bail précédent sans pouvoir dépasser neuf ans. Si le bail à
renouveler est un bail verbal, la durée du nouveau bail est limitée à trois
ans. Finalement, sur le rapport de l’expert et après avoir entendu les parties,
le président du tribunal civil statue et fixe les conditions du nouveau bail.
Cette décision est susceptible d’appel.
Dans le délai d’un mois de la signification de la décision
de justice devenue définitive, les parties contractantes dressent un nouveau
bail aux conditions ainsi fixées. Le preneur peut, s’il le préfère, renoncer à
sa demande de renouvellement du bail à charge de supporter tous les frais.
Refus du renouvellement.
— Il arrive assez souvent que le bailleur ou le
propriétaire refuse purement et simplement de renouveler le bail ou refuse de
le renouveler aux conditions déterminées, ainsi qu’il vient d’être dit. Dans ce
cas, il faut que les motifs qu’il invoque soient jugés graves et légitimes, à
l’encontre du locataire sortant, sinon il s’expose à être obligé de payer à
celui-ci une indemnité dite d’éviction.
La loi sur la propriété commerciale permet aussi au
propriétaire, dans certains cas limitativement déterminés, de reprendre à fin
de bail les lieux loués, sans être tenu de verser au commerçant ainsi dépossédé
ladite indemnité d’éviction.
Tout d’abord, le propriétaire peut refuser le renouvellement
du bail s’il est établi que l’immeuble doit être totalement ou partiellement
démoli comme menaçant ruine ou étant en état d’insalubrité reconnue ; mais
le locataire aura un droit de priorité pour louer dans l’immeuble reconstruit.
En second lieu, le propriétaire peut aussi reprendre les
lieux, soit pour les habiter lui-même, soit pour les faire habiter par son
conjoint, ses descendants ou leurs conjoints.
Troisièmement, le propriétaire peut exercer le droit de
reprise pour exploiter personnellement dans les lieux un commerce ou une
industrie de nature différente de celui du locataire sortant, dans les cas
suivants :
1° Si le locataire n’a pas exploité personnellement pendant
quatre années entières et consécutives le fonds de commerce ou d’industrie
installé dans les lieux ;
2° Si le propriétaire a été sinistré dans son habitation
personnelle ou dans son exploitation industrielle ou commerciale, de telle
sorte qu’il est dans l’impossibilité de l’occuper ou d’y exercer son
entreprise ;
3° Si le locataire est une société anonyme ou en commandite
par actions, ou une entreprise à succursales multiples, à moins que le
propriétaire entre lui-même dans l’une de ces catégories.
De l’indemnité d’éviction.
— Lorsque le propriétaire refuse le renouvellement du
bail sans justifier de motifs graves et légitimes à l’encontre du locataire
sortant, ou sans se trouver dans l’un des cas énumérés ci-dessus, le commerçant
dépossédé a droit à une indemnité d’éviction égale au préjudice causé par le
défaut de renouvellement.
C’est le tribunal civil qui est compétent pour apprécier le
droit à cette indemnité et pour en fixer le taux. Il doit tenir compte à cet
effet de tous les éléments de perte que le locataire aura à subir et de gains
dont il sera privé par suite de l’éviction. En principe, cette indemnité doit
être au moins égale à la valeur du fonds.
Voici résumées les dispositions principales concernant le
renouvellement des baux commerciaux, industriels et artisanaux.
L. CROUZATIER.
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