Accueil  > Années 1948 et 1949  > N°623 Décembre 1948  > Page 288 Tous droits réservés


Le « CHASSEUR FRANÇAIS » sollicite la collaboration de ses abonnés
et se fait un plaisir de publier les articles intéressants qui lui sont adressés.

Le saviez-vous ? …

Un palais démontable.
L'origine du macaroni.
Gourmande étoile.
Des musulmans et du vin.

Un palais démontable : le palais d’été du Grand Khan, suzerain de l’Asie.

— Il y a à Changton, dans la Mongolie, au nord de la Grande Muraille de Chine, un palais qui est tout de bambous. Il est tout doré dedans et travaillé très habilement. Les bambous qui forment le toit sont si bien vernis et si forts que nulle eau ne peut les pourrir. Ces bambous sont bien gros de trois paumes, longs de dix ou quinze, et se taillent d’un nœud à l’autre en travers. Et le palais est fait de ces copeaux. Ils rendent maints autres services aussi, car on en couvre les maisons et l’on en fait beaucoup d’autres travaux.

Ce palais de roseaux que je vous ai décrit est si bien ordonné et disposé qu’il se fait et défait très promptement. On le met tout par pièces et on le porte sans peine là où le seigneur commande qu’il soit. Quand il est dressé, plus de deux cents cordes, toutes de soie, le soutiennent.

Certains croiront, sans doute, qu’il s’agit là d’un palais tout récent, construit après la guerre sino-japonaise (1945).

Qu’ils se détrompent ! Cette description est donnée par le célèbre et intrépide explorateur Marco Polo à l’issue de son voyage à travers le continent asiatique en 1298.

Décidément, les maisons préfabriquées ne sont pas une invention de notre époque, qui aime à s’attribuer les mérites des génies antiques !

L’Origine du macaroni.

— Ce fut en l’an 1220, alors qu’à Palerme et à Naples régnait le roi Frédéric II de Souabe, qu’un alchimiste du nom de Sicho inventa ces délectables tuyaux de pâte connus sous l’appellation de macaroni. Son secret lui fut dérobé par une femme : Giovanella di Canzio, qui imagina d’accommoder ces tuyaux de pâte avec du fromage de Parme. Frédéric de Parme, qui eut l’idée d’en goûter, s’en régala. La famille royale en mangea, puis la cour (et, quand l’exemple vient de haut, il est toujours suivi), Naples, puis toute l’Italie, et bientôt toute l’Europe, et maintenant le monde entier.

Gourmande étoile.

— L’étoile de mer, comme tout être vivant, a besoin pour s’entretenir de se nourrir.

Elle a son petit défaut comme les autres : elle est gourmande. Il lui arrive donc de s’attaquer à des proies bien trop grosses pour sa petite bouche, qui n’est point extensible. Va-t-elle donc rester à gémir devant l’objet de ses désirs que sa bouche ne peut assouvir ? Qu’à cela ne tienne. L’étoile de-mer vomit tranquillement son estomac, comme vous retournez votre gant pour le faire sécher, l’applique contre la proie, qu’elle digère à l’extérieur, puis, le repas terminé, le remet en place, comme vous remettez votre dentier après l’avoir nettoyé.

Et ce n’est point là sa seule originalité ! Lorsqu’on lui coupe un bras, elle n’a point besoin d’aller trouver l’orthopédiste pour se faire adapter un membre artificiel, elle attend tout simplement qu’un autre, tout naturellement ; pousse à sa place. Et, qui plus est, le bras détaché, comme une côte d’Adam donna naissance à Ève, formera une nouvelle étoile de mer.

Des musulmans et du Vin.

— Bien que le vin soit d’origine orientale et que son inventeur soit Gemchid, un des plus anciens rois de la Perse, il n’est prohibé, pour ainsi dire, à l’heure actuelle, que dans son pays natal. (Décidément, nul n’est prophète dans son pays.) En vérité, Mahomet eut bien raison, dans le Coran, d’interdire à ses disciples l’abus du vin, car son simple usage, sous le climat méridional, entraîne des conséquences dont on se doute à peine dans les pays du Nord.

Et ce que raconte en termes imagés, suivant la coutume orientale, l’auteur d’un vieux manuscrit arabe n’est que « la vérité, toute la vérité, mais rien que la vérité » :

« Lorsque Adam eut planté la vigne, Satan vint l’arroser avec le sang d’un paon. Lorsqu’elle poussa des feuilles, il l’arrosa du sang d’un singe. Lorsque les grappes parurent, il l’arrosa du sang d’un lion et, lorsque le raisin fut mûr, il l’arrosa du sang d’un cochon. La vigne, abreuvée du sang de ces quatre animaux, en a pris les différents caractères. Ainsi, aux premiers verres de vin, le sang du buveur devient plus animé, sa vivacité plus grande, ses couleurs plus vermeilles ; dans cet état, il a l’éclat d’un paon. Les fumées de cette liqueur commencent-elles à lui monter à la tête ? Il est gai, il saute, il gambade comme le singe. L’ivresse le saisit-elle ? Il est un lion furieux. Est-elle à son comble ? Semblable au quatrième animal, il tombe, se vautre, s’étend et s’endort. »

P. SALAUN.

Le Chasseur Français N°623 Décembre 1948 Page 288