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Guerre aux hannetons !

Dans une grande partie de la France, 1949 doit être l’année du grand vol triennal des hannetons.

Or cet insecte et sa larve, le ver blanc, sont les plus grands destructeurs de végétaux que l’on connaisse ; leur activité néfaste se manifeste aussi bien dans les prairies naturelles, les cultures de betteraves et de pommes de terre, les fraisiers et les cultures maraîchères, que dans les plantations d’arbres et les pépinières fruitières, viticoles et sylvicoles.

C’est ainsi que, ces années dernières, on a signalé, dans bon nombre de départements, la mort de nombreux jeunes arbres fruitiers et forestiers à la suite d’attaques de vers blancs sectionnant les radicelles et décortiquant les racines principales au-dessous du collet.

Biologie de l’insecte.

— Il existe de nombreuses espèces de hannetons, mais le plus répandu est le hanneton commun (Melolontha melolontha) dont la femelle pond en terre en juin. Les jeunes larves naissent peu de temps après et se tiennent à faible profondeur, ne faisant que des dégâts peu importants jusqu’à la fin de l’année. Aussitôt que les premiers froids surviennent, elles descendent plus profondément et s’engourdissent jusqu’en mars. Dès les premiers beaux jours, les vers blancs, encore petits, remontent à proximité de la surface du sol. Extrêmement voraces, ils s’attaquent aux plantes ligneuses aussi bien qu’aux racines de légumes et continuent leurs ravages pendant le printemps et l’été. À l’approche de l’hiver, ils descendent une seconde fois profondément, remontent à nouveau au printemps de leur troisième année et font encore d’importants dégâts jusqu’en juillet. Vers la fin de ce mois, ils se transforment en nymphes ou chrysalides, puis en hannetons à l’automne. Ceux-ci vont rester blottis en terre jusqu’au printemps suivant. Ils sortiront alors pour se nourrir, puis s’accoupler et pondre.

Ainsi, la vie du hanneton commun, en France, a une durée de trois ans répartis sur quatre millésimes, c’est-à-dire que trois années complètes s’écoulent entre le dépôt des œufs dans la terre et l’apparition des hannetons issus de ces œufs.

Comme nous le disions plus haut, 1949 sera, dans la plupart des régions de France, une « année à hannetons ».

Moyens de destruction.

— Ils sont nombreux, mais nous ne voulons entretenir nos lecteurs que de ceux qui, actuellement au point, peuvent être couramment employés.

Les façons culturales jouent un rôle important dans la destruction des vers blancs. Ceux-ci sont, en effet, très sensibles aux frictions et aux chocs qui déterminent rapidement leur mort. Cette sensibilité est plus grande de juillet à septembre de leur deuxième année et en avril-mai de leur troisième année. C’est pourquoi les façons culturales faites à ces époques permettent de détruire de nombreux vers blancs.

Le ramassage des hannetons est également un moyen à ne pas négliger, bien que la rareté de la main-d’œuvre soit devenue un très sérieux obstacle à sa généralisation.

La désinfection du sol à l’aide du sulfure de carbone peut rendre des services, mais se révèle onéreuse et n’a pas toujours donné complète satisfaction, en raison de la technique assez compliquée de son emploi.

Depuis quelques années, les nouveaux insecticides de synthèse : D. D. T., H. C. H., S. P. C. ont été utilisés en divers endroits, soit contre les vers blancs dans le sol, soit contre les hannetons.

Nous ne pouvons, dans cette brève causerie, passer en revue tous les résultats obtenus ; nous nous bornerons donc à en indiquer quelques-uns.

Le D. D. T. semble particulièrement efficace pour la destruction des hannetons. En mai dernier, en Suisse, des essais de poudrage à l’aide de ce produit ont été faits avec un succès complet sur les arbres où les insectes, après leur sortie de terre, se groupent pour passer la nuit. Ces essais ont été faits avant le lever du jour à l’aide d’un avion utilisant une poudre à 5 p. 100 de D. D. T.

En Normandie, M. Régnier fit également l’essai d’un produit à base de H. C. H. et réalisa une destruction des insectes, moins parfaite cependant qu’avec le D. D. T.

Par contre, le D. D. T. n’a donné aucun résultat contre les vers blancs, alors que le H. C. H. et le S. P. C. se sont révélés très efficaces.

On les emploie soit en poudre à la surface du sol, soit en arrosages. En Suisse notamment, ont été utilisées des bouillies contenant de 0,7 à 1 p. 100 de H. C. H. en quantité variable selon la force des plantes. C’est ainsi qu’un pommier adulte recevait 180 à 200 litres de bouillie, tandis que de petits arbres taillés en recevaient de 1 à 10 litres. Dans la plupart des cas, la mortalité des vers blancs fut de 90 p. 100.

M. Régnier a utilisé les poudres à base de H. C. H. en les semant sur le sol et les enterrant par binage. Il a notamment constaté l’effet persistant véritablement extraordinaire de ce produit. Le S. P. C. a donné des résultats identiques.

Conclusion.

— Les résultats de ces divers essais permettent de préconiser le poudrage ou la pulvérisation de produits à base de D. D. T. ou de H. C. H. sur le feuillage des arbres les plus visités par les hannetons, lors de leur apparition massive, et de conseiller également une judicieuse combinaison des façons culturales et de l’emploi d’insecticides à base de H. C. H. ou de S. P. C. en poudrages ou en pulvérisations pour la destruction des vers blancs dans le sol.

E. DELPLACE.

Le Chasseur Français N°627 Mai 1949 Page 459