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Le désherbage

Malgré tous nos soins redoublés et notre vigilance, les mauvaises herbes ont envahi maints endroits de notre jardin, et, plus spécialement les allées. Il nous faudra, sans hésiter, détruire ces mauvaises herbes avant leur montée à graine, non pas en les extirpant avec beaucoup de peine et de fatigue, mais à l’aide de produits chimiques, en général peu coûteux.

Outre les désherbants nombreux et variés du commerce et d’une efficacité souvent remarquable et qui, au surplus, n’exigent aucune précaution, tant dans leur mode d’emploi que dans leur emploi lui-même, il nous paraît économique et intéressant de préparer soi-même des solutions herbicides.

Un premier produit qui donne de bons résultats est le sel marin dénaturé. Voici comment, pratiquement, il faut procéder : on préparera une solution à la dose de 5 kilogrammes de sel dénaturé ; ce produit se trouve maintenant facilement dans le commerce et principalement dans toutes les coopératives agricoles. Il sera bon d’opérer dans un récipient de bois, car il faut se rappeler que le sel ronge facilement le métal. Par beau temps, on épandra et on arrosera dans la proportion de 5 litres de solution par mètre carré.

Mais plus efficace est, sans contredit, le chlorate de soude, que l’on pourra utiliser de deux façons :

1° On fera dissoudre le chlorate de soude dans l’eau et ce, à la dose de 15 à 20 grammes par litre, et on arrosera le terrain à raison d’un litre de solution par mètre carré.

2° On fera dissoudre le chlorate dans de l’eau, soit 250 grammes par litre, et on appliquera alors cette solution ainsi concentrée à l’aide d’un pulvérisateur. Un litre peut alors couvrir aisément 10 mètres carrés.

Remarques pratiques d’importance primordiale.

— 1° Quelle que soit la méthode utilisée, décrite ci-dessus, on traitera dès que la végétation repousse, et, de préférence, après une pluie ou un arrosage léger. Ne pas s’étonner du jaunissement de la végétation : en tous les endroits traités, tout meurt et les mauvaises herbes ne repoussent que fort difficilement.

Des précautions sont à prendre : Si le chlorate de soude est le meilleur des désherbants, il exige, dans son emploi, certaines précautions :

— pendant toutes les manipulations du produit, on évitera tout contact avec une matière combustible ; en particulier, on s’empêchera de fumer ;

— ne pas répandre le produit sur un plancher ou, tout au moins, balayer de suite, mais sans mouiller. Le mieux est d’opérer sur une surface cimentée ;

— veillez également à ce que les vêtements ne soient pas atteints par la solution ; en cas de contact, on les lavera tout de suite très copieusement à l’eau chaude ;

— enfin on évitera de projeter la solution sur les plantes constituant les bordures du jardin.

Puis la destruction des mauvaises herbes dans nos jardins peut aussi être réalisée au moyen de colorants, de nature organique, et nitrés (dinitrophénol), que l’on emploie soit en pulvérisations, soit en poudrages comme la sylvinite ou la kaïnite et la cyanamide calcique.

La sylvinite en poudre, vendue comme engrais dans le commerce, sera additionnée d’environ 5p. 100 de terres d’infusoires ou kieselguhr et convient très bien à la dose de 6 à 10 kilogrammes à l’are.

La kaïnite, à raison de 12 à 15 kilogrammes à l’are, est également très efficace, mais certaines mauvaises plantes échappent à son action tels l’oseille, le séneçon, la renouée.

La cyanamide calcique, à raison de l à 2 kilogrammes à l’are, produit des effets heureux.

Notons que ces derniers produits apportent en même temps une fumure très appréciable. Toutes les mauvaises herbes de nos carrés de jardins : les laiterons, les liserons, les renoncules, les chénopodes sont détruits, ainsi que les jeunes pousses d’ortie, mais pommes de terre, carottes, oignons, non seulement résistent, mais profitent de cette fumure.

Dans nos régions, à climat tempéré, les allées de nos jardins sont surtout envahies par des graminées. Il existe, pour lutter contre elles, quantités de préparations brevetées à bases de sulfures de sodium, de calcium ou de baryum auxquelles on ajoute de la chaux vive, des huiles minérales ou autres produits visqueux : on les épand en arrosages mais, il ne faut pas, naturellement, qu’elles atteignent les plantes cultivées.

Dans cet ordre d’idées, on peut, soi-même, faire des essais : on achètera dans le commerce du bisulfite de soude et on en fera une solution à 45 p. 100 ou de l’arsenite de soude à 5 p. 100. Ces deux produits ont de grands effets et sont très économiques, mais il ne faut pas répéter trop souvent leur emploi, car il pourrait y avoir accumulation dans les couches supérieures du sol et ils deviendraient alors un réel danger pour les plantes cultivées.

Enfin toutes les plantes qui, à l’état jeune, ont des feuilles étalées et molles avec bourgeons apparents peuvent être détruites facilement par des pulvérisations ou des épandages de différents produits énumérés ci-dessus.

Les renoncules, la moutarde, la ravenelle, la matricaire, la renouée disparaîtront sans aucun doute avec des doses de 8 à 10 p. 100 d’acide sulfurique à 65°. Mais les coquelicots, les vesces sauvages nécessiteront une dose plus élevée, allant jusqu’à 12 p. 100.

Enfin les chardons, si difficiles à vaincre : ils ne seront pas détruits, mais alors qu’après échardonnage ils repoussent en prospérant de plus belle au point de donner 2 à 3 tiges ; après épandage d’acide sulfurique, il ne repoussera plus qu’une tige et, au surplus, elle n’aura pas le temps de fleurir.

Notons pour terminer que, depuis 1939, certains produits nouveaux ont été utilisés en Amérique pour accélérer la croissance (Rootone), donner de la vigueur aux produits repiqués (Transplantone), favoriser la formation des fruits en empêchant leur chute prématurée, en les rendant plus fermes et plus savoureux (Fruitone), il existe, de même, des produits nouveaux empêchant la poussée des mauvaises herbes et entravant totalement leur développement. Les difficultés de toutes sortes rencontrées ces dernières années n’ont pas encore permis l’extension et la vulgarisation de ces nouveaux produits. Cependant de nombreux essais ont été tentés, d’autres sont à l’étude. En temps utile, nous entretiendrons nos lecteurs et les mettrons au courant de cette importante question.

Ainsi, à l’aide de procédés de préparation simple et à la fois peu coûteuse, il sera facile de lutter efficacement contre la destruction des mauvaises herbes envahissant le jardin et surtout les allées. Si l’on veut convenablement désherber un carré de terrain réellement infesté par les mauvaises herbes, quatre mois environ devront s’écouler avant qu’on puisse le livrer à la culture.

Ch. BOILEAU.

Le Chasseur Français N°629 Juillet 1949 Page 552