Contrairement aux chevaux, qui se montrent généralement très
délicats et très difficiles sur la qualité de l’eau de boisson mise à leur
disposition, les bêtes bovines s’accommodent volontiers du régime de l’eau des
mares, appliqué couramment dans beaucoup de fermes, malgré la critique qu’on en
fait, depuis longtemps, tant au point de vue alimentaire qu’à celui de la
propagation de certaines maladies parasitaires ou contagieuses.
Nous devons à la vérité de reconnaître que des animaux ayant
toujours été abreuvés de cette manière, à laquelle l’habitude leur fait donner
la préférence, peuvent se maintenir en excellent état de santé et de
rendement ; mais nous pouvons affirmer par contre que si, au lieu de boire
des eaux bourbeuses, souillées par toutes sortes d’immondices, ils ne
s’abreuvaient que d’eau potable, propre et saine, ils s’en porteraient encore
mieux.
La disposition particulière de l’estomac des ruminants,
comportant quatre compartiments où s’accumulent les aliments en plus ou moins
grande quantité, fait que l’eau de boisson les traverse comme sur un filtre et
se dépouille de la plupart de ses impuretés, avant d’arriver dans l’intestin où
elle est absorbée.
À défaut d’une stricte surveillance sur la qualité des eaux
destinées à leur bétail, les cultivateurs doivent veiller surtout à leur
distribution en quantité suffisante, spécialement quand il s’agit de vaches
laitières.
Le lait, dont les qualités nutritives bien déterminées
mériteraient d’être mieux connues et plus utilisées dans l’alimentation des personnes,
contient une proportion d’eau estimée, à l’analyse, entre 80 et 85
p. 100 ; c’est-à-dire que, dans 10 litres de lait, il y a au
moins 8 litres d’eau de constitution. Pour fournir une bonne
production, les vaches ont donc besoin de trouver dans leur ration une
abondante quantité d’eau, dont une partie sera apportée par les aliments
(herbe, pulpes, betteraves, buvées, barbotages, etc.), tandis que l’eau de
boisson doit fournir le complément nécessaire pour le rendement optimum des
animaux. Sous ce rapport, le meilleur régime est celui du pâturage, dont tous
les cultivateurs connaissent bien les heureux effets sur la sécrétion lactée,
l’herbe verte contenant une proportion d’eau variant de 70 à 80 p. 100, ce
qui n’empêche pas les vaches de s’abreuver en plus, quand elles ont de l’eau à
leur disposition. Bien entendu, elles en éprouvent moins le besoin que
lorsqu’elles sont nourries à l’étable avec des fourrages secs et des aliments
concentrés, mais ce supplément d’eau n’en est pas moins nécessaire pour
favoriser la rumination et la digestion.
On peut tabler approximativement, car le tempérament de
chaque animal, son âge, son régime habituel, la température et les conditions
atmosphériques du moment exercent toujours leur influence, qu’une vache
laitière a besoin de 10 à 14 litres d’eau, pour 100 kilos de son
poids vif, soit environ 50 litres d’eau par jour pour une vache de 500 kilos,
quantité qu’il faut considérer comme un minimum. Quand les animaux sont nourris
à l’étable, on compte pour les jeunes bovins et les mâles adultes qu’il faut
leur distribuer 4 à 5 litres d’eau par kilo de substance sèche de leur
ration, pour obtenir un pourcentage d’environ 80 p. 100, à peu près
identique à celui fourni par l’herbe verte.
S’il s’agit de vaches laitières en plein rendement, la
quantité d’eau nécessaire pourra être évaluée à raison de 6 à 7 litres par
kilo de matière sèche de la ration, soit environ 70 litres d’eau de
consommation journalière chez des bêtes produisant de 12 à 15 litres de
lait.
La température de l’eau distribuée comme boisson a une
importance toute particulière ; quand elle est trop froide, ainsi que cela
se produit souvent en hiver pour les vaches buvant à la mare ou dans un
abreuvoir situé en dehors de l’étable, la consommation s’en trouve réduite et
la production du lait ne tarde pas à diminuer. Pour remédier à cet inconvénient
et aux accidents de coliques ou d’avortement qui peuvent en résulter, il est
indiqué de faire boire, au bac ou au seau dans l’étable, de l’eau dégourdie en
y ajoutant de l’eau chaude, ou tirée suffisamment à l’avance pour qu’elle se
réchauffe à la température du local. D’observations faites à maintes reprises,
on a pu constater, chez des vaches en pleine lactation, des écarts de 2 litres
dans la production journalière entre celles qui buvaient froid au dehors, et
celles qui recevaient à l’étable de l’eau tiédie, à 20° environ.
Des avantages à peu près identiques ont été enregistrés chez
des vaches disposant d’un abreuvoir permanent, automatique ou non, par
comparaison avec celles qui étaient abreuvées deux fois par jour seulement à
l’heure des repas.
D’autre part, puisque plus les vaches boivent plus elles
produisent de lait, il faut les alimenter le plus possible avec des nourritures
délayées sous forme de barbotages, soupes, mêlées, décoctions de céréales,
etc., dont on variera la composition et l’assaisonnement (sel, mélasse,
condiments) pour exciter l’appétit et la soif des animaux.
Néanmoins, il faut user du procédé sans en abuser, car les
bons effets de l’eau chaude ne seraient que passagers, et son action finirait
par être débilitante pour les animaux. Par contre, l’eau chaude sera toujours
employée avantageusement pour la composition d’infusions ou de décoctions,
préparées avec des grains ou des fourrages secs divisés, dont la valeur
alimentaire se trouvera de ce fait augmentée dans la proportion d’un tiers
environ.
J.-H. BERNARD.
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