Si nos chiens ne lisent pas affiches et journaux, ils voient
les préparatifs faits par leurs maîtres et savent que bientôt ils vont pouvoir
se livrer à leur passion. Mais ce jour d’ouverture, si impatiemment attendu par
chiens et maîtres, ne sera pour beaucoup qu’un éclair de joie. Si le temps est
chaud, comme il arrive souvent, dès neuf heures du matin, on pourra voir les
uns et les autres tirant la langue et cherchant l’ombre des arbres ou en quête
d’un ruisseau. L’embonpoint exagéré et le repos forcé de février à septembre en
sont la cause.
Le chien, dès l’âge de quatre ans, a tendance à engraisser
et si sa nourriture, comme c’est souvent le cas, se compose de soupes au pain
ou aux farines de céréales, il prend vite l’aspect d’un « tonneau à
pattes ». Galoper à travers champs toute une journée devient pour lui une
impossibilité. Le supplément de graisse et le peu de résistance des pieds s’y
opposent.
Tout chasseur un peu prévoyant devra tâcher de mettre son
compagnon en état de travail. Malheureusement pour ceux qui habitent les
grandes villes, ce n’est pas toujours possible.
Pour ceux de la campagne, et dans les pays où cela est
toléré, des sorties dans les champs après l’enlèvement des récoltes
constitueront le meilleur exercice et permettront de remettre au point le
dressage qui, depuis la fermeture, a été quelque peu négligé. Dans les pays où
ces sorties dans les champs sont interdites, il y a toujours la possibilité de
longues promenades sur les routes. L’entraînement commencé à pied, sur les
talons du maître, gagnera à être complété par quelques promenades derrière la
bicyclette. On pourra commencer cet entraînement une vingtaine de jours avant
l’ouverture. D’abord 5 à 6 kilomètres à allure modérée (8 à 10 kilomètres
à l’heure), puis en augmentant chaque jour la vitesse et la distance pour
arriver l’avant-veille de l’ouverture à faire une vingtaine de kilomètres, à
raison d’une douzaine de kilomètres à l’heure, coupés par un repos d’un quart
d’heure.
Il est bien entendu que le chien devra suivre la bicyclette
le plus près possible. Au début, il sera peut-être nécessaire de le tenir en
laisse, mais il s’habituera vite à suivre en liberté.
Cet entraînement, en même temps qu’il assouplira les
membres, réglera la respiration et surtout endurcira la sole.
Combien voit-on de ces malheureux chiens qui, à bout de
souffle, n’osent pas poser leurs pieds endoloris et saignants sur les chaumes
et les cailloux.
Pendant ces séances, l’envol de pigeons ou d’oiseaux, la
traversée de la route par un chat où des poules seront autant d’occasions de
mise au down. Au bout de quelques jours, s’il n’est pas exécuté
spontanément, la répression devra suivre.
Pendant tout l’entraînement, la nourriture devra être
exclusivement carnée : viande de cheval ou tripes, si l’on peut s’en procurer.
Proscrire complètement la soupe au pain.
Si l’on a plusieurs chiens à entraîner, ils pourront être
accouplés en observant si possible une égalité d’allure. S’il s’agit de chiens
courants, cet entraînement sera encore plus une nécessité, car pour eux le
travail par grand soleil est très dur, et une piste peut les entraîner si loin
qu’ils ne peuvent retraiter qu’à la nuit.
Eux aussi peuvent être entraînés derrière la bicyclette.
C’est d’ailleurs le moyen le plus souvent employé par les
équipages de chasse à courre.
Je ne saurais terminer cet article sans recommander aux
propriétaires de jeunes chiens débutants de ne pas conduire ceux-ci à proximité
des groupes de chasseurs, au moins pendant les premiers jours de chasse.
50 p. 100 des élèves ayant peur du coup de fusil ont
contracté cette infirmité en entendant ces fusillades nourries, alors que mal
aguerris.
Également, je conseillerai de ne pas faire chasser un chien
nouvellement dressé avec un camarade indiscipliné.
Si le jeune est mis au rapport et qu’une pièce de gibier
soit tuée, il n’aura pas le temps de l’appréhension pour la rapporter. Son
compagnon l’aura prise et se sera peut-être sauvé avec. Bien mauvaise leçon. De
même que si une pièce de gibier est levée et que l’indiscipliné coure après.
A. ROHARD.
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