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Élevage

Le « tétanos » des animaux

Grâce aux progrès de l’antisepsie en médecine vétérinaire, aux vertus préventives ou protectrices du vaccin antitétanique ou du sérum et encore plus celles de l’anatoxine du docteur-vétérinaire Ramon, qui a valu dernièrement à son auteur la plus flatteuse des manifestations, de la part du corps médical et des deux médecines, le tétanos se rencontre de moins en moins chez les animaux. Néanmoins les chevaux y restent particulièrement exposés, beaucoup plus que les ruminants (bovins, moutons et chèvres), et tous les propriétaires d’écuries ne doivent pas ignorer quelles ressources la science met à leur disposition pour combattre cette maladie toujours grave, au point de provoquer une mortalité de 90 p. 100 chez les moutons, de 70 p. 100 chez les bovins et de 75 p. 100 chez les chevaux, quand on la constate en pleine évolution. Le principe de médecine conseillant qu’il vaut toujours mieux prévenir que guérir trouve ici son application sous des formes différentes dont il faut savoir user à propos.

Le sérum antitétanique protège immédiatement un animal en apportant à son organisme des éléments de défense immédiate préparés chez un autre sujet, mais qui n’agissent que pendant une période de courte durée, tandis que le vaccin ne le protège qu’après un certain temps, mais son action est effective pendant plusieurs mois au moins, voire plusieurs années.

Le tétanos est une maladie infectieuse inoculable à l’homme et aux animaux, provoquée par un microbe spécial, le « bacille de Nicolaier », qui, en se développant à la surface des plaies, sécrète en abondance des « toxines » dont l’action sur les centres nerveux provoque ces contractures permanentes des muscles, toujours très impressionnantes à voir et le plus souvent très douloureuses pour le malade.

Le microbe en question ne fut découvert qu’en 1884 par le savant qui lui a donné son nom, et ce n’est qu’en 1890 que Knud Faber signala que le sérum des animaux réfractaires pouvait neutraliser les toxines tétaniques dans les cultures du microbe. C’est en partant de cette heureuse constatation que de nombreux savants et expérimentateurs, spécialement parmi ceux attachés à l’Institut Pasteur, ont pu mettre en application les règles d’une sérothérapie préventive et curative qui ont abouti à la consécration de « l’anatoxine tétanique » de Ramon.

Le microbe du tétanos semble avoir des terrains d’élection ; on le trouve souvent dans les eaux et le sol de certaines régions, les terrains maraîchers, entre autres, des environs de Paris et des grandes villes, alors qu’il ne se trouve que très rarement dans d’autres. De même qu’il existe des « champs maudits », en Beauce en particulier, où les animaux sont plus spécialement exposés à contracter le charbon, il existe également des terrains à tétanos, où la maladie sévit à l’état endémique.

De ce fait, il y a dans nos campagnes un danger permanent de contamination trop souvent ignoré des cultivateurs, qui en général ne se soucient guère des plaies légères qu’ils peuvent avoir aux mains et qui, pour la plupart, circulent avec les pieds nus dans leurs chaussures ou leurs sabots. Or, parmi les plaies accidentelles, celles qui sont le plus exposées à l’infection sont celles qui sont le plus facilement souillées par la terre ou le fumier, celles des mains ou des pieds pour les personnes, celles des extrémités des membres et celles des régions qui sont en contact avec la litière ou le sol pour les animaux séjournant à l’écurie.

Les plaies consécutives aux opérations chirurgicales, surtout chez les chevaux, se compliquent assez souvent de tétanos, qu’il s’agisse de castration, d’amputation de la queue, d’interventions sanglantes sur les sabots à propos de seimes, bleimes, javarts, clous de rue, etc. ; enfin l’infection de la plaie du nombril chez les nouveau-nés, poulains, veaux et surtout les agneaux peut provoquer le tétanos, qu’on a vu évoluer dans certaines bergeries sous la forme de véritables épidémies.

L’anatoxine tétanique est appelée à fournir dans toutes ces circonstances la meilleure protection que l’on puisse désirer ; fabriquée à partir de la toxine, beaucoup plus dangereuse que le microbe, mais dont la virulence est atténuée par des agents divers, tels que le formol et la chaleur entre autres, son emploi, même répété, est absolument sans danger.

Aussi est-ce une sage précaution de l’utiliser régulièrement chez les femelles en état de gestation, principalement les poulinières, quelque temps avant la mise bas ; le produit se trouvera de ce fait protégé contre le tétanos d’origine ombilicale par passage de la résistance de la mère au fœtus.

Après une première injection d’anatoxine, il est prudent d’en pratiquer une seconde, dite de rappel, quelques mois après, le Dr Ramon et ses collaborateurs estimant qu’elle fournira l’assurance que l’animal ainsi traité sera mis vraisemblablement, sinon sûrement, à l’abri du tétanos jusqu’à la fin de son existence.

J.-H. BERNARD.

Le Chasseur Français N°633 Novembre 1949 Page 752