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Causerie médicale

L’eczéma du nourrisson
et de l’enfant

Peu de maladies ont suscité autant de discussions scientifiques que l’eczéma ; maladie purement constitutionnelle pour l’ancienne école française, on a voulu en faire à un certain moment une affection microbienne, ce que les travaux ultérieurs n’ont pas confirmé, sauf pour certains cas, aujourd’hui bien connus, tel l’eczéma fessier du nourrisson, chez les enfants mal tenus ou atteints d’entérite, ou certaines éruptions du cuir chevelu d’abord suintantes, puis squameuses.

L’eczéma vrai du nourrisson survient entre le deuxième et le neuvième mois, indépendamment de toute cause externe. Il débute par la face, aux joues ou au front, respectant généralement la partie médiane, les paupières, le nez, les lèvres et presque toujours le menton, mais peut ensuite se propager aux oreilles, au cuir chevelu et même aux membres sans autrement affecter l’état général que par de fortes démangeaisons, à condition de ne pas exposer le bébé à un changement de milieu ou de régime ou encore à un traitement intempestif. Il n’est guère nécessaire de décrire cette éruption si facilement reconnaissable, débutant par une poussée de petites bulles qui se rompent et laissent suinter un liquide abondant qui finit par se dessécher et former des croûtes.

La chose importante serait de connaître la cause de cette éruption ; elle reste malheureusement encore obscure ; il est difficile d’incriminer l’alimentation, car on l’observe chez des enfants nourris au sein et on en est réduit à invoquer une susceptibilité particulière de l’épiderme, une intolérance à laquelle on donne aujourd’hui le nom d’allergie, ce qui ne nous avance pas beaucoup.

Dans certains cas d’eczéma de l’adulte ou du grand enfant, on peut arriver à déceler la substance alimentaire ou médicamenteuse qui déchaîne les accidents, le réactogène comme on l’appelle, et, si sa suppression n’est pas possible, on peut parfois, pas toujours, « désensibiliser » le sujet en lui faisant absorber, par voie buccale ou cutanée, des doses d’abord infinitésimales de ce réactogène que l’on augmente graduellement.

Cette méthode de désensibilisation spécifique a donné quelquefois des résultats très heureux, malheureusement inconstants.

Parmi les médications qui se sont montrées les plus efficaces, on cite les injections intramusculaires d’extrait délipoïdé de rate, l’hyposulfite de magnésium (en injections intramusculaires ou par voie buccale) et l’auto-hémothérapie, qui détermine souvent un choc salutaire.

Cette méthode consiste à prélever une petite quantité de sang dans une veine et à la réinjecter aussitôt dans une masse musculaire ; la prise de sang étant souvent impossible chez le jeune enfant, on peut recourir au sang maternel ou paternel, après avoir pris toutes les précautions pour s’assurer de son intégrité.

Quant au traitement local, il devra être extrêmement prudent ; pendant la période suintante, il faut se borner à des applications humides de décoction de guimauve ou de camomilles simplement recouvertes de coton cardé, mais sans imperméable et fréquemment renouvelées ; et ce n’est qu’une fois la période inflammatoire passée qu’on pourra recourir aux pâtes légèrement additionnées d’antiseptiques, comme le coaltar. Des pâtes et non des pommades ; la différence est que les pâtes renferment une certaine proportion de poudre inerte, ce qui les rend poreuses et leur permet de décongestionner la lésion, alors que les pommades, uniquement composées de matières grasses, ou la simple vaseline, produisent l’effet inverse, étant imperméables.

Dans les formes microbiennes ou dues à des levures, plus fréquentes chez le grand enfant, on usera de lotions antiseptiques comme l’eau d’Alibour, l’alcool iodé (au centième), les solutions faibles de nitrate d’argent.

Chez l’enfant déjà grand, quand on a pu déterminer le réactogène en cause, notamment s’il est d’ordre alimentaire, le plus sage sera de l’éliminer, quitte à faire ensuite des tentatives de désensibilisation. Tel sujet est sensible au blanc d’œuf, au poisson, aux fraises ; il faudra qu’il s’abstienne de ces aliments. Mais chez le nourrisson, il faut se garder de modifier le régime ; non seulement on risque de le débiliter, mais encore on peut l’exposer à des accidents graves allant jusqu’à la mort presque subite.

Il y a une parenté indéniable entre l’eczéma et d’autres affections « allergiques », comme l’asthme, le rhume des foins, l’urticaire, certains œdèmes que l’on attribue aujourd’hui à une décharge d’histamine dans le sang et contre lesquels on use aujourd’hui de nouveaux produits chimiques, les antihistaminiques de synthèse ; je ne sache pas qu’on les ait employés dans l’eczéma.

Dr A. GOTTSCHALK.

Le Chasseur Français N°633 Novembre 1949 Page 760