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Baux du domaine de l’État, des départements,
des communes et des établissements publics.

Baux du domaine de l’État, des départements, des communes et des établissements publics.

— La loi du 13 avril 1946, portant Statut du Fermage, exclut des dispositions de celui-ci les baux du domaine de l’État, des départements, des communes et des établissements publics ne portant pas sur une exploitation agricole.

La difficulté réside dans l’explication des termes « exploitation agricole ». Dans certains départements, le Nord par exemple, des arrêtés préfectoraux pris en application du Statut du Fermage stipulent que « toute parcelle de terre ou tout groupe de parcelles appartenant au même bailleur et loués au même preneur d’une superficie supérieure à 20 ares sont considérés comme parties essentielles d’une exploitation agricole ».

Fallait-il en conclure que toute parcelle de terre de plus de 20 ares appartenant à un établissement public, à un hospice par exemple, tombait sous le coup du Statut du Fermage puisqu’elle devait être considérée comme partie essentielle d’une exploitation agricole ?

Cette question comporte une réponse négative.

En effet, M. le ministre de la Justice, dans une réponse à un parlementaire (Journal officiel du 30 avril 1947, no 1291), a exprimé l’avis que le législateur, par « exploitation agricole », a voulu viser un ensemble de terres cultivées et de bâtiments nécessaires à la culture susceptibles de constituer une exploitation autonome et se suffisant à elle-même.

Bien entendu, selon la formule administrative consacrée, l’appréciation des tribunaux demeure souveraine. Pourtant, la jurisprudence tend à se fixer dans le sens indiqué par le ministre de la Justice.

En effet, un jugement du 4 juillet 1947, rendu par le Tribunal paritaire de Béthune, a exclu des dispositions du Statut du Fermage des parcelles qui, bien qu’intégrées à une exploitation agricole, ne constituent pas une exploitation complète.

Enfin, un arrêt récent de la Cour de Cassation (Ch. civ. soc., 12 mars 1948, C. P. 5 juin 1948, Brunel contre hospice de Langogne) a jugé qu’une exploitation agricole complète doit comprendre à la fois des bâtiments d’habitation et d’exploitation, des terres, prés et pâtures, éléments nécessaires à l’autonomie culturale d’un bien rural.

Ainsi, en conclusion, les parcelles inférieures ou supérieures à 20 ares appartenant à une collectivité publique ne sont pas soumises au Statut du Fermage, sauf s’il s’agit d’exploitations agricoles complètes.

Par ailleurs, une autre source de difficultés réside dans la fixation du prix des fermages dus aux établissements publics pour location de terres. Celui-ci, fixé par adjudication publique, atteint souvent un taux assez élevé.

Les fermiers, après s’être rendus adjudicataires, se croient autorisés à intenter une action en réduction de prix en application de la loi du 4 septembre 1943 modifiée par l’ordonnance du 3 mars 1945.

Cette démarche n’est pas fondée.

En effet, la Cour de Cassation a estimé que, si en créant une action en réduction du prix, la loi susvisée a eu pour but de protéger le preneur contre les exigences abusives émanant de l’initiative et de la volonté des propriétaires, la sanction qu’elle a prévue ne peut s’appliquer à une commune ou à un établissement public. Ces collectivités publiques ont, en procédant à l’adjudication d’un bien rural, purement et simplement observé une règle traditionnelle protectrice de leurs intérêts et recommandée par les textes administratifs auxquels elles sont soumises.

Pierre WAUTRICHE.

Le Chasseur Français N°633 Novembre 1949 Page 760