On désigne sous le nom de phtiriases des maladies cutanées
provoquées par la présence de poux.
En son sens le plus vulgaire, le terme poux comprend tous
les insectes parasites, c’est-à-dire les articulés à trois paires de pattes,
qui ne sautent pas et son dépourvus d’ailes. Ce sont des insectes de petite
taille, de quelques millimètres de long, munis de pattes puissantes terminées
par un ou deux ongles que l’animal utilise pour grimper. Les œufs sont appelés
lentes, de forme ovoïde, blanchâtres, et présentent un opercule au pôle
supérieur ; ils sont solidement fixés au poil par une substance
agglutinante.
L’organisation de la bouche a fait rentrer les poux dans
deux familles : les Pédiculidés, ou poux proprement dits, ont une
ouverture buccale placée à l’extrémité antérieure de la tête et disposée pour
sucer. C’est une trompe mobile constituée par les deux lèvres et à l’intérieur
de laquelle pénètrent quatre demi-gouttières associées deux par deux et dont la
juxtaposition forme un tube interne, un suçoir plus étroit et plus long. C’est
ce suçoir que l’insecte enfonce dans la peau et qui lui sert à aspirer le sang.
Les Pédiculidés renferment trois genres : Hematopinus,
qui vit sur les mammifères domestiques, notamment le chien, Pediculus et
Phtirius, qui parasitent l’homme. On a trouvé des Hematopinus
chez tous les mammifères, sauf sur le mouton, le chat et le cobaye.
La deuxième famille constitue les Ricinidés, ricins ou
mallophages, dont la bouche est placée non plus à l’extrémité antérieure de la
tête, mais à sa partie inférieure ; elle est organisée non pour sucer,
mais pour broyer, et comporte à cet effet des mâchoires et des mandibules.
Cette disposition différente se traduit par l’aspect de la tête, qui est
pointue et fine chez les suceurs, subquadrangulaire et puissante chez les
broyeurs.
Les Ricinidés comportent dix genres, deux, qui nous
intéressent plus spécialement ici, Trichodectes et Cyropus,
vivant sur les mammifères domestiques, les huit autres parasitant les
oiseaux ; l’énumération est sans intérêt. Le trichodecte ne s’observe ni
sur le porc ni sur le lapin, mais est fréquent chez le chien. Le girope est
spécial au cobaye ; dès que celui-ci est mort, les giropes se montrent
nombreux à la surface des poils.
Les trichodectes ne sucent pas le sang de leur hôte. Leur
appareil masticateur leur permet de se nourrir de produits épidermiques, de
débris de poils. Mais leur contact, leurs mouvements, leurs tiraillements sur
les brins du duvet chatouillent désagréablement l’animal, qui reçoit même de
petites morsures ; la peau peut en être irritée, et ses productions
épidermiques augmentées la rendent plus sale.
La phtiriase a son origine dans la contagion de chien à
chien, de chat à chat. L’abondance et la longueur des poils y
prédisposent ; la malpropreté la favorise. Rares chez les chiens à poil
ras, les poux sont fréquents sur ceux à poil long et frisé. Bien que les deux
parasites puissent vivre ensemble, l’Hematopinus se rencontre surtout
sur les chiens de chasse à longs poils (épagneuls, griffons, barbets) et le trichodecte
chez les petits chiens d’appartement à toison tombante et frisée (petits
épagneuls, havanais). Les jeunes chats débilités par la gale sont souvent
porteurs de trichodectes.
Le trichodecte est l’hôte intermédiaire — conjointement
avec la puce — du dipylidion, ténia commun à l’homme, surtout aux enfants,
et aux chiens. Le pou ingère les œufs de ce ténia, qui sont disséminés dans le
pelage de la région anale, de ces œufs sort un embryon qui se fixe dans le
corps du trichodecte et s’y enkyste. Lorsque le pou est ingéré par le chien,
les sucs digestifs détruisent l’insecte, sauf le kyste qui résiste, s’ouvre
bientôt et donnera un jeune dipylidion. La lutte contre les vers plats du chien
nécessite donc, conjointement à l’administration d’anthelminthiques,
l’épouillage systématique. En outre, cette transmission du dipylidion par le
pou explique comment un chien peut avoir le ténia, alors qu’il n’a jamais mangé
de viande. On n’oubliera pas que les trichodectes peuvent d’aventure tomber
dans les aliments de l’homme, qui s’infecte ainsi dans les mêmes conditions que
le chien : on se gardera donc de laisser des enfants jouer avec des
animaux porteurs de poux.
En général, les chiens pouilleux paraissent peu incommodés
par leurs nombreux parasites. Chez les sujets nerveux, les démangeaisons sont
parfois assez vives pour amener, par les grattages et les morsures, des
excoriations, des plaies, l’inflammation de la peau, une sorte d’eczéma avec
chute des poils, des croûtes, etc.
La phtiriase se traduit chez le chiot par une abondante
desquamation à grandes lamelles, fréquemment aussi par de l’impétigo consécutif
aux inoculations de microbes provoquées par le grattage. On a cité également
des exemples de sujets dont l’infestation massive avait entraîné l’amaigrissement
et une cachexie mortelle.
On reconnaît facilement qu’un chien est atteint de poux à
l’examen des dépilations qui permettent vite d’apercevoir à l’œil nu les
parasites ou leurs œufs, tant ils sont volumineux et abondants. L’Hematopinus
est ardoisé pendant que le trichodecte, généralement plus petit, a la couleur
fauve clair, havane.
Le pronostic de la phtiriase est peu grave, quoique
l’affection soit contagieuse, épizootique, et qu’elle entraîne un
amaigrissement progressif, pouvant même aller, mais exceptionnellement, jusqu’à
la mort.
La propreté parfaite est la vraie prophylaxie de la
phtiriase, et elle supprime vite les parasites que la contagion aurait pu
donner. Celle-ci résulte, le plus souvent, de l’introduction dans un chenil
sain d’un jeune chien provenant d’un élevage infesté par les poux. D’où
l’indication d’isoler (quarantaine) pendant quelque temps tout sujet
nouvellement acheté jusqu’à ce qu’on soit fixé sur son état sanitaire.
Le traitement comporte plusieurs indications, notamment l’isolement
des malades pour éviter la contagion. La tonte facilitera beaucoup l’action
médicamenteuse, surtout si elle est suivie d’un bon savonnage tiède. Quant aux
parasiticides qu’on peut employer, ils sont nombreux ; en voici
quelques-uns des plus efficaces.
Insuffler dans les poils légèrement mouillés une poudre
insecticide (staphisaigre, pyrèthre), ou faire des lotions soit avec une
décoction de ces plantes (30 à 50 grammes par litre d’eau), soit par une
décoction de tabac à 3 p. 100. On ne doit pas traiter à la fois toute la
surface du corps, il pourrait s’ensuivre un empoisonnement par absorption des
alcaloïdes du tabac.
Les solutions de crésyl, créoline, lysol, à 2 p. 100,
sont particulièrement efficaces sous forme de bains ; elles sont d’un
emploi facile et peu coûteux.
Pour les chiens d’appartement, il convient d’éviter les
préparations grasses, et toutes celles qui sont susceptibles de salir les
meubles. On leur préférera les bains fréquents, les lavages à l’eau créolinée,
au savon phéniqué ; on fera un usage régulier de la brosse et du peigne.
Pour le chat, qui craint l’eau, employer les poudres insecticides.
Il est évident que des mesures convenables de désinfection
doivent être appliquées aux loges des chiens, aux chenils. On emploiera l’eau
bouillante, l’eau de chaux ou simplement l’eau crésylée à 5 p. 100. La
litière sera brûlée.
MOREL,
Médecin vétérinaire.
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