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Les engrais organiques

La plante, comme tout être vivant, a besoin de divers éléments pour assurer la bonne constitution de ses organes et entretenir son activité vitale. Or le plus grand nombre de ces principes sont puisés par elle dans le sol, d'où la nécessité, pour obtenir une bonne production, de mettre ce dernier en bon état de fertilité, c'est-à-dire à même de fournir aux cultures faites à sa surface des principes fertilisants assimilables, en quantité suffisante.

Pour atteindre à ce résultat, le jardinier, comme le cultivateur, doit avoir recours à des apports d'engrais qui sont loin d'agir de façon identique. C'est ainsi que les engrais organiques, dont nous nous occuperons spécialement aujourd'hui, ont des effets qui ne se font sentir sur la végétation qu'après leur décomposition dans le sol. Il résulte de ce fait que la rapidité de leur action fertilisante dépend de la promptitude avec laquelle ils se décomposent. Mais celle-ci n'est pas la même pour tous car elle est appelée à varier non seulement avec leur nature, mais encore avec la constitution du sol. En ce qui concerne le sol, c'est lorsqu'il est calcaire et en même temps perméable que les engrais organiques s'y décomposent le plus vite. S'il est argileux, compact, leur décomposition y est très lente, la pénétration de l'air étant difficile dans un tel milieu.

Aussi, en général, seul parmi les engrais d'origine animale, le fumier peut être employé avec avantage en la circonstance. Ses effets sont multiples : i1 soulève la terre, la divise et en augmente par conséquent la perméabilité, tout en y laissant beaucoup d'humus, ce qui l'améliore sensiblement.

Là où il y a manque de calcaire, surtout si la terre est acide, comme c'est le cas pour les terres tourbeuses de bruyères, etc., les engrais organiques sont d'une efficacité très relative.

La rapidité plus ou moins grande avec laquelle les engrais organiques se décomposent dans le sol dépend, en outre, de leur nature et de leur constitution.

Ainsi, le sang desséché, les râpures de cornes se décomposent rapidement, la laine plus lentement et les débris de cuir plus lentement encore. L'état de pulvérulence sous lequel ils se présentent influe également sur la rapidité de décomposition. Plus les éléments constitutifs sont fins, plus leur action est prompte.

Dans bien des cas, par suite du temps plus ou moins long que nécessite la transformation de leur azote en nitrate, on a moins à redouter la disparition de ce principe par lavage qu'avec les engrais minéraux comme le sulfate d'ammoniaque, et plus particulièrement le nitrate de soude.

C'est pour ce motif que l'on peut incorporer les engrais organiques au sol en toute saison, même avant l'hiver, l'action des pluies étant sans effet, leur azote étant insoluble. Il est d'ailleurs préférable de les enfouir en automne. Pendant la période hivernale. Ils subissent une première altération qui en rend la décomposition plus prompte au printemps suivant.

D'une façon générale, on peut dire que plus la décomposition d'un engrais est lente à s'effectuer, plus l’utilisation de l'azote qu'il renferme exerce son action sur la végétation. Mais la lenteur de cette utilisation fait que les engrais organiques ne conviennent pas aux plantes exigeantes en azote et de croissance rapide. En principe, ils doivent être réservés pour la culture des végétaux à développement lent, à exigence modérée en azote, ou à ceux qui redoutent une alimentation azotée trop copieuse.

Toutefois, malgré leur inégale action, les engrais organiques ne sauraient être délaissés, car ils permettent de créer une réserve d'azote dans le sol, sans avoir à redouter des pertes excessives, et dispensent ainsi des applications annuelles et répétées auxquelles le cultivateur est astreint avec les engrais azotés promptement assimilables.

Ils ont, d'autre part, le précieux avantage d'apporter au sol l'humus, dont la bienfaisante influence sur les propriétés physiques du sol contribue dans une large mesure à assurer sa fertilité et dont la disparition aurait comme conséquence d'engendrer la stérilité.

A. GOUMY,

Ingénieur horticole.

Le Chasseur Français N°635 Janvier 1950 Page 33