L'écossais est jeune et charmant ; sa vogue est loin de
s'éteindre et nous pouvons à coup sûr prédire que les collections de printemps
en seront largement pourvues. Il grossit, objecterez-vous ! Pas quand il
est judicieusement choisi et employé, pas quand les tons et les carreaux sont
très fondus, très discrets ; pas quand il est placé en biais. En lainage,
les « clans » de Rodier, de Dumas et Maury, de Gérondeau, de Leleu,
inspirés des vrais clans d’Écosse, ou les écossais de deux tons, très rompus,
très éteints, sont d'une grande sobriété ; il en est de même de ceux des
si belles cotonnades de Pierre Besson et de ceux de faille ou de taffetas
destinés aux robes du soir, parfois rehaussées de lamé or. Il en est de fort
beaux Chez Ducharne, Bianchini, Staron ; chez Solabelle, on peut en noter
un absolument admirable dont les tons de base sont mordorés, bleu violacé, vert
éteint et bois de rose, tout miroitants du reflet d'une trame d'or. Je ne sais
rien de plus juvénile qu'une simple robe écossaise ornée d'un rien de blanc au
col, aux manches ; de plus classiquement élégant qu'un manteau uni à
envers écossais avec quelques rappels à l'endroit, en cravate, en parements ;
l'appoint du béret ou du bonnichon fait dans le même tissu est charmant.
L'écossais fait encore de très belles garnitures ; sur
une simple robe unie, on peut ajouter pour la modifier, une large écharpe de
hanches drapée et nouée, retombant en pans effrangés ; une écharpe partant
du cou pour aboutir à l'ourlet, un enroulement asymétrique que discipline la
ceinture ; pour la réchauffer, un châle enveloppant ourlé de franges à la
façon des anciens plaids ; ces garnitures peuvent être amovibles. Rien
n'est agréable comme une jupe écossaise en biais plissée « soleil »,
ou à plis repassés ; on la portera à volonté avec la jaquette ou le
blouson tailleur uni, avec le sweater de jersey foncé de la nuance du ton
dominant ou préféré.
L'écossais a une vogue telle que les bottiers eux-mêmes s'en
sont emparés, ils ont fait en tissu écossais la tige de leurs souliers montants
ou encore recréent l'écossais d'une robe en l'imitant sur le cuir par un
travail de piqûres de tous les tons du tissu. Élyse et Honoré, Violette Cornille
l'ont marié aux belles peausseries employées pour l'exécution de leurs sacs « trotteurs »
ou « sport ». Simone Montel en a fait la tenue de voyage de son
extraordinaire sac « Protée», celui-ci étant conçu de telle façon que, par
un jeu de petites vis dorées, il soit possible pour un seul sac de box ou de toute
autre peau de prévoir deux, trois, quatre housses différentes assorties aux
toilettes et dont l'adaptation est si subtile qu'il est absolument impossible
de la déceler ! Le grand manteau « sport » ample, en écossais
ton sur ton, est on ne peut plus élégant sur le tailleur harmonieusement
assorti ; quant aux paletots courts ou 3/4 à godets et très plongeants,
aux larges manches kimono, qu'on jette sur une petite robe à la demi-saison,
ils peuvent, étant une fantaisie, être de tons assez violents (il y a des
écossais perroquet de toute beauté chez nos grands lainiers, toujours employés
en plein biais, bien entendu).
G.-P. DE ROUVILLE.
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