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La carte des économiquement faibles

La carte des économiquement faibles a été instituée par la loi du 2 août 1949, dont un décret en date du 28 novembre 1949 a réglé les détails d'application.

Quels en sont les bénéficiaires ?

— Cette loi prévoit deux catégories de bénéficiaires de la carte.

La première catégorie comprend les personnes atteintes d'une infirmité ou d'une maladie reconnue incurable les rendant incapables de subvenir par leur travail, aux nécessités de l'existence et bénéficiaires à ce titre de la loi du 14 juillet 1905 sur l'assistance aux vieillards, infirmes et incurables.

La deuxième catégorie englobe les personnes justifiant d'une condition d'âge et prouvant que leurs ressources ne dépassent pas un certain chiffre.

En principe, les postulants doivent avoir plus de soixante-cinq ans. Cette limite d'âge est abaissée à soixante ans pour les personnes déclarées inaptes au travail par une commission régionale.

Le montant des revenus des intéressés ne doit pas excéder 75.000 francs par an pour une personne seule (veuf, célibataire, divorcé), 100.000 francs pour un ménage.

La loi en question précise en outre que, pour l'appréciation des ressources des postulants à la carte, il sera tenu compte de la valeur des biens mobiliers et immobiliers des intéressés, ainsi que des donations qu'ils auraient pu faire.

Les personnes dont les parents, tenus à l'obligation alimentaire, sont en mesure d'assurer l'entretien ne pourront prétendre à l'obtention de la carte. La loi précise, à ce sujet qu'il devra être justifié qu'aucune des personnes tenues vis-à-vis des intéressés à l'obligation alimentaire prévue par les articles 205 et suivants du Code civil n'est en mesure de participer substantiellement a leur entretien.

La question s'est également posée de savoir si les vieux travailleurs salariés peuvent prétendre à l'avantage de la carte.

Il a été répondu par l'affirmative, sous réserve naturellement qu'ils remplissent les conditions susvisées. Le rapporteur de la Commission de la Famille à l'Assemblée nationale l'a déclaré en termes fort nets : « Nous n'entendons pas les exclure de son champ d'application. ».

Il faut la demander.

— Bien entendu, les personnes désirant obtenir la carte des économiquement faibles doivent la demander.

Les vieillards et les personnes atteintes d'une infirmité ou d'une maladie incurable, bénéficiaires des dispositions de la loi du 14 juillet 1905 sur l'assistance aux vieillards, infirmes et incurables, recevront, sur leur demande et sans autre formalité, ladite carte.

Les autres personnes doivent déposer à la mairie de leur résidence une demande conforme au modèle arrêté par le ministre de la Santé publique et contenant tous renseignements propres à établir leur identité et leur nationalité.

Les formules imprimées sur lesquelles sont établies ces demandes sont mises à la disposition des intéressés dans les mairies.

À l'appui de la demande, les postulants doivent joindre les pièces suivantes :

    1° Un extrait du rôle des contributions directes (ou un certificat de non-imposition) et toutes pièces de nature à faire connaître la valeur des biens, meubles et immeubles qu'elles possèdent ou dont elles auraient fait donation, et le montant de leurs ressources ;

    2° Un extrait de naissance et, s'il y a lieu, un certificat constatant la naturalisation ou l'acquisition de la nationalité française ;

    3° Un certificat de domicile datant de moins de trois mois ;

    4° Un certificat médical, s'il y a lieu, constatant l'inaptitude au travail pour les personnes âgées de plus de soixante ans et de moins de soixante-cinq.

Le cas échéant, le postulant doit indiquer les noms et adresses des membres de la famille tenus envers lui à l'obligation alimentaire, ainsi que tous renseignements sur la situation de famille, la profession et les ressources de ceux-ci.

Par qui est-elle délivrée ?

— La demande de carte est examinée par la Commission cantonale d'assistance, qui statue sur son admission ou son rejet.

La décision de cette Commission cantonale peut faire l'objet d'un appel devant la Commission départementale d'assistance.

À son tour, la décision de la Commission départementale peut être l'objet d'un pourvoi devant la Commission centrale d'assistance à Paris.

La carte est accordée, en exécution de la décision de la Commission d'assistance, par le préfet, aux personnes de nationalité française résidant dans le département.

La carte est conforme au modèle établi par le ministre de la Santé publique.

Il est tenu, dans chaque préfecture, un registre spécial où sont inscrits les noms des attributaires avec, pour chacun d'eux, un numéro d'ordre reproduit sur la carte délivrée.

Avantages de la carte.

Assistance médicale gratuite.

— Tout titulaire de la carte sociale des économiquement faibles est inscrit de droit sur la liste de l'assurance médicale gratuite par l'autorité compétente lorsqu'il en fait la demande.

Cette demande doit indiquer les avantages dont il bénéficie déjà au titre d'une législation particulière en matière de soins gratuits.

Le maire doit certifier, au bas de la demande, que le requérant est bien titulaire de la carte sociale des économiquement faibles portant tel numéro.

Assistance judiciaire.

— Le titulaire de la carte des économiquement faibles qui demande le bénéfice de l'assistance judiciaire est dispensé de fournir les pièces prévues à l'article 10 de la loi du 10 juillet 1901. La possession de cette carte vaut constatation de l'indigence devant le bureau d'assistance judiciaire.

Le maire doit certifier, au bas de la demande, que le requérant est bien titulaire de la carte des économiquement faibles portant tel numéro.

Voyage chemin de fer.

— Tout titulaire de la carte en question a droit à un voyage aller et retour par an sur les réseaux de la Société nationale des Chemins de Fer français, quelle que soit la distance parcourue, au tarif des congés payés.

Ce tarif fixe le taux de réduction, les délais de validité et les conditions de délivrance et d'utilisation des billets à prix réduit.

Autres avantages.

— L'article 3 de la loi du 2 août 1949 prévoit aussi que, lorsqu'un texte législatif ou réglementaire instituera des mesures spéciales pour les économiquement faibles, ces mesures bénéficieront ipso facto aux titulaires de la carte.

En outre, au cours des débats parlementaires, il a été précisé à plusieurs reprises que la législation a entendu attacher ces droits nouveaux à la possession de la carte sociale des économiquement faibles, sans supprimer pour cela ceux qui existent déjà.

Il est bien entendu, a déclaré un parlementaire, que l'attribution de cette carte vaut constatation de la situation juridique des économiquement faibles pour toutes les mesures dont ils bénéficient à l'heure actuelle et qui ne sont pas comprises dans l'énumération de l'article 3 de la.loi, notamment, l'exonération du paiement de la moitié de la taxe sur les postes récepteurs de T. S. F. ; l'octroi, par arrêtés préfectoraux, d'allocations de gaz et d'électricité, dans certains départements ; enfin, et surtout, les exonérations des majorations de loyers prévues par l'article 40 de la loi du 1er septembre 1948 sur les loyers d'habitation.

Remplacement et retrait de la carte.

— En cas de changement de résidence dans un autre département, une nouvelle carte doit être demandée par le titulaire au préfet de ce département dans les mêmes formes et conditions que celles énumérées ci-dessus.

Lorsqu'une carte est perdue ou détériorée, la demande de remplacement doit être adressée au préfet du département qui a délivré la carte.

Dans le cas où la situation du titulaire de la carte ne justifie plus le bénéfice de celle-ci, la carte est retirée par décision de la Commission cantonale d'assistance, qui peut être saisie par le maire ou par le préfet, soit spontanément, soit sur la demande de tout habitant ou contribuable de la commune.

Si le titulaire de la carte vient à décéder, celle-ci doit être remise dans un délai de huit jours à la mairie de sa résidence. La mairie la fait parvenir à la préfecture qui l'a établie.

Présentation de la carte.

— Naturellement les intéressés doivent produire la carte dont ils sont titulaires chaque fois qu'ils veulent se prévaloir des avantages qu'elle confère.

Cette obligation est ainsi formulée par la loi : « La carte sociale des économiquement faibles sera exigée toutes les fois que son détenteur invoquera le bénéfice des droits et avantages qui y sont attachés. »

L. CROUZATIER.

Le Chasseur Français N°636 Février 1950 Page 111