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Le Pékinois

L'épagneul pékinois fit son apparition en Europe à la fin du XIXe siècle ; tout à fait inconnu jusqu'à cette époque, il eut une ascension extraordinaire et fut par excellence le chien des élégantes.

Son origine remonte avant l'ère chrétienne ; à cette époque reculée, plusieurs empereurs chinois efféminés s'intéressèrent à de petits chiens à museau court et à pattes courtes venus du Thibet.

La superstition chinoise s'empara de ces petits chiens et les associa à des dieux à face de lion. Ils prirent une place prépondérante : au palais impérial, ils étaient sacrés et assistaient aux cérémonies massés, auprès du trône, avant les princes du sang habillés de soie jaune. L'imagination chinoise vit, par exemple, une signification dans chaque couleur : telle robe apportait le bonheur, telle autre amenait la prospérité, telle autre favorisait la naissance des fils, etc.

Les Chinois furent de tous temps de grands amateurs de chiens ; ils en eurent de toutes tailles, pour diverses utilisations : la chasse, la garde, le traîneau, l'alimentation. Mais les petits chiens du palais impérial de Pékin eurent une telle faveur que la population de Corée et de Chine, presque uniquement agricole, s'efforça de produire de petits chiens rares à fourrure abondante, à pattes torses, à port de tête noble et fier, à crâne rond et front bas, ressemblant au chien-lion, symbole de Bouddha.

Son goût des bizarreries, joint à la nécessité de produire un animal rare en faveur à la cour, avec lequel on pouvait obtenir des échanges précieux : honneurs, argent, fit que le peuple chinois obtint par croisement, avec sa patience d'Oriental bien connue, le majestueux petit chien de Pékin, symbole de la divinité, qui « avait du lion le poitrail large et les hanches minces, la crinière dorée qui descendait en grandes vagues jusqu'à ses pattes, la tête qu'il portait haute avec un orgueil tout impérial, et le gracieux panache de sa queue flottant comme une bannière ».

Les plus petits furent les plus appréciés, afin de pouvoir les glisser dans les manches des dames de la cour.

La cour impériale chinoise encouragea l'élevage de ce petit chien, les eunuques du palais étaient spécialement chargés de produire des chiens de dames à taches symétriques, à poils longs, de couleurs les plus diverses, pouvant aller avec les coloris des toilettes de la garde-robe impériale.

Après la prise de Pékin par les Anglais en 1860, des pékinois du palais impérial furent amenés en Angleterre au nombre de cinq, et l'un d'eux, Looty, fut offert à la reine Victoria.

Le pékinois a évolué depuis son importation, les méthodes d'élevage anglaises, différentes de celles du pays d'origine, l'ont transformé ; de plus, les Chinois attachaient de l'importance à d'autres points que les Anglais : les taches de couleur et les marques, qui avaient leur signification au point de vue légendaire, n'en ont plus ; par contre, les aplombs ont été rectifiés, et la denture améliorée.

Voici le standard rédigé en Angleterre par le Pekingese Club.

Tête : massive, crâne large et ample entre les oreilles (pas en forme de dôme), large entre les yeux.

Nez : noir, large, très court et plat.

Yeux : grands, foncés, proéminents, ronds et brillants.

Cassure (stop) : très accentuée.

Oreilles : en forme de cœur, pas attachées trop haut, la conque pas assez longue pour arriver jusqu'en dessous du museau, jamais dressées, mais plutôt retombantes avec de longues franges.

Museau : très court et large, ridé, porté horizontal, pas pointu.

Tronc : large devant ; large poitrine, mais après diminuant de largeur, semblable à celle du lion, le tronc pas trop long.

Pattes : antérieures courtes, fortes, arquées aux coudes ; les postérieures plus légères, mais solides et bien formées.

Pieds : plats, ronds, bien dressés sur les doigts et non sur les poignets.

Pelage : long, épais, sous-poil droit et plat ni ondulé, ni bouclé, assez hirsute mais doux ; franges longues aux cuisses, aux pattes, à la queue ; aux doigts, longues et abondantes.

Crinière : abondante, s'étendant jusqu'en dessous des épaules, formant jabot ou collier sur le devant de l'encolure.

Queue : bouclée et portée courbée loin au-dessus du rein, longue à poils abondants et à franges droites.

Taille : étant un chien de dame, plus la taille est petite mieux cela vaut, pourvu que les points ne soient pas sacrifiés. Deux catégories : plus de 4 kilogrammes, moins de 4 kilogrammes.

Couleurs : toutes sont admises : rouge, fauve, noir, noir et feu, zibeline, bringé, blanc et particolore ; sont désirables : les masques noirs, les lunettes (cercles noirs) autour des yeux et des raies vers les oreilles.

Allures : libres, décidées et relevées ; le geste de croiser les pieds ou de faucher pendant la marche n'enlève pas de points.

Après avoir connu une vogue étonnante, le pékinois fut un peu délaissé pour des chiens plus sportifs. Cependant, aux dernières expositions, l'on vit des classes de très beaux chiens. À Paris, ce fut une Anglaise, Mrs. Cyntha Ashton Cross, qui les départagea, et le C. A. C. I. B. fut attribué à « Wa-Wa du Méridien », d'un élevage français appartenant à Mme Savigny. Quarante-quatre pékinois étaient inscrits à la salle Wagram pour l'exposition organisée par la S. F. A. C. A. Onze champions, pour la plupart d'origine française, dont « Zalisman de Magwald », à Mme de Vilhena.

Je terminerai par quelques conseils : veiller à ce que la fourrure des pékinois soit propre, sans parasites ; pour cela, ne pas les laver, mais les saupoudrer de poudre antiparasitaire, ou de bain sec ; bien les brosser avec une brosse en crin sur fond en caoutchouc ; brosser le poil en remontant : la crinière du pékinois ne doit pas être plate, mais gonflante autour de la tête, comme celle du lion.

Bien entretenir les yeux, qui, ressortis, sont très fragiles ; bien les essuyer ou les laver avec une infusion de camomille ou de thé. Si l'œil pleure, après le lavage mettre une goutte de collyre spécial.

Veiller également à ce que la pointe des ongles ne soit pas piquante, surtout pour les chiots, qui, en jouant, risquent de se faire mal aux yeux. Couper la partie de l'ongle après l'endroit où en transparence vous voyez la chair. S'il arrive de couper trop loin et de faire saigner, cautériser tout de suite avec un peu de teinture d'iode.

Ne pas promener sur les trottoirs des villes les chiots trop jeunes ; par suite de leur conformation (leurs pattes courtes), les pékinois absorbent facilement les poussières et les microbes, leur nez se trouvant très près de terre, et c'est la porte ouverte à bien des maladies.

A. PERRON.

Le Chasseur Français N°637 Mars 1950 Page 147