Près de cent quarante nations viennent de rendre hommage à l’Union
postale universelle, en émettant des séries de timbres-poste, souvent
remarquables, à l'occasion du soixante-quinzième anniversaire de la création de
cette importante organisation internationale.
S'associant à cet hommage, la France a commémoré l'événement
par la mise en vente de trois figurines sans surtaxe, au même type, gravées par
Cottet d'après un dessin de Spitz et tirées sur grand format. Les valeurs sont les
suivantes : 5 francs, gris vert ; 16 francs, carmin ; 25 francs,
outremer.
La composition de la vignette fait penser à un ensemble de
sculpture. L'arrangement en est harmonieux et la réalisation de belle facture.
On y voit les principales familles ethniques du monde se tenant fraternellement
par la main, sous l'égide de l’U. P. U., personnifiée par une figure
féminine debout, étendant les bras dans un geste de concorde.
C'est toutefois avec un certain retard — ainsi
d'ailleurs que pour de telles commémorations il paraît être de règle chez nous —
que cette série de figurines a vu le jour le 7 novembre dernier, puisque
le premier Congrès de Berne s'ouvrit le 15 septembre 1874.
L'exemple de la Grande-Bretagne qui, en adoptant, en 1839,
le projet de réforme postale présenté au Parlement par le Postmaster Sir
Rowland Hill, créait, à l'intérieur, une taxe unique proportionnelle seulement
au poids de l'objet de correspondance — un penny pour l'affranchissement
d'une lettre ordinaire — avait été suivi par bien des États. Après la
Suisse, le Brésil, la Trinité, les États-Unis et l'Ile Maurice ; la
France, à son tour, en 1848, faisait sienne semblable réforme. Le montant de la
taxe était fixé à 20 centimes pour toute lettre dont le poids n'excédait pas 7
grammes et demi, dans toute l'étendue du territoire, de la Corse et de
l'Algérie.
Mais, jusqu'au dernier quart du siècle dernier, les taxes
postales, dans le trafic international, variaient, comme par le passé, suivant
les pays et suivant aussi les pays destinataires.
Il existait bien, relativement à ces échanges de
correspondances, des traités particuliers appelés Conventions postales,
et c'est par de tels traités que notre pays se trouvait lié avec seize nations
étrangères. Cependant, lorsqu'il s'agissait de pays non engagés par les Conventions
postales, les lettres, journaux et paquets ne pouvaient être affranchis
jusqu'à destination et, s’il devait y avoir transport sur mer, devaient être
acheminés par des paquebots d'autres pays.
Le montant du port d'une lettre en transit comprenait
ordinairement la taxe pour l'intérieur du pays d'origine, la même taxe du pays
destinataire, celles des pays de transit et, en cas de transport par voie
maritime, le prix de ce transport. Ce qui rendait parfois très compliqué le
calcul des frais à payer au départ.
À titre d'exemple, voici, en ce qui concerne la France, les
taxes par 10 grammes, auxquelles étaient soumises les correspondances à
destination de quelques pays : Luxembourg : 25 centimes ; Suisse
30 centimes ; Allemagne : 40 centimes ; Danemark : 50 centimes ;
Autriche : 60 centimes ; Norvège : 70 centimes ; Brésil :
80 centimes.
En 1863, sur l'initiative des États-Unis, une Commission
internationale, à laquelle participèrent quinze États, se réunit à Paris dans le
but d'étudier les moyens d'obtenir une meilleure organisation du service postal
international et d'arriver à l'établissement d'une taxe unique. Mais les
discussions n'aboutirent pas à des résultats pratiques.
Le 15 septembre 1874, un congrès rassemblait à Berne les
représentants de vingt nations européennes, des États-Unis et de l'Égypte et,
le 9 octobre suivant, un traité de grande importance était conclu, qui
établissait des taxes internationales communes. Sous la désignation d'Union
générale des postes, ces nations devaient former « un seul territoire
postal pour l'échange réciproque des correspondances entre leurs bureaux de
poste ». L'unité de la taxe était en partie réalisée. Une certaine
élasticité demeurait pourtant dans l'application des tarifs, ce qui permettait
de les adapter aux systèmes monétaires des divers pays.
La France faisait partie des nations contractantes. Elle
n'entra toutefois définitivement qu'à dater du 1er janvier 1876
dans l'U. G. P., où, à leur tour, nos colonies furent admises le 17 janvier
de la même année.
Si, à Berne, se tint le premier congrès constituant, ce
n'est qu'au congrès qui s'ouvrit à Paris le 1er mai 1878, et où
siégèrent les plénipotentiaires de trente-trois États, que s'élaborèrent les
premières lois organiques de l'Union et que, dans la correspondance internationale,
la taxe des lettres fut, à cette époque, uniformément fixée à 25 centimes.
L'Union prit désormais l'appellation nouvelle d’Union
postale universelle, et son bureau fut établi dans la capitale helvétique.
Depuis sa création, douze congrès et plusieurs conférences, organisés dans
diverses capitales, ont grandement contribué au perfectionnement des relations
postales internationales. Elle groupe aujourd'hui quatre- vingt-dix pays. En
1900, un monument commémoratif, dû au sculpteur René de Saint-Marceaux, était
élevé à Berne.
Retenons, en terminant, ces paroles prononcées par notre
directeur général des Postes, à l'occasion des fêtes du jubilé, qui eurent lieu
le 27 mai dernier :
«L'Union postale universelle doit demeurer la plus
libérale des organisations internationales, une institution démocratique au
sens complet du mot, un instrument de progrès au service de l'humanité, un lien
fraternel entre les peuples, pour qu'enfin la paix soit aussi universelle ».
DRAIM.
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