Accueil  > Années 1950  > N°641 Juillet 1950  > Page 419 Tous droits réservés

Les engrais organiques

Pour avoir de belles récoltes.

— Il n'est pas possible dans les jardins, qu'ils appartiennent à des maraîchers ou à des particuliers, d'obtenir des rendements légumiers satisfaisants, sans apports importants de matières organiques en voie de décomposition. Dans tous les cas, on fera bien de ne considérer les produits chimiques que comme des engrais de complément.

Cela tient à ce que les engrais purement minéralisés ne contiennent pas un atome d'humus, cet élément essentiel, dont on ne connaît pas encore très bien le rôle biologique qui réglemente la vie des plantes. En réalité, l'humus seul a plus d'importance que tous les principes dits essentiels réunis : l'azote, l'acide phosphorique, la potasse et la chaux.

Qu'est-ce que l'humus ?

— L'humus est un résidu produit par la décomposition de matières organiques diverses, sous l'action des microorganismes de la putréfaction. C'est une matière noire qui contient, sous une forme progressivement assimilable, tous les principes minéraux nécessaires à la constitution des tissus végétaux.

Les agronomes estiment que, avec une teneur de 8 p. 100 en humus, une terre est favorable pour la grande culture. Mais, pour les besoins de la production intensive des légumes, la proportion d'humus ne doit pas être inférieure à 12 p. 100, 15p. 100 et plus, comme dans les marais, réputés pour leur grande fertilité.

Dans les terres bien fournies, l'humus seul suffit, avec les principes qu'il enrobe, aux besoins des plantes cultivées, d'autant plus qu'il est une source généreuse de carbone, que les végétaux emmagasinent en quantités considérables dans leurs tissus, sous forme d'amidon, de fécule, de sucre et de cellulose. La respiration chlorophyllienne, par suite de son rejet d'acide carbonique la nuit, ne suffirait pas pour élaborer toutes ces substances de réserve.

Quoi qu'il en soit, les terres peu fournies d'humus sont toujours d'un faible rapport, même avec le concours des engrais chimiques, parce que leurs propriétés physiques sont défectueuses, tandis que l'humus donne du corps aux terres sableuses, en remplaçant avantageusement l'argile, et il combat la compacité des terres fortes, ce qui rend plus facile l'exécution des façons culturales. En outre, comme il possède l'heureuse propriété de retenir beaucoup d'eau dans sa masse spongieuse, sa présence dans le sol atténue en une certaine mesure les fâcheux effets des sécheresses prolongées.

Si l'on tient compte que l'humus favorise la perméabilité et l'aération de la couche arable, et qu'il absorbe les calories solaires en augmentant la précocité des terres qui en sont abondamment pourvues, on comprend qu'il soit classé comme étant l'élément primordial indispensable, seul capable de maintenir la productivité des jardins.

Les sources d'humus.

— C'est généralement au fumier que l'on a recours pour maintenir dans les potagers le stock d'humus nécessaire à l'obtention des belles récoltes, et la dose à appliquer tous les ans ne devrait pas être inférieure à 500 kilogrammes à l'are, un peu plus ou moins suivant leur richesse en principes essentiels, laquelle est assez variable, ainsi qu'on peut s'en rendre compte à l'examen du tableau ci-après qui indique la composition moyenne des fumiers faits, c'est-à-dire transformés en « beurre noir », sous l'action de la fermentation humique.

Fumiers. Eau. Humus. Azote. Acide phos. Potasse. Chaux.
.......... en kilogrammes ..........
Cheval. 713 185 5,8 2,8 5,3 2,1
Vache. 775 145 3,4 1,6 4,0 3,1
Mouton. 646 225 8,3 2,3 6,7 3,3
Porc. 724 175 4,5 1,9 6,0 0,8
Mixte. 760 150 4,5 2,5 5,0 3,0

De nombreux correspondants se plaignent de la pénurie actuelle des fumiers d'étable. Nous allons rechercher les sources d'engrais organiques auxquelles ils s'adresseront pour éviter la disparition progressive de l'humus dans leurs jardins.

En premier lieu, il y a les composts que l'on confectionne en mettant en tas les boues de route, les curures de fossés, les ordures ménagères, le fumier des lapins, la colombine, et la poulaitte, les cendres de bois et de houille tamisées, les résidus de la cave et des silos, les viscères d'animaux, les fanes, les feuilles, les herbes, les marcs de pommes et de raisins, la sciure de bois, etc. Si on a soin de saupoudrer un peu de cyanamide sur les tas, et d'y maintenir la fraîcheur par des arrosages et en y déposant les eaux vannes, le compost sera bon à employer au bout de six mois environ.

Une autre source d'engrais organique est fournie par les boues de ville, dont la teneur en azote varie entre 3kg,800et 4kg,500 à la tonne, suivant qu'il s'agit de boues vertes ou de boues noires. Les premières peuvent être enfouies directement, après criblage, dans les terres calcaires. Partout ailleurs, il vaut mieux les faire fermenter au préalable.

On peut également recourir au sang et à la viande desséchés qui, dans leurs humus, contiennent entre 10 et 13 p. 100 d'azote organique, 1 à 3 p. 100 d'acide phosphorique et 0,5 à 1 p. 100 de potasse. La corne pulvérisée est encore plus riche, surtout en potasse, mais ses éléments essentiels ne sont assimilés que lentement. Les engrais de poisson se font remarquer par leur richesse en acide phosphorique, 10 p. 100 environ. Les tourteaux non comestibles et ceux ayant été traités par le sulfure de carbone sont également utilisables ; ils contiennent 5 à 7 p. 100 d'azote, 1 à 3 p. 100 d'acide phosphorique et 1 à 2 p. 100 de potasse dans leur humus.

Si on dispose de paille et de foins avariés, en les saupoudrant de cyanamide et en les humidifiant, ils se transforment en un fumier artificiel ayant une valeur fertilisante approchant celle du fumier d'étable, une fois transformées en « beurre noir ».

Un autre moyen d'enrichir une parcelle de potager appauvrie en humus, c'est d'y semer une plante herbacée, que l'on enfouira lorsqu'elle sera en pleine floraison, par exemple : vesce, seigle, colza, dans les terres fortes ; lupins, spergule, serradelle dans les terres légères ; moutarde blanche, navette dans les terres calcaires.

Adonis LÉGUME.

Le Chasseur Français N°641 Juillet 1950 Page 419