Rivières des Pyrénées

L'expérience acquise au cours des croisières dans le Jura et le Massif Central, mais surtout les progrès réalisés dans la technique de la pagaie permirent aux membres du Canoé-Club de France, vers 1927, d'affronter les rivières pyrénéennes, dont la classe générale des difficultés est plus élevée.

Nous commencerons par étudier les gaves et les nives du versant atlantique, tributaires de l'Adour. Ces cours d'eau ne coulent pas positivement en gorges, mais arrosent les profondes vallées du Béarn et du Pays basque, dont la réputation touristique est pleinement justifiée : villages propres et pittoresques, pâturages et forêts, accueil aimable des habitants, harmonie des teintes et douceur du paysage : tout contribue à classer ces vallées parmi les plus belles de France.

Si la route et souvent la voie ferrée suivent ces rivières, leur présence n'est pas une gêne pour le canoéiste. Au contraire, elles lui permettent de se rendre très rapidement d'un gave à un autre. La hauteur d'eau est généralement favorable jusqu'en été, et nulle part il n'est plus facile de consacrer ses vacances à descendre plusieurs rivières, d'autant plus qu'à l'attrait de la navigation s'ajoute la possibilité de nombreuses randonnées en montagne. La plus classique de ces excursions, considérée généralement comme la plus belle, vous conduira au cirque de Gavarnie.

La navigation sur les gaves et les nives présente les mêmes caractéristiques que sur bien des rivières du Massif Central : seuils et rapides rocheux plus ou moins longs et coupés de planiols, mais, dans l'ensemble, l'allure générale est plus violente que dans le Massif Central. La présence de la route et l'accès des rives facilitent la reconnaissance des plus fortes difficultés.

Si nous entreprenons la descente de tous les gaves, il est logique de commencer par le gave de Pau et nous embarquerons à Pierrefitte-Nestalas. Nous sommes ici entourés de sommets et le gave va couler jusqu'à Lourdes dans une plaine dominée par les montagnes pendant 20 kilomètres, puis traverser une gorge encaissée entre Lourdes et Bétharram ; ensuite c'est la plaine à nouveau, et les montagnes s'éloignent. Navigation de classes 3 et 4 de Pierrefitte à Nay (45 km,), classe 2 ensuite et navigation agréable jusqu'à Orthez.

La descente se termine généralement à Pau, après 66 kilomètres de navigation, d'où l'on rejoint directement Laruns, sur le gave d'Ossau. La distance qui sépare cette ville d'Oloron où le gave d'Ossau rencontre le gave d'Aspe et forme avec lui le gave d' Oloron, est de 42 kilomètres. Ce parcours s'effectue au fond d'une vallée étroite; les rapides sont nombreux (cl. 3 et 4), rocheux, séparés par de courts planiols. À la sortie d'Arudy, une partie de gorge infranchissable oblige à un chariotage de 6 kilomètres.

D'Oloron on gagne aisément Bedous, point d'embarquement sur le gave d'Aspe. Paysage et navigation sont sensiblement les mêmes que sur le gave d'Ossau, mais le parcours n'est que de 28 kilomètres pour revenir à Oloron et continuer sur le gave auquel cette ville donne son nom.

Le gave d'Oloron arrose une large vallée, les rives élevées contribuent à l'attrait du paysage. L'importance du débit d'eau permet d'effectuer la descente toute l'année et engendre des difficultés moins fortes que sur les gaves supérieurs. On rencontre ici des rapides à gros volume provoqués par des barres rocheuses, et les passes sont franches en général ; la classe de ces rapides ne dépasse pas 3. Il n'y a pas d'intérêt à poursuivre la croisière au delà de Sauveterre-de-Béarn (46 km.), d'où l'on peut gagner soit le gave de Mauléon, soit la Nive.

Le canoéiste qui descend ces rivières pendant ses vacances néglige généralement le gave de Mauléon, nommé aussi Saison. Sa vallée offre autant de charme que celles des gaves précédents, mais la navigation, de classes 2 et 3, est beaucoup moins attrayante, d'autant plus qu'il est rare de trouver ici des eaux suffisantes en été. Le gave de Mauléon peut être descendu depuis Licq-Atherrey jusqu'au confluent, sur une distance de 50 kilomètres.

La descente de la Nive complète heureusement la série des gaves. Même type de rivière, lit généralement plus rocheux, rapides manœuvriers séparés par des planiols nommés ici pools par les pêcheurs de truites et de saumons. Nous sommes au cœur du Pays basque et la vallée est fort belle. La descente classique de la Nive commence à Saint-Jean-Pied-de Port, et les difficultés de classes 3 et 4 se succèdent jusqu'à Cambo (35 km.). Il s'agit en réalité de la Grande Nive, formée par la réunion des Nives du Valcarlos et de Béhérobie, descendables chacune sur une dizaine de kilomètres, mais seulement au printemps. Plus bas, la Nive des Aldudes est faisable également à la même époque.

Les Pyrénées centrales offrent des rivières d'un aspect différent. Les proches montagnes sont plus élevées, les rives se resserrent parfois en gorges ; le lit a une pente accentuée et le débit est violent.

La Neste et son affluent la Neste d’Aure peuvent être descendues de Saint-Lary à la Garonne, sur une distance de 50 kilomètres (cl. 3).

Le Salat, pour une même distance, présente des difficultés un peu plus fortes dans la partie haute, de Seix à Saint-Lizier (cl. 4).

Sur la Garonne, la navigation est très sportive (cl. 4) entre le Pont-du-Roi et le confluent de la Pique (16 km.). C'est ensuite une intéressante rivière de classes 2 et 3 pendant 70 kilomètres, jusqu'au confluent du Salat.

D'Ax-les-Thermes à Foix, sur une distance de 45 kilomètres, l'Ariège est une difficile rivière de classe 4, probablement la plus dure des Pyrénées, et il convient d'éviter les gorges de Marcus, en aval de Tarascon. De Foix à Pamiers (23 km.), les difficultés n'excèdent pas la classe 3 et la croisière peut se poursuivre agréablement jusqu'à la Garonne. Après juillet, les eaux ne sont généralement pas suffisantes sur ces rivières.

Dans les Pyrénées orientales, l'Aude coule au fond de gorges très accidentées en amont de Quillan (cl. 2 à 4). La navigation reste intéressante pendant 60 kilomètres jusqu'à Carcassonne. Nous sommes, dans cette région, sous l'influence du climat méditerranéen, et le printemps est l'époque favorable pour une croisière sur l'Aude.

On trouve également d'intéressants parcours de classes 2 à 4 à effectuer sur l’Agly, le Têt, le Tech, mais la distance est très courte sur chacune de ces rivières et il faut être à proximité pour profiter d'une hauteur d'eau suffisante.

G. NOËL.

Le Chasseur Français N°642 Août 1950 Page 481