Les nombreux orages de grêles qui se sont succédé sur les
régions fruitières ont occasionné d'importants dégâts sur la récolte attendue,
en l'anéantissant en partie. Mais ils se révèlent véritables désastres par les
plaies profondes produites sur les rameaux, branches, coursonnes. La profondeur
des plaies augmente par suite de la croissance des branches, par le liquide qui
s'écoule de cellules déchirées, favorisant le développement des tissus sous-jacents,
lieu où se développent les spores des maladies du bois. À la suite de
l'attaque, la profondeur de la plaie augmente, le système vasculaire est
détruit en partie ; résultat : circulation de la sève défectueuse se
traduisant pour l'arbre par une alimentation anormale. C'est alors que les
arbres se présentent avec tous les caractères du dépérissement, de la tavelure,
de la gommose ou du chancre.
Au moment de la taille d'hiver, ces arbres semblent avoir
perdu leur vigueur des années précédentes. Ils ne possèdent que des rameaux
grêles, mal aoûtés, très souvent secs à leur sommet ; sur toute la
longueur du bois de l'année, des taches jaunâtres, grisâtres.
Soins à donner aux arbres fruitiers à noyaux ou à pépins
après l'orage de grêle.
— L'arbre grêlé ne doit pas être abandonné à lui-même.
Le praticien a le devoir d'intervenir pour lui aider à réparer les dégâts
subis. Dès l'orage disparu, les essences fruitières doivent être débarrassées
des rameaux cassés, en les coupant sur la partie saine, vivante, ou dont les
feuilles sont réduites ou déchirées ; supprimer toute l'extrémité des
rameaux terminaux ayant été blessés, prévenir les maladies en appliquant sur
toutes les parties de l'arbre, mais plus particulièrement sur les plaies, un
fongicide :
a. Pour les arbres à fruits à noyau, une bouillie sulfo-calcique
fabriquée par le praticien avec 2 kilogrammes de chaux grasse en pierre,
arrosée, dans un baquet en bois, avec de l'eau bouillante. Au foisonnement de
la chaux, ajouter 3 kilogrammes de soufre tamisé ; tenir le mélange humide
et apporter une nouvelle quantité d'eau à mesure qu'elle s'évapore afin de
former une bouillie liquide. Le tout est mélangé intimement, puis abandonné à
lui-même pendant une heure. Ce laps de temps écoulé, ajouter de l'eau pour
régler la mixture à 100 litres.
b. Pour les arbres à fruits à pépins, répandre une
bouillie cuprique neutre à 1 kilogramme de sulfate de cuivre et de chaux en
quantité suffisante pour rougir le papier au phénol-phtaléine, 50 grammes de
caséine pour 100 litres d'eau.
Aider l'arbre à former son tissu cicatriciel.
— Pour obturer les plaies et éviter les attaques du
bois, s'adresser aux engrais azotés solubles, qui favorisent la formation du
jeune tissu. Les parties mises à nu, étant recouvertes, se différencieront, par
la suite, pour donner des vaisseaux où circule activement la sève dans toutes
les parties de l'arbre. Une application de 200 kilogrammes de nitrate de soude
à l'hectare réalisera le résultat cherché. Cette année, nous l'avons
expérimenté sur les poiriers, pêchers, abricotiers. Dans les lignes où l'on a
appliqué le nitrate de soude, l'effet a été merveilleux : toutes les
plaies cicatrisées, avec développement abondant de rameaux sains ; aucune
trace de gomme ni de tavelure. Les arbres de lignes témoins présentaient au
contraire tous les caractères de ceux qui avaient été abandonnés à eux-mêmes.
Quelle taille appliquer aux arbres grêlés qui n'ont reçu
aucun soin ?
— L'aspect de l'arbre donnera l'indication pour assurer
la taille. Sur les arbres qui présentent sur les rameaux d'un an des plaies
gommées, tavelées, chancrées, avec aoûtement incomplet, la taille fera
disparaître les parties grêlées en coupant les rameaux courts, en ne laissant
que du bois sain. Le nombre de fruits sera très réduit, quelques boutons à
fleurs seront réservés sur les coursonnes bien constituées. L'arbre qui aurait les
caractères précédemment décrits, pourvu d'un grand nombre de rameaux feuillus,
subira la taille courte, en ne laissant fructifier des boutons que sur les
coursonnes bien constituées.
La taille terminée, pulvériser la bouillie suivante sur
toute la plantation : 2 kilogrammes de sulfate de cuivre, 2 kilogrammes de
cuivre, 1 kilogramme de chaux grasse, 50 grammes de caséine et 100 litres
d'eau.
Pour redonner à l'arbre sa vigueur et sa santé d'autrefois,
répandre comme complément de fumure : 100 kilogrammes de nitrate de soude
au départ de la végétation et 100 kilogrammes de nitrate de soude dès que les
fruits grossissent.
Ces arbres bien conduits, défendus contre les pucerons,
auront vite repris leur aspect d'autrefois, et, après trois années de ces
soins, la plantation sera productive de fruits sains et de qualité.
E. DEAUX.
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