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Élevage

Les tares molles des chevaux

Ainsi désignées par opposition aux tares dures, qui siègent sur les os (1), ces tares sont la conséquence de lésions inflammatoires des tissus mous, se développant au niveau des articulations ou sur le trajet des tendons, des membres antérieurs ou postérieurs.

Les causes qui les provoquent sont assez variables, car, si elles sont le plus souvent une manifestation de fatigue ou d'usure, chez des animaux plus ou moins ardents, mais montrant de « l'allant au travail », elles s'observent aussi chez d'autres, lymphatiques et manquant de tempérament, et encore chez les poulains, qui séjournent trop longtemps à l'écurie, avec une ration insuffisante ou mal composée.

Dans les articulations, qui réunissent entre elles les différentes parties du squelette, principalement celles qui contribuent à former la charpente osseuse des membres, le glissement des surfaces qui se trouvent en contact est favorisé par un revêtement cartilagineux et par un liquide plus ou moins abondant, la « synovie ». Celle-ci se trouve enfermée dans une sorte de sac, la « capsule synoviale », maintenue par des « ligaments articulaires » qui, en cas de travail excessif ou de maladie, ne suffisent pas à arrêter son expansion quand, à la suite de phénomènes inflammatoires, il y a production exagérée de ce lubrifiant physiologique. Ainsi se forment les molettes et les vessigons, articulaires ou tendineux, qui sont les tares molles les plus fréquentes ; les « hygromas », les « capelets » et les « éponges » sont aussi classés parmi les tares molles, mais leur formation et leur nature, sinon leur traitement, diffèrent sensiblement, et nous nous réservons de leur consacrer un article spécial.

Les molettes, surtout fréquentes aux membres postérieurs des chevaux, sont formées par la dilatation des poches synoviales siégeant à la face postérieure des boulets ; celles qui font saillie entre le canon et le suspenseur du boulet, de forme arrondie, sont les molettes articulaires ; celles qui ont une forme allongée, remontant plus ou moins haut le long des tendons, quelquefois avec un cul-de-sac, au-dessous du boulet et descendant jusqu'au paturon, sont les molettes tendineuses, celles-ci toujours moins graves que celles-là.

Les dilatations des poches synoviales du genou et du jarret ont été qualifiées de « vessigons », pouvant être comme les molettes articulaires ou tendineux, chacun présentant trois culs-de-sac distincts qui permettent de les différencier pour les traiter en connaissance de cause.

Le vessigon articulaire a un cul-de-sac antérieur sur le côté interne du pli du jarret et deux autres petits, à même hauteur, en avant de la corde du jarret. Ces trois tumeurs apparentes proviennent de la même cavité synoviale, elles communiquent entre elles et les pressions exercées sur l'une se transmettent intégralement aux autres.

Le vessigon tendineux se manifeste aussi par trois tumeurs molles, plus accusées à l'appui, dont deux apparaissent sur les côtés du jarret, en avant de la corde, derrière le vessigon articulaire, et la troisième descend sur le tiers supérieur du canon en enveloppant les tendons. Les pressions exercées sur la tumeur ne se transmettent pas au liquide de la face antérieure de la région, les gaines synoviales tendineuses et articulaires ne communiquant pas, mais ces pressions se transmettent sur la tumeur inférieure du jarret. Ce vessigon peut acquérir des dimensions énormes, surtout du côté interne, et gêner beaucoup la marche des sujets.

Les tumeurs molles du jarret sont toujours moins graves que les tumeurs osseuses, principalement l'éparvin ; par contre, si les molettes des membres postérieurs sont plus fréquentes, elles sont moins graves que celles des membres antérieurs, encore que celles-ci puissent être aussi considérées comme la référence d'un bon serviteur.

D'un point de vue très général, à la manière des anciens hippiatres peu fournis de médicaments, on peut dire que « l'eau et le feu » constituent l'essentiel du traitement des tares des membres des chevaux. Grâce aux bons effets des différentes méthodes hydrothérapiques : bains chauds ou froids, enveloppements humides, irrigation contenue, douches en pluie ou en jet, etc., etc., l'eau agit à la fois pour prévenir ou pour guérir. Mais son utilisation, à la portée de chacun, n'est recommandable que pour combattre des lésions légères, dès leur apparition, tandis que le feu, dont l'application sous ses différentes formes : feu en raies ou en pointes, pointes superficielles ou pénétrantes, ne peut être faite que par le vétérinaire, doit être réservé pour les lésions graves, déjà anciennes, provoquant boiterie, et plus souvent à l'intention des tares osseuses.

Entre ces deux interventions opposées, dont la dernière a l'inconvénient de laisser des traces indélébiles, considérées par beaucoup comme autant de tares (valeur marchande des animaux), d'autres moyens peuvent être utilisés avec succès. Les applications astringentes d'eau blanche (1 cuillerée à soupe d'extrait de saturne dans 1 litre d'eau) ; le mélange de blanc d'Espagne et de vinaigre en emplâtre ; les frictions légères de pommade mercurielle, recouvertes ensuite de teinture d'iode plusieurs jours de suite, jusqu'à exfoliation de l'épiderme, et enfin les frictions vésicantes d'onguent simple ou double, ou d'onguent Méré, dont l'emploi réclame modération et précautions. Par exemple, éviter avec soin que ces frictions n'empiètent pas dans les plis, des articulations, où elles provoqueraient la formation de crevasses ou de plaies suppurées longues à guérir. Accident facile à éviter en limitant les dimensions de la friction par un large cordon d'un corps gras (vaseline, axonge, populéum) bien imprégné dans le poil. En plus, ne pas oublier de placer les animaux traités dans l'impossibilité de porter la dent sur le vésicatoire, en les attachant au râtelier avec deux longes, ou en leur mettant un collier à chapelet, ou un solide bâton attaché au licol et au surfaix pour limiter autant que nécessaire les mouvements de l'encolure.

J.-H. BERNARD.

(1) Voir Le Chasseur Français d'octobre 1950.

Le Chasseur Français N°645 Novembre 1950 Page 681