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Le Bouvier des Flandres

Le Bouvier des Flandres est une race relativement jeune, dont les caractères sont fixés depuis une cinquantaine d'années environ.

À l'occasion de l'exposition du Club du Saint-Hubert du Nord, le 25 avril 1937, le Club des amis du Bouvier de Paris et les spécialistes de la race des clubs belges se réunirent et se mirent d'accord sur un standard unique englobant dans le Bouvier des Flandres la variété de Roulers, variété à poil noir.

Les origines de ce chien sont très vaguement connues. De tout temps, il a existé des chiens de garde, de taille respectable, très rustiques, appelés chiens de cour. Les hommes ont toujours eu la nécessité de faire garder leur maison, leurs biens et leurs troupeaux des incursions et des vols des pillards et des bêtes sauvages ; le chien, avec sa finesse de nez et d'oreilles, était tout désigné pour cet emploi.

Ces chiens de cour vivaient exclusivement dehors, leurs dures conditions de vie expliquent facilement leur rusticité et leur endurance ; la sélection était faite tout naturellement : les faibles ne subsistaient pas.

La race n'était pas très fixée ; on attachait beaucoup moins d'importance à l'extérieur du chien qu'à son caractère et qu'à son utilité ; il fallait qu'il soit de grande taille, résistant et mordant ; il apparaissait tantôt à poil lisse, tantôt à poil dur, la tête devait être grosse et terrifiante, l'oreille longue ou essorillée.

Ces chiens avaient donc de préférence un aspect fort, méchant, hirsute et déterminé, leur rôle étant de prévenir, de faire peur et d'attaquer si le besoin s'en faisait sentir.

Le poil dur avec son épais sous-poil en faisait un chien résistant aux intempéries, tout en contribuant à accentuer sa carrure et son aspect féroce.

Il ne fallait pas un chien trop nerveux qui alerte son maître inutilement ; le Bouvier est un chien calme, réfléchi, sage, tout en restant hardi ; tout ceci se lit dans son regard vigilant.

Il fut employé de très diverses façons : chien de garde, de défense, de trait ; dans les fermes, il servait même, paraît-il, de force motrice pour actionner les barattes.

Doué d'une rare compréhension, il a fait un remarquable chien de douanier employé pour la surveillance des frontières contre les contrebandiers et leurs chiens. On cite, d'après un directeur de douanes de Lille, les performances d'un remarquable chien de Bouvier qui, vers 1907, aurait capturé plus de 400 chiens de contrebandiers dans une période de six ans et fait découvrir de nombreux entrepôts de marchandises.

Dans la région de Courtrai, ces chiens furent très utilisés et sélectionnés ; l'eau de la Lys étant très pure, les toiles du pays y étaient lavées et séchaient dans les prairies environnantes, et ces chiens veillaient à ce qu'il ne manque rien.

Les marchands de bestiaux, soucieux de faire garder leurs troupeaux, sélectionnèrent sur ce type de chien le Bouvier, qui vivait nuit et jour avec le gros bétail, le conduisant, ne le perdant pas de vue, et certains toucheurs de bœufs étaient si sûrs de leurs chiens, dit-on, qu'ils ne se donnaient même pas la peine de les accompagner sur la route dans leurs déplacements et empruntaient aussi bien un autre chemin avant de les retrouver à l'étape.

Ce chien utile et réfléchi a fait beaucoup d'adeptes, et les Belges, qui possèdent un sens du dressage et de l'élevage, ont su affirmer certaines qualités. Le Bouvier s'est surtout fixé dans la Flandre orientale, sur les bords de la Lys, le Nord de la France et partout où il y avait du gros bétail à garder.

Il est bien difficile de cantonner un chien si précieux dans une province et de lui assigner des frontières trop définies. Il y a eu des Bouviers dans les Ardennes, des Bouviers normands, des Bouviers dans le Morvan, le Nivernais, dans le Languedoc, etc. C'est d'ailleurs l'avis du professeur de zootechnie A.-D. Reul, de l'École vétérinaire de Curegheen (Belgique), qui écrivit un ouvrage sur les races canines en 1891 : « Le Bouvier est le résultat du croisement de l'Alan de boucherie (dogue persan redoutable) et du Berger du Languedoc, ou tout autre berger à poil long lui ressemblant ; son berceau serait le Midi de la France, d'où il serait passé en Belgique avec la conquête espagnole. »

Aux expositions du Club du Saint-Hubert du Nord, en 1910 et 1912, on s'occupa sérieusement du Bouvier des Flandres et on songea à lui établir son standard.

L'apparence de ce chien est imposante ; il est rustique, à poil dur, rêche au toucher, révélant par le feu de son regard l'activité, l'énergie, l'audace.

La tête, de longueur moyenne, est bien proportionnée à la taille ; le crâne est plat, pas trop large entre les oreilles, s'inclinant légèrement vers le museau. La cassure du nez est plus apparente que réelle par la direction du poil ; l'arcade sourcilière est prononcée et porte du poil relevé.

Les joues bien sèches ne sont pas saillantes ; le museau est large et osseux, bien garni de poil non soyeux et non couché. Les lèvres sèches, serrées, sont garnies d'un bon poil assez long, mais non soyeux.

Les oreilles coupées en triangle sont bien portées droites et attachées haut, pas trop en arrière, et recouvertes d'un poil presque ras. La truffe est noire, bien développée.

Les yeux, foncés, ont une expression franche ; ils sont de grandeur moyenne, non proéminents, ni trop ronds, ni trop ovales.

La denture de ce chien est forte et bien adaptée.

Le cou est bien cylindrique au point d'attache et d'épaisseur plutôt forte ; l'épaule est longue, sèche, modérément oblique. La largeur du poitrail n'est pas exagérée ; la poitrine est bien descendue, les premières côtes seront légèrement marquées et les fausses côtes bombées.

Le corps est court, le dos fort, droit et musclé, suivi d'une croupe large et carrée ; la longueur de la pointe de l'épaule à la fesse est sensiblement égale à la hauteur du garrot. La queue est très courte, l'arrière-train bien musclé. Les aplombs des membres postérieurs doivent être parallèles avec ceux des membres antérieurs vus de devant comme de derrière.

Les pieds sont plutôt ronds, solides, avec des doigts bien serrés, garnis d'ongles foncés, les soles dures.

Le poil est très important, il protège le chien, il doit être dur, sec, rêche au toucher, légèrement ébouriffé, d'une longueur d'environ 6 centimètres ; à la base, on trouve un poil plus fin, de texture plus douce : c'est le sous-poil, plus abondant en hiver. La caractéristique de ce chien est d'avoir naturellement le poil de la tête plus court, sauf au-dessus des yeux, de chaque côté du museau et sous le menton, mais il reste dur. Le poil sur les pattes est également dense et dur.

La couleur de la robe va du fauve au noir en passant par le poivre et sel, les gris et les bringés. Le brun chocolat et le blanc trop envahissant ne sont pas admis.

La taille désirable est, pour les mâles, de 65 centimètres ; pour les femelles, de 62 centimètres.

Dans la conduite des troupeaux, entraîné à sauter sur place pour stimuler les gros bestiaux, soit en leur mordant le jarret, soit en leur sautant aux naseaux, le Bouvier des Flandres a acquis un rein musclé et très développé, l'arrière-main est large et proportionnellement plus développée que l'avant-train ; son dos est court ; il est construit en « cob ». C'est un chien très agile et vigoureux qui accomplit un excellent travail.

A. PERRON.

Le Chasseur Français N°646 Décembre 1950 Page 721