Nous sommes au cœur de l'hiver, saison peu favorable au
canoé. Même pour les plus sportifs d'entre nous, l'activité se borne à une
sortie hebdomadaire de quelques heures, une partie de nos loisirs étant encore
consacrée à l'entretien et à la révision du matériel.
Par contre, les soirées sont longues, et nous aimons les
passer en compagnie de quelques bons amis ; si ce sont des canoéistes,
nous échangeons des souvenirs, ébauchons des projets, et, inévitablement, les
collections de photographies entrent en action. Si nos compagnons ignorent le
canoé, nous serons heureux de leur montrer la beauté du cadre où nous évoluons
et la grâce de notre embarcation, fiers d'exhiber telle image mettant en
évidence notre hardiesse et notre habileté au milieu d'un rapide écumant.
Le tourisme nautique se prête, en effet, merveilleusement à
la photographie, mais, pour bien réussir, il est bon de connaître certains
principes. En rivière calme, où l'intérêt consiste à photographier des
monuments, des paysages où un canoé se déplace lentement, n'importe quel
appareil peut être employé : un diaphragme 6,3 et un obturateur au 1/100
de seconde permettront d'honnêtes résultats. Vous aurez généralement tout le
temps nécessaire pour régler votre appareil, et c'est l'habileté de l'opérateur
pour choisir son angle de prise de vue, cadrer son sujet et profiter du
meilleur éclairage qui sera le principal facteur de réussite. L'appareil
classique de format 6 x 9 conviendra très bien ; avec les
formats plus petits munis d'objectifs à distances focales plus courtes, vous
aurez une plus grande tolérance dans la profondeur de champ, et il vous sera
plus facile de faire ressortir les premiers plans dans vos clichés. Sur les
rivières dégagées, la luminosité est grande, et vous aurez intérêt à utiliser
des pellicules panchromatiques de rapidité moyenne, à grain fin, permettant
mieux l'agrandissement.
Le pare-soleil est un accessoire indispensable qui vous
permettra de profiter des meilleurs éclairages et de réussir de beaux clichés à
contre-jour. Les filtres colorés seront utilisés comme partout ailleurs :
jaune, ou surtout vert, pour faire ressortir les nuages et la verdure ; jaune-rouge
pour obtenir de violents contrastes.
En rivières sportives, le photographe rencontrera des
conditions beaucoup plus difficiles : éclairage souvent défectueux au fond
des gorges et, cependant, nécessité d'opérer à grande vitesse pour saisir avec
netteté un canoé bondissant dans un rapide. Un appareil convenable, pour bien
réussir dans ces conditions, devra comporter un obturateur faisant le 1/250 de
seconde et un diaphragme d'une ouverture 4,5 ou supérieure. Comme dans toutes
les circonstances, la qualité de l'optique jouera un grand rôle.
Nous insisterons surtout sur l'avantage des appareils
comportant un système de réglage et de mise au point très rapide. Souvent vous
ne disposerez que de quelques secondes pour échouer votre canoé à la fin d'un
rapide, sortir l'appareil du sac, vous mettre en place, régler et saisir au
passage le canoé qui vous suivait à une courte distance. Notre préférence ira
aux appareils de petit format ou 6 x 6, qui possèdent généralement
ces qualités. Le pare-soleil sera très souvent employé. Par contre, la
nécessité d'opérer à grande vitesse vous fera négliger les filtres colorés,
d'un rendement médiocre pour ce genre de photographies.
Vous prendrez la précaution de toujours ranger votre
appareil dans un sac étanche spécial, fixé au canoé, à portée de la main. Les
modèles gonflables à fermeture étanche par pressions sont d'un emploi sûr et
pratique.
La photographie en canoé vous réservera bien des joies et
vous permettra de revivre les bons instants passés sur la rivière. En
agrandissant vous-même vos clichés, vous obtiendrez les meilleurs résultats en
effectuant le travail le plus intéressant de la photographie.
Nous connaissons tous le charme du cinéma et l'intérêt que
présente la caméra pour un amateur. Malheureusement, de nombreux opérateurs se
contentent de projeter leurs films collés bout à bout dans un ordre plus ou
moins heureux. Trop souvent, ils présentent à leur public non un film, mais,
une suite de photographies animées : il leur a manqué un « sujet ».
Pour le canoéiste, le sujet est toujours présent : c'est la rivière, le
dévalement des rapides, le jeu des canoés judicieusement interrompu par des
vues de paysages ou des scènes de camping. On a réalisé dans ce domaine des
bandes parfaites, et la cinémathèque du Canoé-Club de France est unique en son
genre.
Il est difficile d'orienter le débutant vers l'un des
formats 8 millimètres, 9mm,5 ou 16 millimètres. Les deux premiers
sont suffisants pour des projections en petites salles ; le 16 millimètres
offre des possibilités voisines de celles du cinéma professionnel. En
définitive, ce sera votre budget qui dictera votre choix tant pour le format
que pour la qualité du matériel. Comme pour la photographie, le canoéiste
tirera le meilleur parti d'un matériel simple, léger, d'un emploi aisé. Il
devra, en effet, opérer très rapidement sous peine d'arrêter constamment ses
camarades et de ralentir à l'extrême le rythme de la croisière.
Toutes les astuces du cinéma : gros plans, vues
panoramiques, ralentis, trouveront toujours une heureuse application au cours
des prises de vues et permettront de monter des films d'un réel intérêt, qui
seront toujours très appréciés, même par un public non initié.
G. NOËL.
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