Accueil  > Années 1950  > N°646 Décembre 1950  > Page 733 Tous droits réservés

Le canoé

Prises de vue au fil de l'eau

Nous sommes au cœur de l'hiver, saison peu favorable au canoé. Même pour les plus sportifs d'entre nous, l'activité se borne à une sortie hebdomadaire de quelques heures, une partie de nos loisirs étant encore consacrée à l'entretien et à la révision du matériel.

Par contre, les soirées sont longues, et nous aimons les passer en compagnie de quelques bons amis ; si ce sont des canoéistes, nous échangeons des souvenirs, ébauchons des projets, et, inévitablement, les collections de photographies entrent en action. Si nos compagnons ignorent le canoé, nous serons heureux de leur montrer la beauté du cadre où nous évoluons et la grâce de notre embarcation, fiers d'exhiber telle image mettant en évidence notre hardiesse et notre habileté au milieu d'un rapide écumant.

Le tourisme nautique se prête, en effet, merveilleusement à la photographie, mais, pour bien réussir, il est bon de connaître certains principes. En rivière calme, où l'intérêt consiste à photographier des monuments, des paysages où un canoé se déplace lentement, n'importe quel appareil peut être employé : un diaphragme 6,3 et un obturateur au 1/100 de seconde permettront d'honnêtes résultats. Vous aurez généralement tout le temps nécessaire pour régler votre appareil, et c'est l'habileté de l'opérateur pour choisir son angle de prise de vue, cadrer son sujet et profiter du meilleur éclairage qui sera le principal facteur de réussite. L'appareil classique de format 6 x 9 conviendra très bien ; avec les formats plus petits munis d'objectifs à distances focales plus courtes, vous aurez une plus grande tolérance dans la profondeur de champ, et il vous sera plus facile de faire ressortir les premiers plans dans vos clichés. Sur les rivières dégagées, la luminosité est grande, et vous aurez intérêt à utiliser des pellicules panchromatiques de rapidité moyenne, à grain fin, permettant mieux l'agrandissement.

Le pare-soleil est un accessoire indispensable qui vous permettra de profiter des meilleurs éclairages et de réussir de beaux clichés à contre-jour. Les filtres colorés seront utilisés comme partout ailleurs : jaune, ou surtout vert, pour faire ressortir les nuages et la verdure ; jaune-rouge pour obtenir de violents contrastes.

En rivières sportives, le photographe rencontrera des conditions beaucoup plus difficiles : éclairage souvent défectueux au fond des gorges et, cependant, nécessité d'opérer à grande vitesse pour saisir avec netteté un canoé bondissant dans un rapide. Un appareil convenable, pour bien réussir dans ces conditions, devra comporter un obturateur faisant le 1/250 de seconde et un diaphragme d'une ouverture 4,5 ou supérieure. Comme dans toutes les circonstances, la qualité de l'optique jouera un grand rôle.

Nous insisterons surtout sur l'avantage des appareils comportant un système de réglage et de mise au point très rapide. Souvent vous ne disposerez que de quelques secondes pour échouer votre canoé à la fin d'un rapide, sortir l'appareil du sac, vous mettre en place, régler et saisir au passage le canoé qui vous suivait à une courte distance. Notre préférence ira aux appareils de petit format ou 6 x 6, qui possèdent généralement ces qualités. Le pare-soleil sera très souvent employé. Par contre, la nécessité d'opérer à grande vitesse vous fera négliger les filtres colorés, d'un rendement médiocre pour ce genre de photographies.

Vous prendrez la précaution de toujours ranger votre appareil dans un sac étanche spécial, fixé au canoé, à portée de la main. Les modèles gonflables à fermeture étanche par pressions sont d'un emploi sûr et pratique.

La photographie en canoé vous réservera bien des joies et vous permettra de revivre les bons instants passés sur la rivière. En agrandissant vous-même vos clichés, vous obtiendrez les meilleurs résultats en effectuant le travail le plus intéressant de la photographie.

Nous connaissons tous le charme du cinéma et l'intérêt que présente la caméra pour un amateur. Malheureusement, de nombreux opérateurs se contentent de projeter leurs films collés bout à bout dans un ordre plus ou moins heureux. Trop souvent, ils présentent à leur public non un film, mais, une suite de photographies animées : il leur a manqué un « sujet ». Pour le canoéiste, le sujet est toujours présent : c'est la rivière, le dévalement des rapides, le jeu des canoés judicieusement interrompu par des vues de paysages ou des scènes de camping. On a réalisé dans ce domaine des bandes parfaites, et la cinémathèque du Canoé-Club de France est unique en son genre.

Il est difficile d'orienter le débutant vers l'un des formats 8 millimètres, 9mm,5 ou 16 millimètres. Les deux premiers sont suffisants pour des projections en petites salles ; le 16 millimètres offre des possibilités voisines de celles du cinéma professionnel. En définitive, ce sera votre budget qui dictera votre choix tant pour le format que pour la qualité du matériel. Comme pour la photographie, le canoéiste tirera le meilleur parti d'un matériel simple, léger, d'un emploi aisé. Il devra, en effet, opérer très rapidement sous peine d'arrêter constamment ses camarades et de ralentir à l'extrême le rythme de la croisière.

Toutes les astuces du cinéma : gros plans, vues panoramiques, ralentis, trouveront toujours une heureuse application au cours des prises de vues et permettront de monter des films d'un réel intérêt, qui seront toujours très appréciés, même par un public non initié.

G. NOËL.

Le Chasseur Français N°646 Décembre 1950 Page 733