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Causerie médicale

Les stomatites

La bouche, première portion de l'appareil digestif, en est la partie la plus facile à examiner, surtout si le malade sait ouvrir largement la bouche, au besoin en tirant et en maintenant la langue saisie avec un mouchoir, ce qui évite bien souvent l'emploi de l'abaisse-langue, qui effraie toujours les enfants.

La bouche et surtout la langue présentent des signes dans beaucoup de maladies, aussi le geste de faire tirer la langue et d'ouvrir la bouche fait toujours partie d'une première consultation ; l'examen même sommaire apporte des renseignements qui vont aussitôt faire chercher quelque affection du système digestif.

Envisageons ici simplement les affections locales de la bouche, dont on décrit de nombreuses variétés.

La stomatite aiguë ou catarrhale est caractérisée par la rougeur et la congestion de la muqueuse buccale ; le début est généralement rapide, sans troubles généraux. Le malade se plaint de la sécheresse de la bouche, très rarement de salivation exagérée ; la mastication et la déglutition sont douloureuses ; on constate très souvent un engorgement des glandes salivaires ou des ganglions sous-maxillaires ; il peut apparaître de la fièvre, généralement légère ; la gêne de la mastication et de la déglutition entraîne l'inappétence.

Parmi les causes, on invoque l'abus de condiments irritants comme le poivre, le piment, l'usage excessif du tabac, l'absorption de liquides trop chauds et des troubles de dentition.

Le traitement local se résume en lavages de bouche, de gargarismes avec une solution légèrement antiseptique ; solution de liqueur de Labarraque (une cuillerée à soupe pour un verre d'eau tiède) ou eau iodée (quelques gouttes de teinture d'iode dans un verre d'eau).

La stomatite ulcéro-membraneuse peut être considérée comme une forme plus intense de la forme précédente. Comme l'indique son nom, cette forme s'accompagne d'ulcérations de la muqueuse en partie recouvertes d'un enduit plus ou moins épais, plus ou moins adhérent, prenant l'apparence de fausses membranes qui obligent à faire le diagnostic avec une affection diphtérique ou des plaques muqueuses. Les ulcérations sont souvent causées par des dents cariées ou par l'irritation d'un appareil de prothèse.

Les symptômes sont généralement plus intenses que dans la forme aiguë simple, et il est des cas de contagion prenant l'allure épidémique (dans les pensionnats ou chez les jeunes recrues).

Les lavages de bouche sont toujours indiqués comme dans la forme précédente ; on emploie beaucoup le chlorate de potasse (qui forme une sorte de gargarisme sec), et il est souvent indiqué de toucher les ulcérations avec un collutoire : bleu de méthylène à 1p. 100, de néo-salvarsan glycériné, plus rarement, en cautérisations avec de l'acide chromique à 5 p. 100.

La stomatite aphteuse peut être une affection purement locale, mais le plus souvent il s'agit alors d'un symptôme d'une maladie fébrile, consécutive à une contagion par un sujet déjà atteint ou par des animaux contaminés par la fièvre aphteuse ; la contagion peut être indirecte, par l'intermédiaire du lait (qu'il faudra toujours faire bouillir lors des épizooties). Les aphtes se trouvent surtout sur le sillon gingivo-labial, sur la face interne de la lèvre inférieure ; on accuse certains aliments, les noix, les salaisons, de favoriser l'éclosion des aphtes.

Au début, ces aphtes se présentent sous forme de petites taches rouges sur lesquelles apparaissent de petites vésicules dont les dimensions varient entre celles d'une tête d'épingle à celles d'une lentille ; ces vésicules se rompent en laissant une ulcération à fond grisâtre, couvertes d'un exsudat difficile à détacher.

Après une période d'incubation d'environ trois jours, l'affection débute par un malaise général, avec courbature, frissons, maux de tête. La langue est saburrale (on dit qu'elle est chargée); l'haleine est parfois fétide, la fièvre peut atteindre 38°,5 à 39° ; l'inappétence est due aux mêmes causes que dans la forme simple aiguë ; chez le nourrisson, la succion devient douloureuse et gêne l'alimentation.

La durée n'excède guère sept à huit jours.

On conseille des attouchements avec de l'alun ou du tannin, plus rarement avec un crayon de nitrate d'argent; on fera des lavages de la bouche (des gargarismes, s'il s'agit d'un adulte) avec une solution de salicylate de soude à 2 p. 100, et on donnera du chlorate de potasse.

Le muguet est une stomatite causée par un champignon auquel on a déjà donné différents noms. Cette petite affection, souvent très désagréable, s'observe chez des enfants ou des adultes, les uns comme les autres dans un mauvais état général, au cours d'une convalescence, avec une mauvaise ou insuffisante alimentation.

Les symptômes sont peu marqués, et c'est une affection qu'il faut rechercher ; on remarque facilement de petites plaques blanches du volume d'un grain de riz à leur début et ayant l'apparence de lait caillé ou de fromage mou. Chez le bébé, la succion devient difficile ; chez l'adulte, il se produit un dégoût pour les aliments, qui prennent un goût fade.

Il n'y a pas d'ulcérations, mais on a signalé des récidives, sur la luette, la glotte et même l'œsophage.

Le pronostic dépend de la maladie au cours de laquelle est survenu le muguet.

Le traitement, prophylactique ou curatif, demande des soins de propreté des dents et de la bouche, des gargarismes ou des lavages de bouche avec une solution de salicylate comme ci-dessus, de l'eau bicarbonatée, des collutoires à base de borate de soude en solution glycérinée.

Dans toutes les affections douloureuses de la bouche, il est un produit peu connu dans cet usage qui procure, très souvent, un soulagement immédiat : c'est tout simplement une décoction (donnée tiède) de réglisse (150 à 200 grammes pour un litre d'eau).

Stomatites toxiques.

— Certains médicaments, surtout le mercure, le bismuth, s'éliminent par la salive ; on sait qu'en cas d'absorption d'un de ces médicaments il faut avoir soin de la propreté de la bouche et ne pas manquer de faire soigner les dents ; si la stomatite se produit, elle nécessite l'abandon immédiat du médicament causal, des collutoires au bleu de méthylène, ou de l'arsénobenzol, et l'emploi du chlorate de potasse.

Certaines inflammations de la bouche peuvent être dues à une cause externe, et l'on a observé une affection débutant par les lèvres, qu'on a appelée chéilite, et qu'on a pu attribuer à l'emploi d'un rouge à lèvres, surtout coloré à l'éosine. Après la suppression de ce cosmétique causal, le traitement ne diffère en rien de celui des formes précédentes.

Dr A. GOTTSCHALK.

Le Chasseur Français N°646 Décembre 1950 Page 751