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Automobile

Le moteur au 37e salon

Le dernier Salon n'a pas été un salon révolutionnaire. Mais, si nous n'avons pas assisté à l'éclosion de modèles ou de prototypes nouveaux, nous avons pu remarquer des mises au point ou des améliorations de détails non négligeables. Le technicien y a glané une belle moisson d'enseignements et de leçons des plus profitables. Un confrère suisse, en parlant du Salon de Paris, a su trouver le mot exact en le baptisant le « Salon des trésors cachés ». Essayons donc de mettre au jour les trésors en question.

Nous assistons au triomphe du 4 cylindres. Ce moteur, dont l'équilibrage n'est certes pas théoriquement parfait, a conquis le marché par sa simplicité et sa relative souplesse. Son prix de revient est très acceptable et sa mise au point, jointe à sa robustesse, tout au moins dans les catégories de 1 à 3 litres de cylindrée, ont fait leur preuve. 44 p. 100 de la construction automobile ont porté son choix sur le 4 cylindres, contre 34 pour le 6 cylindres et 12 seulement pour le 8. Notons des nouveaux venus de choix au 4 cylindres, tels que Grégoire-Hotchkiss, Salmson G80 pour la France, Fiat 1400 et l'Alfa Roméo 1900 pour l'Italie. Dans les 6 cylindres, signalons la naissance de la Lancia Aurelia avec moteur en V. Les deux rangées de 3 cylindres sont inclinées à 60°. Ceci ne manque pas d'originalité. L'ensemble du moteur est très court, donc facilement logeable, avec des bougies bien accessibles et très refroidies. Quant aux 8 cylindres qui équipent les voitures de grande classe, ils se réclament presque tous de la disposition en V. La recherche des hauts rendements a amené les constructeurs européens à adopter le montage des soupapes en tête — quelques réfractaires cependant avec Ford et Rovin. Notons que la distribution des soupapes en tête alignées sur un rang, montage Citroën et Hotchkiss, est délaissée quelque peu avec l'adoption, sur la plupart des nouveautés, des soupapes inclinées et décalées. On parvient ainsi à une chambre d'explosions hémisphérique, avec bougie centrale et une tubulure d'admission ne présentant que des courbures réduites. Salmson et Alfa Roméo restent fidèles au double arbre à cames en tête et soupapes à plateau. Les taux de compression ont été relevés dans de notables proportions. On note le chiffre de 6,5 pour Grégoire-Hotchkiss, 6,8 pour Peugeot 203, 7,15 pour Renault 4 CV, 7,8 pour Simca Sport.

Les super-carburants, ainsi que l'essence alcoolisée viennent apporter leur aide précieuse dans la lutte contre le cliquetis, presque fatal avec de tels rapports de compression. Les régimes normaux des moteurs, de leur côté, oscillent entre 4.000 et 4.500 tours-minute. Certains dépassent même cette limite, tel Peugeot 203 avec ses 5.000 tours-minute. La Dyna-Panhard formule course, 500 centimètres cubes DB, atteint même, en régime maximum, les 6.000 tours à la minute. Le rendement des moteurs joint à la. recherche d'une longévité optimum exige encore une réduction du rapport course-alésage (62x62 pour la Citroën 2 CV, 86x88 pour la Grégoire, 75x79,5 pour la Panhard 120), une rigidité particulière des bielles, forcément courtes, attaquant des vilebrequins à grosse section et tourillonnant sur de larges paliers. Notons aussi la légèreté, de plus en plus grande, des pistons, ainsi que les soins, particuliers, apportés, vu. de tels régimes, à l'équilibrage de l'ensemble. Le rendement au litre de cylindrée , critérium de première; importance ; atteint des chiffres inconnus à ce jour. On. note 30 CV au litre pour la Ford-Vedette, 46 CV pour la Panhard-Dyna 120, 32 CV pour la Peugeot 203, la Salmson et la Lancia Aurelia.

Les spécialistes de la carburation ont continué leurs recherches avec succès : facilités de démarrage, obtention de régimes économiques, dessin appropriée des tubulures d'admission, montage de carburateurs multiples dans les séries sport, généralisation des carburateurs à double corps, etc... Au graissage sous pression, général actuellement, est venu s'adjoindre un refroidissement intensif du lubrifiant, grâce aux dimensions largement calculées des carters, pourvus très souvent de nervures profondes ; le tout complété d'une épuration et filtration intensives. Le refroidissement du moteur par air semble avoir fait ses preuves. On peut s'attendre à une généralisation prochaine, surtout dans les petites cylindrées.

Si les embrayages à friction semblent avoir conquis une position inébranlable auprès des constructeurs européens, notons cependant la confirmation des embrayages à liquide qui nous conduisent tout naturellement aux transmissions automatiques. L'intérêt du monde automobile se trouve concentré sur les recherches entreprises aux cours de ces dernières années, sur des réalisations astucieuses, tendant à substituer, au classique changement de vitesse à engrenages et à commande manuelle, un organe effectuant lui-même la sélection des rapports de démultiplication, et ce d'une manière automatique, sans intervention aucune du pilote. Les Américains sont, ici, à l'avant-garde de cette technique. Leur choix porte, pour l'embrayage automatique, sur l’utilisation de convertisseurs hydrauliques, dont le principe repose sur la conservation de l'énergie cinétique d'un liquide mis en mouvement dans un corps creux, de forme torique. Quand le moteur tourne et a son régime, l'huile se trouvant dans le récipient moteur est projetée à la périphérie, grâce à la force centrifuge, et va frapper les aubes du récipient récepteur, solidaire de la transmission, qui entre, à son tour, en rotation.

Pour démarrer, il suffit d'accélérer. La pédale de débrayage a ses jours comptés. Poussant plus loin la question, les Américains ont mis au point le couplage hydraulique, assurant la mise en service automatique des engrenages constitués ici par des trains épicycloïdaux. Ce sont des pompes de mise en pression, commandées par un régulateur solidaire du moteur, qui assure la sélection grâce à une transmission hydraulique. Cadillac, Kaiser, Lincoln, Oldsmobile utilisent ce système. Mieux, un autre système, les convertisseurs de couple, assure une variation de démultiplication continue. C'est, dans ce cas, l’automaticité intégrale.

Si tous les mécanismes facilitent grandement les conditions de conduite d'un véhicule, par contre, et du fait des glissements, pertes, échauffement, la consommation en carburant se trouve sensiblement accrue.

Buick, Chevrolet et Kaiser ont dû augmenter la puissance du moteur de leurs châssis équipés de transmissions automatiques de 10 à 15 CV, afin de compenser une diminution de rendement.

En Europe, où l'on ne peut se permettre de telles fantaisies, nous assistons à la généralisation de la boîte Cotal, avec électro-fluide. En embrayage automatique, signalons également les efforts heureux de Bochory et de Gravina, sans oublier la boîte présélective Wilson couplée avec un embrayage hydraulique et qui a vu le jour il y a plus de vingt ans.

Le moteur ayant été, aujourd'hui, au cours de cette causerie, rapidement passé en revue, nous examinerons la prochaine fois le châssis.

G. Avando,

Ingénieur E. T. P.

Le Chasseur Français N°647 Janvier 1951 Page 45