Le dernier Salon n'a pas été un salon révolutionnaire. Mais,
si nous n'avons pas assisté à l'éclosion de modèles ou de prototypes nouveaux,
nous avons pu remarquer des mises au point ou des améliorations de détails non négligeables.
Le technicien y a glané une belle moisson d'enseignements et de leçons des plus
profitables. Un confrère suisse, en parlant du Salon de Paris, a su trouver le
mot exact en le baptisant le « Salon des trésors cachés ». Essayons donc de
mettre au jour les trésors en question.
Nous assistons au triomphe du 4 cylindres. Ce moteur, dont
l'équilibrage n'est certes pas théoriquement parfait, a conquis le marché par
sa simplicité et sa relative souplesse. Son prix de revient est très acceptable
et sa mise au point, jointe à sa robustesse, tout au moins dans les catégories
de 1 à 3 litres de cylindrée, ont fait leur preuve. 44 p. 100 de la
construction automobile ont porté son choix sur le 4 cylindres, contre 34 pour le
6 cylindres et 12 seulement pour le 8. Notons des nouveaux venus de choix au 4
cylindres, tels que Grégoire-Hotchkiss, Salmson G80 pour la France, Fiat 1400
et l'Alfa Roméo 1900 pour l'Italie. Dans les 6 cylindres, signalons la
naissance de la Lancia Aurelia avec moteur en V. Les deux rangées de 3
cylindres sont inclinées à 60°. Ceci ne manque pas d'originalité. L'ensemble du
moteur est très court, donc facilement logeable, avec des bougies bien
accessibles et très refroidies. Quant aux 8 cylindres qui équipent les voitures
de grande classe, ils se réclament presque tous de la disposition en V. La
recherche des hauts rendements a amené les constructeurs européens à adopter le
montage des soupapes en tête — quelques réfractaires cependant avec Ford et Rovin.
Notons que la distribution des soupapes en tête alignées sur un rang, montage
Citroën et Hotchkiss, est délaissée quelque peu avec l'adoption, sur la plupart
des nouveautés, des soupapes inclinées et décalées. On parvient ainsi à une
chambre d'explosions hémisphérique, avec bougie centrale et une tubulure
d'admission ne présentant que des courbures réduites. Salmson et Alfa Roméo
restent fidèles au double arbre à cames en tête et soupapes à plateau. Les taux
de compression ont été relevés dans de notables proportions. On note le chiffre
de 6,5 pour Grégoire-Hotchkiss, 6,8 pour Peugeot 203, 7,15 pour Renault 4 CV, 7,8
pour Simca Sport.
Les super-carburants, ainsi que l'essence alcoolisée
viennent apporter leur aide précieuse dans la lutte contre le cliquetis,
presque fatal avec de tels rapports de compression. Les régimes normaux des
moteurs, de leur côté, oscillent entre 4.000 et 4.500 tours-minute. Certains
dépassent même cette limite, tel Peugeot 203 avec ses 5.000 tours-minute. La Dyna-Panhard
formule course, 500 centimètres cubes DB, atteint même, en régime maximum, les
6.000 tours à la minute. Le rendement des moteurs joint à la. recherche d'une
longévité optimum exige encore une réduction du rapport course-alésage (62x62
pour la Citroën 2 CV, 86x88 pour la Grégoire, 75x79,5 pour la Panhard 120), une
rigidité particulière des bielles, forcément courtes, attaquant des
vilebrequins à grosse section et tourillonnant sur de larges paliers. Notons
aussi la légèreté, de plus en plus grande, des pistons, ainsi que les soins,
particuliers, apportés, vu. de tels régimes, à l'équilibrage de l'ensemble. Le
rendement au litre de cylindrée , critérium de première; importance ; atteint
des chiffres inconnus à ce jour. On. note 30 CV au litre pour la Ford-Vedette,
46 CV pour la Panhard-Dyna 120, 32 CV pour la Peugeot 203, la Salmson et la
Lancia Aurelia.
Les spécialistes de la carburation ont continué leurs
recherches avec succès : facilités de démarrage, obtention de régimes
économiques, dessin appropriée des tubulures d'admission, montage de
carburateurs multiples dans les séries sport, généralisation des carburateurs à
double corps, etc... Au graissage sous pression, général actuellement, est venu
s'adjoindre un refroidissement intensif du lubrifiant, grâce aux dimensions
largement calculées des carters, pourvus très souvent de nervures profondes ;
le tout complété d'une épuration et filtration intensives. Le refroidissement
du moteur par air semble avoir fait ses preuves. On peut s'attendre à une
généralisation prochaine, surtout dans les petites cylindrées.
Si les embrayages à friction semblent avoir conquis une
position inébranlable auprès des constructeurs européens, notons cependant la
confirmation des embrayages à liquide qui nous conduisent tout naturellement
aux transmissions automatiques. L'intérêt du monde automobile se trouve
concentré sur les recherches entreprises aux cours de ces dernières années, sur
des réalisations astucieuses, tendant à substituer, au classique changement de
vitesse à engrenages et à commande manuelle, un organe effectuant lui-même la
sélection des rapports de démultiplication, et ce d'une manière automatique,
sans intervention aucune du pilote. Les Américains sont, ici, à l'avant-garde
de cette technique. Leur choix porte, pour l'embrayage automatique, sur l’utilisation
de convertisseurs hydrauliques, dont le principe repose sur la conservation de
l'énergie cinétique d'un liquide mis en mouvement dans un corps creux, de forme
torique. Quand le moteur tourne et a son régime, l'huile se trouvant dans le
récipient moteur est projetée à la périphérie, grâce à la force centrifuge, et
va frapper les aubes du récipient récepteur, solidaire de la transmission, qui
entre, à son tour, en rotation.
Pour démarrer, il suffit d'accélérer. La pédale de débrayage
a ses jours comptés. Poussant plus loin la question, les Américains ont mis au
point le couplage hydraulique, assurant la mise en service automatique des
engrenages constitués ici par des trains épicycloïdaux. Ce sont des pompes de
mise en pression, commandées par un régulateur solidaire du moteur, qui assure
la sélection grâce à une transmission hydraulique. Cadillac, Kaiser, Lincoln,
Oldsmobile utilisent ce système. Mieux, un autre système, les convertisseurs de
couple, assure une variation de démultiplication continue. C'est, dans ce cas, l’automaticité
intégrale.
Si tous les mécanismes facilitent grandement les conditions
de conduite d'un véhicule, par contre, et du fait des glissements, pertes,
échauffement, la consommation en carburant se trouve sensiblement accrue.
Buick, Chevrolet et Kaiser ont dû augmenter la puissance du
moteur de leurs châssis équipés de transmissions automatiques de 10 à 15 CV,
afin de compenser une diminution de rendement.
En Europe, où l'on ne peut se permettre de telles
fantaisies, nous assistons à la généralisation de la boîte Cotal, avec électro-fluide.
En embrayage automatique, signalons également les efforts heureux de Bochory et
de Gravina, sans oublier la boîte présélective Wilson couplée avec un embrayage
hydraulique et qui a vu le jour il y a plus de vingt ans.
Le moteur ayant été, aujourd'hui, au cours de cette
causerie, rapidement passé en revue, nous examinerons la prochaine fois le
châssis.
G. Avando,
Ingénieur E. T. P.
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