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Causerie juridique

A propos des baux de chasse

Dans une précédente causerie, nous avons jugé intéressant d'appeler l'attention de nos lecteurs sur diverses, difficultés se présentant, dans la pratique, à l'occasion de certaines insuffisances de rédaction se rencontrant fréquemment dans les baux de chasse.

Une demande de consultation qui nous est parvenue récemment nous montre que le nombre des difficultés de cette nature susceptibles de se présenter est infini, quelque soin qu'on apporte à rédiger les baux d'une manière satisfaisante. Il s'agit aujourd'hui de la durée du bail et de la date à laquelle prend fin le bail de chasse.

D'une manière générale, les baux, du point de vue de la durée, se divisent en deux catégories. Les uns sont conclus pour une durée prévue, pour trois ans, par exemple ; en ce cas, chacune des parties est liée envers l’autre pour le temps convenu dans l'acte et ne peut se dégager de ce lien avant cette date que si l’autre partie y consent. Les autres sont faits pour une durée illimitée, indéterminée, mais, en ce cas, chacune des parties peut se dégager des liens du bail quand cela lui convient, sauf à observer les formalités et délais prescrits à cet effet soit par les clauses du bail, soit par l'usage.

Les règles ci-dessus sont applicables aux baux de chasse. Ainsi, le bail de chasse conclu pour une durée de trois ans à compter du 1er juillet 1946 n'expire, en principe, que le 30 juin 1949, en sorte que c’est seulement à partir de cette dernière date que le propriétaire peut de nouveau disposer au profit d'un nouveau locataire du droit de chasser.

Mais les baux de chasse présentent cette particularité que, même conclus pour une année entière, ils ne produisent, en fait, au profit du locataire, un effet utile que durant la période de l'année où il est permis de chasser ; en dehors de cette période, le bail de chasse ne confère au locataire aucun avantage appréciable.

C'est ce qu'on exprime en disant que l'année de chasse ne comporte pas nécessairement 365 jours et se réduit, en réalité, à la période durant laquelle, chaque année, il est permis de chasser, et qui va du jour de l'ouverture générale ou partielle au jour de la clôture définitive, en y incluant, au besoin, la durée de deux à trois mois supplémentaires accordée pour la destruction des animaux malfaisants et nuisibles.

Il résulte de ce qui précède, au point de vue de la date d'expiration des baux de chasse conclus soit pour une année, soit pour un certain nombre d'années, les conséquences suivantes. Si le bail ne fixe pas la date à laquelle il prendra fin, on présume que cette date est le 365e Jour compté à partir du premier jour du bail. Mais c'est là une simple présomption à laquelle il est loisible aux parties de déroger ; il arrive, en fait, assez souvent que les parties conviennent qu’un bail, même conclu pour un certain nombre d'années calculé à partir d'une date quelconque, prendra fin à la date de la clôture générale de la chasse de telle ou telle année. En ce cas, le locataire ne peut se plaindre de ce que la durée du bail soit inférieure à 365 jours dès lors qu'elle a compris toute la période durant laquelle la chasse a été permise. Dès lors que la volonté des parties s'est exprimée clairement, elle doit être respectée.

Pour éviter toute contestation, dans le cas où le bail serait conçu comme nous venons de l'indiquer, nous conseillons : 1° de ne pas désigner l'année de chasse à l’expiration de laquelle le bail prendra fin uniquement par l'indication de l'année de l'ouverture, mais par celle des deux années sur lesquelles chevauche la période de chasse ouverte ; 2° de bien préciser s'il s’agit de la date de la fermeture générale ou de celle de la fermeture de la période supplémentaire accordée pour procéder à la destruction des animaux nuisibles, des difficultés se produisant parfois sur l’un et l'autre point. Une bonne formule consisterait à indiquer que le bail prendra fin à la date de la clôture générale de la chasse de l’année 1949, laquelle surviendra en janvier 1950, sans tenir compte de la période supplémentaire qui pourra être accordée pour procéder à la destruction des animaux nuisibles.

Paul COLIN.

Docteur en droit,

Avocat honoraire à la Cour d'appel de Paris.

Le Chasseur Français N°648 Février 1951 Page 66