Ces trois petits rongeurs de tailles et d'allures
différentes ont tellement de points communs au point de vue biologique qu'il
faut les grouper, les procédés de destruction qui leurs sont applicables étant
identiques. Voici leurs caractères généraux afin de les distinguer :
Le loir. C'est le plus gros des trois ; il
mesure de 26 à 28 centimètres de longueur totale (bout du nez à l'extrémité de
la queue). La queue mesure 13 centimètres, elle présente des poils de longueur
égale séparés par une raie (vue d'en dessous). Le poids varie de 160 à 200
grammes. L'allure générale est celle d'un petit écureuil trapu, mais la couleur
générale en est gris cendré foncé au-dessus, blanc jaunâtre en dessous (gorge
et ventre). Deux grandes oreilles aux poils ras font saillie de chaque côté de
la tête. Les joues sont blanc ocré et le tour des yeux gris foncé. Les yeux
sont gris, noirs et saillants. Les pattes postérieures, les plus longues,
présentent cinq doigts, contre quatre aux pattes antérieures. Tous ces doigts
sont munis de griffes recourbées faites pour le grimper. De fortes moustaches
ornent le museau, dont le nez est couleur chair. C’est en avril que se forment
les couples, quatre à cinq petits naissent en juin dans un nid sphérique perché
de 16 centimètres de diamètre et ouvert en haut.
Le lérot. (rat lérot, rat baillet, rat bouchot, rat baillard,
etc ..., c'est le plus connu et le plus nombreux). Plus petit que le
loir, il n'atteint guère que 21 centimètres de longueur totale, dont 10 centimètres
de queue. Il pèse de 10 à 150 grammes selon la saison. Il ressemble plus à un
rat qu'à un écureuil, dont il n'a ni la tête, ni la sveltesse, ni la queue.
Gris-perle à brun fauve dessus, blanc dessous, sa tête offre un masque noir
entourant les yeux et s'étendant sous les oreilles. La gorge est blanc
jaunâtre. La moustache noire et blanche, longue, est placée en bout de museau.
La queue à poils courts, brune dessus, est terminée par un pinceau blanc. Les
pattes antérieures sont très courtes. Les petits naissent en mai-juin dans un
nid confectionné ou pris à des oiseaux, (moineaux), ils sont au nombre de
quatre à cinq.
Le muscardin. Le plus petit des trois, mesurant 15
centimètres de longueur totale, dont 7 centimètres de queue. Fauve sur le dos,
blanc jaunâtre sur le ventre, il a l’allure de l'écureuil. Son poids varie de
90 à 110 grammes. La queue est rousse, mince et grêle, a poils égaux. L'oreille
est petite et très velue. Les petits sont au nombre de quatre.
Le muscardin est le plus petit et le moins répandu,
puis le loir, plus sauvage, et enfin le lérot, qui vit auprès de
l'homme et est le plus nombreux et dangereux pour les vergers qu'il saccage.
Ces trois animaux s'endorment d'octobre à avril dans un nid
qu'ils ont aménagé à cet effet et se réveillent dès que la température est
voisine de 12°. La reproduction a lieu dès le réveil. Leur fourrure n'a aucune
valeur commerciale.
Appâts. Ils sont identiques pour les trois, on y
trouve :
Les fruits à noyaux : cerises, pêches, prunes, abricots.
Les fruits à pépins : poires, figues, pommes, raisins.
Les fruits à coques : noix, noisettes, châtaignes, glands, puis les faines et senelles.
Le contenu des nids d'oisillons ; œufs ou petits (nids
perchés, nids en troncs d’arbres, nids à terre, œufs et produits d'élevage).
Puis parmi les divers : biscuit, pain d'épice, croûtons frits dans la
graisse, gruyère, cube de lard, fruits séchés, bougies, suif, etc …
Habitudes. Tous sont crépusculaires et nocturnes,
effectuant leurs randonnées aussi bien par nuit noire que par clair de lune.
Tous, excellents grimpeurs, font leurs déplacements plus dans les branches qu'à
terre, parcourant les arbres et les crêtes de murs, de préférence aux sentiers
et à la base des clôtures. Tous ont la manie d'entamer les fruits sans y
revenir pour les achever et de choisir parmi les plus beaux et les premiers à
maturité. Dans les nids, ils croquent incomplètement les poussins, où vident
tous les œufs et souvent s'installent dedans pour digérer ou y habiter, mais
jamais ils ne jettent le nid à terre, ce que fait régulièrement la pie. Les
nichoirs artificiels posés par l'homme sont tous visités et vidés.
Habitations. Ces rongeurs ont au moins deux gîtes
dans le cours de l'année ; le nid où ils hibernent d'octobre à avril et
les nids qu'ils occupent dès avril (nids dont ils se sont emparés plus souvent
qu’ils ne les ont construits). Si les nids sont leur œuvre, ils mesurent 15 à
16 centimètres de diamètre intérieur et sont faits de mousse, lichens, herbes
sèches ou écorces tressés en forme de boule. Le muscardin et le loir profitent
des trous des arbres creux et les aménagent. Le lérot profite de trous de murs,
de fentes rocheuses garnies de lierre grimpant, ou même niche dans les greniers
des habitations, surtout si les murs sont couverts de lierre, vigne vierge ou
autre plante grimpante. Les nids sur les arbres sont souvent sur les
noisetiers. Les nids édifiés dans les arbres par les moineaux (boules de foin
de 25 centimètres de diamètre) sont, après nettoyage du contenu par le lérot,
transformés en gîte confortable lui servant de nid.
Moyens de lutte. On ne peut dire destruction, car ils
sont tous incomplets. Le ménagement de leurs ennemis : rapaces nocturnes,
fouines, martres, chats (qui les tuent sans les dévorer), s'impose, puis
viennent la carabine, le poison, les pièges, ces trois moyens à employer dès le
mois de mai.
Carabine. De calibre 9 millimètres à plombs n°7 ou 8,
employée à l'affût au crépuscule ou au clair de lune en surveillant une crête
de mur qui se découpe bien sur le ciel, elle donnera quelques victimes. Les
rongeurs sortent jusqu'à la nuit. L'emploi de la carabine et d'un phare de nuit
dans les vergers visités en donnera d'autres, mais ne pourra être pratiqué
longtemps, car les rongeurs videront les lieux. Ce procédé ne peut être
légalement employé en tous temps que dans les vergers entièrement clos attenant
à une habitation.
Poison. Très vanté par des gens qui ne l’ont pas on
peu employé. En pratique, les résultats sont maigres, quel que soit le toxique
employé (noix vomique ou phosphure de zinc). Voici les principaux tours de main :
a. Empoisonner quelques pruneaux ou figues enfilés
par un mince fil de fer et pendre dans les arbres en hauteur en plaçant un
fruit différent de ceux produits par l’arbre (prune dans un poirier).
b. Faire une omelette avec un œuf battu, un dé de
graisse et 0gr,5 de sulfate de strychnine saupoudré, faire cuire et découper en
cent cubes. On place un cube sous un abri (grain, tuile, trou) après l'avoir
saupoudré de sucre. C'est sur la crête des murs qu'on opère et également en en
posant à la fourche des grosses branches (piquées par une épingle).
c. On empoisonne quelques fruits (prunes, cerises)
qu'on fixe sur les fourches de branches par une épingle. Ce qui peut être
dangereux par la suite.
L'écueil de l'emploi de poison réside dans le fait que les
rongeurs ne dévorent jamais la totalité du fruit attaqué, évitant ainsi le
toxique des fruits non imprégnés en totalité.
d. On empoisonne de petits cubes de lard ramollis par
la chaleur et on les pique, comme indiqué plus haut, par une épingle.
C'est en mai qu'on réussit le mieux. N'opérer que dans les
vergers où les volailles ne vont pas et dans les jardins constituant des enclos
attenants à des habitations.
Les pièges. Ils sont tous employés avec un appât,
sauf quelques tapettes à palette, placées à des passages connus : faîtes
de mur de verger, fourches de grosses branches d’espalier, sorties de trou
occupé, etc ... Parfois, en dehors des appâts cités, un noyau suffira
(prune, cerise, amande) ou un croûton frit dans le saindoux, un cube de
gruyère, un petit gâteau sec. Ces derniers plus spécialement réservés au
piégeage dans les habitations. Tous prendront mieux en hauteur que dans le bas
des murs ou des arbres. Les pièges employés peuvent être tendus en tous lieux.
Le matériel consiste en petites tapettes à appât identiques
à celles destinées aux rats (le calibre pour souris est trop faible). En
pratique, le muscardin et le loir sont trop peu nombreux sur un espace
restreint pour être piégés ; il en est tout autrement pour le lérot, qui,
par son nombre et sa concentration autour des maisons, justifie le piégeage.
Les pièges sont placés au faîte des murs ou aux fourches des grosses branches
horizontales ou peu inclinées. On peut en placer quelques unes à la base des
murs et au pied des treilles. On peut en monter sur de petits portiques dans le
genre de ceux destinés aux écureuils, mais plus petits, avec une tapette à
palette au bout et un fruit appât. Ces portiques sont montés à 2 mètres du sol.
Quelques petites plates-formes réussiront également le long des troncs. Les
petits pièges en fil d'acier, ronds, modèle à moineau, ou plus grands de
préférence, sont peu employés ; on les appâte et les tend verticalement
fixés au tronc ou à une grosse branche par deux cavaliers.
Les assommoirs employés sont à ressort, avec fil métallique
servant à tuer l'animal quand il touche à l'appât.
Les souricières, ou mieux ratières à appât (boîtes
grillagées), pourront en prendre quelques exemplaires au sommet des murs, de
même de petites belettières (25 x 10 x 6) appâtées au besoin, ou de petites
nasses en grillage avec goulet d'entrée et appât intérieur.
On peut également faire entrer dans le piégeage la mise en
place dès le mois de septembre de boîtes d'arbres genre nid artificiel à leur
intention, et là où on estime leur présence fréquente. Ces nids sont
parallélépipédiques, avec toit incliné débordant et entrée en terre rond de 4
centimètres de diamètre. On les garnit intérieurement de vieux chiffons de
laine et de plumes. Le couvercle mobile en permet le contrôle au cours de
l'hiver et le ramassage des locataires indésirables qui s'y sont réfugiés. On place
l'entrée vers l'est, et il est inutile de monter un dispositif de fermeture de l’entrée
pour ces faux nids. Mais, au cours de l’été, on pourra monter également des
boîtes d'arbres à fermeture, à condition de les vérifier tous les jours pour
délivrer les oiseaux qui y seraient entrés.
La glu ne donne au point de vue capture aucun résultat, mais
elle empêche les rongeurs de passer sur les troncs ou les grosses branches
fruitières. On la pose sur des bracelets de papier fort de 0m,50 de longueur
ficelés autour des branches. C'est la glu marine qui sert à cet effet :
huile de goudron, 80 + gomme laque en poudre, 160 + caoutchouc coupé fin, 10
grammes. On chauffe doucement et remue sans arrêt jusqu'à fusion complète.
A. CHAIGNEAU.
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