Conformément à l'article 1936 du Code général des impôts, §
3, les demandes (1) doivent être adressées ou déposées au greffe départemental
du Conseil de Préfecture, où elles sont enregistrées. Un accusé de réception
est délivré aux personnes qui en font la demande. Elles doivent être rédigées
sur papier timbré et signées de leur auteur ; lorsqu'elles sont
introduites par un mandataire, elles doivent être accompagnées d'un mandat
régulier qui doit être timbré et enregistré avant exécution de l'acte qu'il
autorise. Les avocats régulièrement inscrits au Barreau, ainsi que les
personnes qui tiennent de leurs fonctions ou de leur qualité le droit d'agir au
nom du contribuable n'ont pas besoin d'une procuration spéciale.
En raison des formalités au cours de l'instruction, que nous
allons examiner, il convient d'apporter une attention particulière à la
rédaction desdites demandes afin d'éviter les complications qui pourraient être
soulevées. C'est ainsi qu'il y a lieu de préciser si le réclamant entend
bénéficier du sursis de paiement pour la partie contestée ; de demander :
la convocation aux audiences du Conseil de Préfecture ; communication du
dossier pour pouvoir déposer des mémoires ampliatifs ou en réplique ;
l'expertise par un ou trois experts (et de désigner d'ores et déjà son expert
en cas d'expertise à trois ; la renonciation aux opérations d'expertise
pouvant se faire au cours de l'instruction). Il importe de bien exposer les
motifs sur lesquels sont basées les réclamations et de ne pas perdre de vue
qu'ils peuvent être développés soit par écrit, au cours de l'instruction, soit
oralement à l'audience du Conseil de Préfecture qui aura à juger le différend.
A l'exception du défaut de signature de la réclamation
initiale, les vices de forme qui ont motivé le rejet d'une réclamation par le
directeur peuvent être utilement couverts dans la demande adressée au Conseil
de Préfecture. Les demandes sont communiquées au directeur des contributions
directes qui fait procéder à leur instruction, ensuite il transmet le dossier
avec ses conclusions au greffe départemental. S'il n'est pas d'avis d'admettre
intégralement les conclusions du réclamant, il informe ce dernier qu'un délai
de vingt jours lui est imparti pour prendre connaissance du dossier, fournir,
s'il le juge à propos, des observations écrites et faire connaître s'il désire
recourir à l'expertise (lorsque la demande introductive d'instance comporte
cette demande expresse, l'avis le précise en demandant si la demande
d'expertise est maintenue). A l'expiration du délai imparti, le dossier est
communiqué au directeur qui examine, le cas échéant, les observations
présentées. Si, à cette occasion, des faits ou motifs nouveaux sont opposés par
le service des contributions directes, le réclamant en est informé par un
nouvel avis de dépôt de dossier pour communication. Tous les mémoires,
observations et conclusions produits devant le Conseil de Préfecture par le
réclamant ou son mandataire doivent être rédigés sur papier timbré.
Conformément à l'article 1939 du Code général des impôts,
les seules mesures d'instruction qui peuvent être prescrites en matière de
contributions directes sont le supplément d'instruction, la contre-vérification
et l'expertise. Le supplément d'instruction est obligatoire toutes les fois où
le contribuable présente, avant jugement, des moyens nouveaux. Lorsque, à la
suite d'un supplément d'instruction, le directeur invoque des faits ou des
motifs dont le contribuable n'a pas eu connaissance, il est procédé à un
nouveau dépôt du dossier. Dans le cas où le Conseil de Préfecture juge
nécessaire d'ordonner une contre-vérification, cette opération est faite par un
agent du service des contributions directes autre que celui qui a procédé à la
première instruction en présence du réclamant ou de son mandataire et, le cas
échéant, du maire ou de son délégué ou des membres de la Commission communale
des impôts directs. L'agent chargé de la contre-vérification dresse procès-verbal,
mentionne les observations du réclamant ainsi que, le cas échéant, celles du
maire ou de la Commission communale des impôts directs et donne son avis ;
ensuite, le directeur renvoie le dossier au Conseil de Préfecture avec ses
propositions.
Expertise.
— Lorsque l'instruction est épuisée sans solution
satisfaisante, le réclamant peut demander au Conseil de Préfecture d'ordonner
l'expertise soit par un seul expert, désigné alors par le Conseil de
Préfecture, soit par trois experts, chaque partie désignant son expert
(administration et réclamant), le troisième étant désigné par le Conseil de
Préfecture. Le Conseil peut également ordonner l'expertise d'office s'il la
juge utile à la manifestation de la vérité.
Sur la désignation des experts se greffe la procédure de
récusation. Chaque partie peut demander la récusation de l'expert du Conseil de
Préfecture et de celui de l'autre partie, le directeur ayant qualité pour
introduire la demande de récusation au nom de l'administration. La demande qui
doit être motivée est adressée au Conseil de Préfecture huit jours francs à
compter de celui où la partie a reçu notification du nom de l'expert dont elle
entreprend la récusation et, au plus tard, dès le début de l'expertise. Elle
est jugée d'urgence après mise en cause de la partie adverse ; le cas le
plus fréquent est la demande de récusation de l'expert du réclamant, par
l'administration qui suppose qu'il a été chargé de produire les réclamations
(s'il n'est pas mandataire, la demande de récusation n'est pas valable).
L'expertise est dirigée par un agent du service des
contributions directes qui fixe le jour et l'heure du début des opérations.
Nous n'entrerons pas, pour aujourd'hui, dans le détail des opérations
d'expertise par un ou trois experts, la rédaction du ou des rapports et leur dépôt
, nous verrons cela au cours d'une causerie spéciale. Notons seulement que le
Conseil de Préfecture n'est nullement tenu de prendre en considération les
conclusions du ou des experts et nous supposerons que les opérations ont été
régulières.
Le procès-verbal des opérations d'expertise et les rapports
des experts sont déposés au greffe départemental du Conseil de Préfecture où
les parties, dûment avisées, peuvent en prendre connaissance pendant un délai
de vingt jours francs et produire tous mémoires qu'elles jugent à propos dans
le même délai. Le directeur des contributions directes peut, au cours de
l'instance, présenter toutes conclusions reconventionnelles tendant à
l'annulation ou à la réformation de la décision prise sur la réclamation
primitive. Ces conclusions sont communiquées au réclamant, par la voie du dépôt
de dossier, comme nous l'avons vu ci-dessus.
Jugement ou décision.
— La décision du Conseil de Préfecture, lorsque le dossier est
en état, intervient alors en séance publique ou non, suivant la catégorie de
l'impôt en discussion. Elle est signifiée au réclamant par l'Administration des
contributions directes, par lettre recommandée avec accusé de réception. Si le
contribuable obtient satisfaction, et sauf appel par l'Administration, tout est
terminé. Dans le cas contraire, il possède un délai de deux mois pour faire
appel au Conseil d'État. Le ministre des Finances peut faire appel des arrêtés
des Conseils de Préfecture rendus en matière de contributions directes et de
taxes de toute nature assises par le service des contributions directes.
Ernest-Bertin MARILLER.
(1) Voir Le Chasseur Français de novembre 1950.
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