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Les instruments de musique "sonores"

orsque l'on veut étudier les instruments de musique, la première difficulté rencontrée réside dans leur groupement.

Il est facile de parler d'instruments à cordes, en cuivre, à percussion, etc., mais pratiquement cela ne veut pas dire grand'chose, car ce classement est effectué partant de la construction et non en fonction de notions techniques ou scientifiques des éléments produisant les sons. On connait sur ce sujet la boutade du grand Ravel en face d'un carillonneur, demandant si, après tout, une cloche n'était pas un instrument à corde, puisque pendant longtemps l'orgue n'était rien de plus qu'un « instrument à clavier » non distingué du clavecin.

Le groupe le plus complexe est celui des instruments sonores par eux-mêmes, c'est-à-dire en raison de leur propre texture, tels les gongs, les cloches (métalliques) ou les tambours et leurs dérivés (membranes vibrantes).

Si le sol fouillé par les archéologues n'a pas conservé à travers les âges des documents incontestables, on peut cependant, en considérant le comportement des peuples sauvages actuels, supposer quels étaient les instruments des peuples primitifs.

Ceux-ci surent parfaitement que l'entrechoc de deux pierres, de deux morceaux de bois, de deux éléments de métal produisait un son. De même, la coque d'un gros fruit desséché et frappé.

L'introduction dans une petite calebasse de grenaille donna le hochet ; celle-ci, remplacée par un unique petit caillou, fournit le grelot. Plus grosse, sectionnée et nantie d'un battant, elle donna une clochette. Coupée par la moitié, suspendue et frappée, elle devint gong.

En présence de nos instruments perfectionnés et judicieusement étudiés, même en ces simples instruments, il faut toujours avoir présentes à la mémoire ces origines très simples provenant d'adaptation de produits végétaux.

Toutefois il est incontestable que de ces quatre instruments, celui qui est le plus important est la cloche. Dès le début du premier millénaire avant notre ère, les Chinois savaient fondre des cloches et en tirer des sons harmonieux. Ils leur donnaient une forme aplatie, ovale, et les décoraient d'ornements magnifiques. En Occident, la cloche fut très peu connue jusqu'à son emploi à peu près exclusif dans les rites chrétiens, et seulement au VIe siècle.

Le plus ancien instrument de cette catégorie est le sistre. Il paraît en Egypte à l'époque de la simple nilotie, c'est-à-dire avant que ne s'établisse la notion de nation égyptienne. Il était composé d'une calebasse formant caisse amplificatrice de son, au bout de laquelle se situait une tige sur laquelle s'enfilaient une ou plusieurs rondelles ou coques de fruit. Dans le présent, le tambourin espagnol avec ses petites cymbalettes dans l'anneau de monture utilise le même principe.

Les cymbales proprement dites étaient connues des peuples anciens de l'Orient classique ou Archasie. Hébreux, Akkadiens, Hittites, Mitaniens les utilisèrent. Mais elles étaient alors très bombées, en forme de calotte sphérique, avec des bords épais et plats. Elles étaient jouées soit par paires, soit par unité, à la manière des gongs.

On a baptisé du nom de phonoxyles les instruments de bois dont on tirait des sons. Leur matière très périssable n'a pas permis au sol de les conserver, et on en est réduit aux déductions d'après les représentations figurées. Ce n'est qu'au XVIe siècle que paraît le premier véritable xylophone.

Tout ce que l'on peut reconstituer, c'est la planche sonore placée au-dessus d'une caisse de résonance, une calebasse géante si elle est courte ou une fosse en terre si elle est longue. On en tirait des sons de diverses manières : par percussion cadencée, par basculement et heurt d'un piquet, par piétinement.

Connaissant les propriétés sonores du bois, les primitifs passèrent au tambour de bois, simplement constitué par un fût d'arbre évidé et dont ils avaient cloisonné les extrémités. Chez les sauvages actuels, on en trouve encore qui dépassent 10 mètres de long.

Sur ces tambours, le découpage de lamelles de largeurs, épaisseurs et longueurs différentes donnant de ce fait des sons variés permit de composer le premier xylophone. Ce dernier devait avoir sa forme définitive par détachement total des lamelles et leur fixation dans un cadre de dimension croissante. Le xylophone est avec la harpe le plus ancien instrument connu.

Les métallophones sont au métal ce que les phonoxyles sont au bois. Ils sont extrêmement anciens, quoique postérieurs aux précédents, puisque l'âge du métal succède à l'âge du bois. On possède un tambour de bronze indo-chinois datant du premier millénaire.

Le gong est très simplement une cymbale isolée que l'on percute. Il y en a de légers et maniables, mais le plus grand nombre doivent être suspendus en raison du poids. Comme pour les xylophones, on pensa à les réunir suivant des dimensions différentes, et l'on possède des ensembles archaïques d'une vingtaine de gongs.

En Occident, à l'inverse de l'Orient, le gong n'a jamais eu une grande faveur, et il faut attendre la composition de la Marche funèbre de Mirabeau par Grossec pour le trouver prévu dans une partition.

En conclusion, les métallophones ne sont point des instruments spéciaux. Ce ne sont que des phonoxyles, où le métal a remplacé le bois. Une éruption volcanique de 915 à Java permet de savoir qu'en cette contrée leur pratique était déjà fort étendue.

Dans la musique actuelle, Haendel et Mozart ont donné droit de cité aux métallophones et aux gongs dans l'orchestre : le premier dans son Saül, le second dans La Flûte enchantée.

Bien que peu connue, on doit citer la guimbarde, formée d'une petite lame de bois ou de métal que l'instrumentiste tient devant ses lèvres en modelant des sons. Cet instrument métallique ou ligneux est l'ancêtre du modèle actuel à vent, à hanche libre.

Le tambour est à l'origine une plaque d'écorce posée sur une fosse de terre et que l'on piétine. Plus petite, on la place sur une grosse calebasse, et progressivement on lui substitue une peau séchée et tendue. Ce tambour primitif est frappé à la main nue ou tenant une baguette. Le premier mode subsiste dans le tambourin basque et le second est devenu classique.

La grosse caisse est différente du tambour courant en ce sens que ses deux cotés sont percutés. Son origine est orientale et turque, car elle était très employée dans la musique militaire des janissaires. Mozart et Haydn l'introduisirent au XVIIIe siècle à l'orchestre.

La timbale est constituée d'une peau tendue par des clefs sur un bassin hémisphérique en cuivre. Cette peau présente la particularité de montage d'être réglable par des cercles, actionnés par une pédale, qui diminuent le diamètre sonore. De là, des intonations déterminées et variables ... On les joue par paires. Leur origine d'introduction à l'orchestre remonte au Requiem de Berlioz et au Sacre du Printemps de Strawinsky.

Le tambour classique reste toutefois le plus important des instruments à membranes. Il est très ancien, et on retrouve sa mention dans les Mémoires de Joinville au sujet de la Première Croisade de Saint Louis. Son évolution a été très lente. Au début, il s'agissait d'une simple peau fixée sur un cadre par des épines ou prolongée jusqu'à la base. L'aboutissement a été le montage de deux peaux sur un cylindre avec des liens réunissant les deux pour équilibrer et unifier la tension. Les liens de ce laçage sont actuellement réglés par des manchons en en réunissant deux en forme d'Y. Son nom vient de « tabor », que l'on trouve mentionné dans la Chanson de Roland.

Janine CACCIAGUERRA.

Le Chasseur Français N°648 Février 1951 Page 119