Au cours de notre précédente causerie, nous avons passé en
revue le matériel de camping qui convenait le mieux au canoéiste. En ce qui
concerne son utilisation, vous trouverez, à défaut d'expérience, de nombreux
ouvrages consacrés à la technique du camping, qui reste sensiblement la même
quel que soit le mode de locomotion utilisé ; le sujet est, du reste,
parfaitement traité dans cette revue même. Nous nous limiterons à fournir
quelques précisions sur le transport du matériel et l'adaptation du camping à
la croisière.
Tout ce qui craint l'humidité doit être enfermé dans des
sacs rigoureusement étanches constitués par une couche de caoutchouc enfermée
entre deux épaisseurs de tissu avec bandes gommées collées sur les coutures.
Ils sont cylindriques et fermés hermétiquement par plusieurs tours d'un sandow
ou d'une corde de coton qui accentuera le serrage une fois mouillée. Ces sacs
sont fragiles et il est bon de les protéger par une enveloppe de toile ou,
mieux, un deuxième sac caoutchouté usagé. Prévoir des sacs de 1 mètre x 0m,35
de diamètre pour le gros matériel, un de 0m,50 x 0m,30 pour chaque équipier, et
un à la dimension de la tente.
Il existe différentes façons de charger un canoé, mais la
stabilité impose de placer les plus lourdes charges, sinon la totalité du
matériel, au centre du bateau. Voici la figure d'une méthode classique,
généralement utilisée :
Sac A. — Linge et vêtements de rechange ; couchage.
Sac B. — Tente.
Sac C. — Vivres et popote.
Sac D. — Filet renfermant les bidons et les ustensiles de cuisine ne craignant pas l'humidité.
Sac E. — Poche à eau, bien calée sous le barrot central et entre les sacs.
Sac F. — Chariot, plié ou démonte.
Sacs G, G'. — Sacs d'équipiers contenant les vêtements pour la journée, appareil photo, etc ...
Sac H. — Filet contenant fruits et légumes fragiles, bien protégé sous le pontage avant.
Tout doit être attaché au bateau et ne pas risquer de partir
à la dérive en cas de dessalage. Les charges lourdes, sacs A, B et C, ainsi que
le chariot seront arrimés au fond pour ne pas compromettre l'équilibre en se
déplaçant.
Avec le matériel ainsi réparti, chaque équipier a, à portée
de la main, dans son sac personnel les objets nécessaires au cours de la
journée. Le sac C ne sera ouvert qu'à l'heure du déjeuner et les sacs A et B
seulement en fin d'étape. Il est bon de prévoir un sac alpin sans armature pour
les promenades pédestres ; il trouvera sa place dans le sac C. La
pharmacie la documentation et les menus objets susceptibles d'être parfois
utilisés au cours de la journée peuvent être rangés à demeure dans les poches
de ce sac.
Pour faciliter le ravitaillement et ne pas être obligé
d'enlever le pontage et d'ouvrir le sac à vivres en cours de route, il est
utile d'avoir en réserve un grand sac étanche, que l'équipier arrière placera
devant lui une fois le ravitaillement effectué. Un rangement plus judicieux des
vivres sera fait à l'heure du déjeuner ou le soir.
Se munir d'un étui transparent, étanche, pour la carte et le
guide ; enfermer de préférence l'appareil photographique ou la caméra dans
un sac spécial ou une boîte étanche.
De trop nombreux canoéistes consacrent un temps excessif au
rangement du matériel le matin, puis au ravitaillement et à la préparation du
déjeuner au cours de la journée. Pour compenser, ils prolongent l'étape le soir ;
l'emplacement de camp est plus ou moins mal choisi et le dîner s'achève généralement
à la nuit : il en résulte une fatigue excessive et quelques menus travaux
inachevés qui, le lendemain, retarderont d'autant le départ.
Deux méthodes sont à envisager, suivant qu'il s'agit d’une
croisière rapide de deux ou trois jours ou des vacances. Dans le premier cas,
surtout s'il s'agit d'une croisière de début ou de fin de saison sur une
rivière coulant en gorges, les matinées sont froides ; il est nécessaire
de récupérer la fatigue d'une nuit de chemin de fer et l'on ne peut envisager
de départs très matinaux ; le soir, la nuit tombe vite et il faudra
s'arrêter de bonne heure. Pour perdre le moins de temps possible en ravitaillement,
prévoir dès le départ le plus possible de vivres concentrés ; précaution
d'autant plus utile qu'au moment des fêtes, comme c'est généralement le cas
pour ces croisières, vous trouverez beaucoup de boutiques fermées. Puisque vous
partirez tard dans la matinée, vous aurez le temps d'absorber un petit déjeuner
copieux — mais non indigeste, — qui vous permettra de « tenir le coup »
la journée entière en consommant, si la faim se fait sentir, quelques aliments
reconstituants que vous aurez pris la précaution d'enfermer dans votre sac
d'équipier pour éviter tout déballage inutile.
En agissant ainsi, vous terminerez votre étape sans perte de
temps ni fatigue inutile vers 16 ou 17 heures. Vous aurez la faculté de choisir
un bon emplacement, de préparer un dîner substantiel et de profiter d'un long
repos qui effacera les fatigues de la journée.
En vacances, les jours sont longs et il est préférable de
partir tôt pour éviter la grosse chaleur du milieu de la journée. Vous
effectuerez donc la plus grande partie de l'étape prévue au cours de la
matinée. L'arrêt de midi peut se prolonger plus ou moins suivant la distance à
parcourir ou la température, mais il est toujours préférable, pour conserver
une bonne condition physique, de déjeuner sobrement. L'après-midi, n'attendez,
pas qu'il soit tard pour chercher un emplacement de camping ; au besoin,
écourtez l'étape dès que vous apercevrez le coin solitaire idéalement placé.
Ainsi vous jouirez d'agréables heures de détente en effectuant sans hâte les
menus travaux du camp. Le principe d'une étape très courte l'après-midi devient
une nécessité sur les rivières — très nombreuses — orientées au sud-ouest, où
la réverbération du soleil rend la navigation pénible et dangereuse en fin de
journée.
La bonne conduite d'une croisière et l'emploi judicieux d'un
matériel bien adapté à vos besoins doubleront les joies que vous pouvez
attendre de ce mode de camping, qui est l'un des plus agréables.
G. NOEL.
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