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Engrais de printemps

Rappelons-nous d'abord l'effet des divers engrais utilisés : les engrais azotés favorisent le développement des tiges et des feuilles ; les engrais phosphatés donnent de la vigueur aux racines, contribuent à former l'armature des tiges et activent la maturation des fruits ; les engrais potassiques contribuent à la formation des amidons et des sucres dans les racines, les tiges, les fruits ; enfin la chaux active et complète l'action des différents engrais. Mais, pour arriver au meilleur rendement, il est nécessaire et prudent de les employer à bon escient. Quels sont donc ceux qu'on peut employer au printemps au potager ?

1° Engrais dont l'emploi est possible au printemps au jardin.

— En raison de leur grande solubilité et du manque de retenue par le pouvoir absorbant du sol, tous les nitrates peuvent être utilisés à cette époque. Assimilés directement par les plantes, leur action est rapide : aussi donnent-ils vite un « coup de fouet » à la végétation, surtout quand elle est languissante, chétive. Le plus utilisé est sans conteste le nitrate de soude. Sa grande solubilité (un litre d'eau à 10° dissout 820 grammes) fait que, la terre étant presque toujours assez humide pour en assurer la dissolution, son emploi en couverture est possible : on peut donc se contenter de l'étendre simplement à la surface du sol ; mais il sera toujours préférable de l’enfouir par un léger binage. En raison d’une certaine causticité et pour éviter son entraînement par les pluies de printemps, le mieux sera de l’appliquer en trois fois : avant le semis ou les repiquages et les deux autres à trois semaines d’intervalle. La dose est de 0kg,500 à 1kilo à l’are. L'action est prompte : à peine quinze jours après l'épandage, on peut constater l’efficacité.

Mais, si la terre de notre jardin est peu calcaire ou trop acide, on remplacera fort utilement le nitrate de soude par le nitrate de potasse ; aussi soluble, mais mieux retenu par le sol, il s'emploie de façon identique. Son prix plus élevé, en raison d'une richesse plus grande, restreint son emploi ou ne le fait utiliser que pour arrosages.

Renfermant par moitié, en même temps de l'azote nitrique et ammoniacal, le nitrate d'ammoniaque est d'une action plus durable et plus riche que les deux précédents. L'emploi recommandé se fera en couverture à raison de 2 kilos à l'are.

Remarque pratique importante.

— En raison de leur causticité pour le feuillage, principalement en période sèche, on évitera de les répandre à la volée sur un carré semé ou repiqué à cause des risques de brûlure. Le mieux est donc d'épandre soigneusement entre les lignes et de donner un léger binage.

2° Engrais non enfouis à l’automne et pouvant encore être utilisés au printemps.

— Le sulfate d’ammoniaque s'emploie à la dose de 2 à 4 kilos à l'are en couverture ou quand on bêche, environ un mois avant que les racines des plants ne soient à même de se l'assimiler. C'est qu'en effet l’ammoniaque contenu a besoin de se transformer en azote nitrique, sous l'influence des ferments du sol, en vue de l’absorption par les plantes. Mais, si la terre du jardin est dépourvue de calcaire, il peut être plus facilement entraîné dans le sous-sol au détriment des racines des légumes à fumer. L'action de cet engrais est plus lente mais plus prolongée que celle des nitrates ; il remédie légèrement à la pénurie de fumier.

Le sulfate de potasse s'emploie à la dose de 2 à 3 kilos à l'are, surtout en terre argileuse, compacte.

Enfin les superphosphates de chaux seront utilement employés, en mars, à la dose de 4 à 5 kilos à l'are.

Nouveau mode de fumure.

— Il a pour but de produire un maximum de récoltes, de régulariser la fertilité de toutes les parties du potager, de ne cultiver les mêmes légumes dans le même carré qu'à périodes régulières (tous les trois ans par exemple) et d'établir un ordre assez parfait de ces cultures avec destruction plus rationnelle des mauvaises herbes.

A cet effet, établissons un assolement simple et rationnel.

    Première année : plantes à feuilles, fruits et rhizomes, en l'espèce choux, tomates, pommes de terre, poireaux, etc. ...

    Il leur faut une forte fumure azotée : avec la fumure d'hiver, soit 400 kilos de fumier bien fait à l'are, on enfouira au labour de printemps par are :

    Scories sèches de préférence superphosphates 4 à 5 kilogrammes
    Sulfate ou chlorhydrate d'ammoniaque 2 à 3 ==
    Sulfate de potasse (à défaut chlorure) 1,5 à 2 ==

    Cette formule convient parfaitement en bonne terre franche ; -en sol argileux, on remplacera les sels ammoniacaux par 3 ou 4 kilos de nitrate de soude, ou, si possible, par 3kg,500 à 4kg,500 de nitrate de chaux.

    Deuxième année : en remplacement des légumes ci-dessus, racines ou bulbes (oignons, carottes, navets, etc.).

    Incorporer au labour d'emploi, sans fumier et par are :

    Scories ou superphosphates 5 kilogrammes
    Sulfate d'ammoniaque 3 ==
    Sulfate de potasse (à défaut chlorure) 2 ==
    Nitrate 1 kilogramme

    Troisième année : les légumineuses, fèves, pois, haricots, etc., prennent la place des racines ou des bulbes. Incorporer au sol, toujours sans fumier et par are :

    Scories ou superphosphates 4 kilogrammes
    Nitrate 2 ==
    Sulfate d'ammoniaque 1 kilogramme
    Sulfate de potasse 2,5 kilogrammes
Remarques importantes.

- 1° Les légumineuses n'assimilant l'azote atmosphérique qu'à partir de leur floraison, il faut leur donner une abondante nourriture nitrique pendant leur première végétation ;

- 2° Pour les légumes produisant plusieurs années de suite (artichauts, fraisiers et qu'on ne devrait conserver à la même place que trois ans), on leur donnera au printemps et par are l’engrais de la formule suivante :

Super ou scories 5 kilogrammes
Poudrette (ou autre : guano, sang desséché, etc.) 8 ==
Sulfate de potasse 3 ==
Nitrate 1 kilogramme

- 3° Enfin on complétera de façon heureuse cette alimentation normale des plantes par une « suralimentation » d'été lors des arrosages à cette saison (cf. Chasseur Français, n° 627, mai 1949, p. 457).

Ainsi l'amateur emploiera les engrais de printemps en tenant compte de la rapidité d'action qu’il veut obtenir, des propriétés du sol, des cultures tentées et enfin du prix de l'unité.

BOILEAU.

Le Chasseur Français N°651 Mai 1951 Page 289