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La conduite du tracteur

Conseils pratiques

Un des avantages les plus importants du tracteur à roues pneumatiques est de pouvoir être utilisé aussi bien pour les travaux des champs que pour les charrois. Mais, lorsqu'un tracteur circule sur la route, attelé à une remorque chargée de plusieurs tonnes, le poids du tracteur est relativement faible par rapport à celui de la remorque, et ce déséquilibre impose au conducteur des règles de prudence qu’il ne doit pas enfreindre, faute de quoi des accidents très graves peuvent se produire.

Il doit tout d'abord observer le code de la route et appliquer les règles communes à la conduite de tout véhicule. En outre, il est indispensable qu'il ralentisse avant d'aborder un virage, et ceci notamment pour éviter, pendant l’action du différentiel, que la remorque chargée ne vienne pousser dangereusement le tracteur et ne provoque un tête à queue, voire un retournement de l'ensemble. Aussitôt le virage amorcé, il est bon de donner un coup d'accélérateur afin que l'action des roues motrices facilite le virage.

Le conducteur doit toujours se souvenir que le poids de sa remorque chargée est très supérieur à celui de son tracteur. Il doit donc se garder plus que tout autre conducteur des excès de vitesse. Une loi physique nous dit que la masse à freiner augmente en raison directe du carré de la vitesse, c'est-à-dire dans une proportion extrêmement importante. Un exemple nous le fera mieux saisir : un tracteur emmène à 14,400 Km à l'heure une remorque dont la charge et son propre poids donnent une masse de 7.000 kilogrammes, il effectue donc 4 mètres à la seconde, la masse en mouvement à freiner sera de (7000 x 42) / (9,80 x 2) = 5.714 kilogrammes (9,80 est l'expression de la tonne-poids dans le système M. T. S.). Si un conducteur imprudent marchait à 28,800 Km à l'heure, soit 8 mètres à la seconde, la masse à freiner serait de 22.857 kilogrammes. Une telle masse a une telle vitesse, dans une pente, serait impossible à freiner, et la catastrophe deviendrait inévitable.

Aussi, avant de s'engager dans une descente, le conducteur prudent mettra son tracteur en première vitesse. Toutefois cette manœuvre ne devra jamais être effectuée en cours de descente : le conducteur ne pourrait pas, en effet, passer à coup sûr à la vitesse désirée.

En première vitesse, le moteur freinera la charge. En outre, nous recommandons de couper l'allumage ou d'arrêter les pompes s'il s'agit d'un diesel; le moteur freinera davantage et ainsi la remorque aura plus de difficultés à entraîner le tracteur : il suffira au conducteur de se servir des freins de sa remorque pour amener sans incident son chargement jusqu'au bas de la pente.

D'une façon générale, il est recommandé d'éviter d'utiliser les freins du tracteur quand ce dernier est attelé à une remorque chargée. Dans tous les cas, il faudra serrer ceux de la remorque afin d'éviter que celle-ci ne vienne pousser le tracteur, se place en travers de la route ou se replie contre lui et provoque un accident grave.

Il peut arriver qu'une roue se trouve sur un sol mou, bas côté défoncé d'une route par exemple, et l'autre sur le macadam. La roue tournant sur le sol mou a tendance à patiner, à creuser un trou, à s'enfoncer. Dans ce cas, il ne faut jamais donner de coups d'accélérateur ; en effet, la roue tournerait plus vite, s'enliserait davantage et, si un corps dur était rencontré, le pneu risquerait de se détériorer immédiatement.

Pour éviter cet incident, le conducteur doit dételer son tracteur, le sortir seul, le placer sur un sol ferme, puis, à l'aide d'une chaîne, dégager la remorque et ensuite réatteler. Si le tracteur est muni d'un blocage du différentiel, il pourra être avantageusement utilisé dans le cas où la remorque est enlisée, mais il faudra avoir soin de maintenir la direction en ligne droite pendant tout le temps nécessaire au dégagement de l'attelage, le différentiel une fois; bloqué ne permettant plus de virer (tout le mécanisme du différentiel est supprimé pendant le blocage, et les deux roues, sont directement actionnées. ensemble et à la même vitesse par le moteur). Si à ce moment on braque les roues avant, elles continueront quand même à avancer dans la direction imposée par les roues motrices arrière et les roues directrices risqueraient d'être faussées.

Pour terminer, nous dirons un mot de la conduite du tracteur en forêt, où le terrain est, en général, inégal et mauvais. Il convient de prendre le maximum de précautions afin d'éviter de verser et de détériorer son tracteur et surtout les pneus en roulant sur les souches. Si la charge à tirer se trouve dans un bas-fond où il sera impossible ou dangereux d'aller la chercher avec le tracteur, on aura recours au mouflage. C'est-à-dire qu'un moufle dont une extrémité sera fixée au tracteur sera placé à un arbre se trouvant au point le plus élevé du bas-fond, et l'autre extrémité sera attachée à la charge à remonter. Dans ces conditions, l'effort demandé au tracteur ne dépassera pas ses possibilités, et il travaillera en toute sécurité.

G. DELALANDE.

Le Chasseur Français N°651 Mai 1951 Page 294