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Causerie médicale

La cellulite

Ce terme, aujourd'hui à la mode, n'a pas toujours été trouvé très heureux ; de par sa désinence il éveille, en effet, l'idée d'une inflammation aiguë, par analogie avec adénite, lymphangite, phlébite, etc.

Il s'agit, en l'occurrence, de l'inflammation chronique du tissu cellulaire ou du tissu conjonctif interstitiel, caractérisé par la présence d'indurations ou de nodosités tissulaires, de placards indurés ou d'empâtements œdémateux ; la réaction du tissu cellulaire qui aboutit à ces productions n'est pas sans analogie avec ce qui se passe lors d'une cicatrice, lorsque le tissu conjonctif vient réparer une perte de substance. On a considéré que l'épaississement du tissu cellulaire est un trouble trophique secondaire à une irritation, à une névrite des fibres nerveuses sympathiques tenant sous leur dépendance la nutrition, la vitalité de ce tissu, dont l'importance ne se limite pas à un simple rôle de soutien, de remplissage.

Dans sa première phase, le plus souvent inaperçue, on a trouvé une simple dilatation des petits vaisseaux autour des cellules adipeuses ; cette vaso-dilatation s'accompagne d'un exsudât qui peut se résorber ou qui donne lieu à un nodule cicatriciel, signe principal de cette affection.

Lorsque la cellulite affecte le tissu cellulaire sous-cutané, le diagnostic est généralement facile ; mais ces lésions cellulaires peuvent aussi se présenter dans la profondeur, autour des organes digestifs et surtout génitaux, chez la femme ; ces périviscérites nécessitent un examen spécial qui appartient aux spécialistes de ces affections.

Dans les cas superficiels, le palper présente un épaississement, un état lardacé des tissus superficiels, en l'espèce du tissu cellulaire sous-cutané. Aux niveaux soupçonnés d'après le siège et la nature des douleurs accusées par le malade, la pression, la friction, le malaxage réveille cette douleur et permet de reconnaître l'infiltration.

Ce palper, qu’on a qualifié de masso-diagnostic, montre dans le tissu interstitiel une infiltration, par placards diffus ou conglomérés, ou des nodosités irrégulières, mal délimitées, de volume allant de celui d'une tête d'épingle à celui de billes de la grosseur d'un petit pois, ou d'une noisette, même d'une noix. On a parfois la sensation d'un amas de lentilles tassées les unes contre les autres ; en faisant rouler ces infiltrats sous le doigt, on perçoit souvent une crépitation, comparée, selon son caractère, à celle de la neige, d'une poudre d'amidon, d'une feuille de parchemin froissée entre les doigts. Pendant cet examen, le patient accuse fréquemment un engourdissement, des fourmillements, des brûlures, des piqûres, ainsi que des irradiations à distance.

Les lésions que révèle cet examen peuvent se trouver en de très diverses régions : au cuir chevelu, dans la région temporale ou à la nuque (cas parfois pris pour des migraines), le long des épaules, avec ou non des symptômes de torticolis, aux bras et au creux axillaire, aux membres inférieurs, tout le long de la cuisse et de la jambe, au creux poplité, au thorax dans les régions claviculaire ou scapulaire, donnant des signes de névralgies intercostales, dans la région abdominale où l'on peut hésiter sur le diagnostic de coliques, de crises gastriques, hépatiques, vésiculaires ou même appendiculaires ; on peut aussi songer, chez la femme, à quelque lésion utéro-annexielle. Seul un examen minutieux et approfondi met à l'abri des erreurs de diagnostic, si faciles dans ces cas.

Très souvent, surtout au crâne et à la face, on observe, comme sièges de prédilection, les points d'émergence de quelques nerfs hors de leurs parois osseuses ou l'orifice d'une aponévrose, et cela particulièrement au niveau du trou sous-orbitaire ou à la nuque.

Les causes occasionnelles sont variables. Parfois le malade accuse une contusion ou quelque traumatisme, comme dans le lumbago et le « coup de fouet » (à la jambe) ou encore l'action du froid. Parfois on a une tendance à incriminer un état général, une maladie infectieuse, une intoxication ou encore des troubles endocriniens, plus spécialement rapportés à l'hypophyse ou à la glande thyroïde. Assez fréquemment on constate des insuffisances gastrique, hépatique ou rénale (dans ce dernier cas, avec rétention d'urée et de chlorures).

Le traitement est essentiellement physique, où le massage manuel ou vibratoire tient la première place, tantôt relativement doux, en vue d'améliorer la circulation de la région endolorie, tantôt plus énergique, en cherchant à écraser les nodosités ; les massages sont souvent et utilement associés à des douches d'air chaud. L'électricité intervient sous diverses formes : simple galvanisation ou action calorifique telle que la diathermie, les rayons infra-rouges ; l'ionisation consiste à utiliser le courant électrique pour faire pénétrer à travers la peau des médicaments appliqués en solution à l'un des pôles ; on peut employer des solutions salicylées ou iodo-iodurées. Toujours en applications locales, on a obtenu des résultats avec des bains ou compresses d'eaux salées ou de boues radioactives.

Les révulsifs sinapisés ne sont plus guère employés, mais certains produits sont souvent très utiles en frictions ou, mieux encore, en adjuvance des massages. On se sert de pommade ou d'onguents à base d'iodures, d'aconit, de belladone, et on a préconisé l'utilisation du lierre grimpant, déjà utilisé par des rebouteux et grâce auquel le Dr Leclerc, l'apôtre de la phytothérapie, a obtenu des succès ; il existe des spécialités pharmaceutiques de liniments à base de cette plante.

Les médicaments donnés à l'intérieur ne sont indiqués que par l'état général du sujet ; il ne faut pas attendre de grands résultats des iodures, des salicylates, de l'acide phosphorique ; on a même utilisé des sérums ou des vaccins. Il est plus logique de se contenter d'améliorer le fonctionnement digestif par des infusions chaudes, des cholagogues, des laxatifs en cas de constipation.

On conseille aussi toujours la vie au grand air, les bains de soleil, l'exercice modéré, sans surmenage.

Toutes ces médications, si simples qu’elles soient, ne doivent être appliquées que par un médecin ou sous sa surveillance attentive, car il en est dont l'emploi intempestif ou excessif va à l’encontre du but cherché.

Dr A. GOTTSCHALK.

Le Chasseur Français N°651 Mai 1951 Page 304