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Météorologie

Le Mistral

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Nous voici arrivés au bout de ces causeries traitant sommairement du mistral.

Disons maintenant quelques mots sur les signes annonciateurs de ce vent, quand on n'a pas à sa disposition l'arsenal de renseignements des centres officiels.

Le baromètre seul, nous le savons, n'est pratiquement d'aucun secours pour cette prévision.

Il y a des tempêtes de mistral avec un baromètre indifférent. Le mot « indifférent » indique que cet instrument n'annonce en rien l'arrivée du mistral ni par une baisse, ni par une hausse anormales. Il y a des ouragans de mistral avec un baromètre normal, et il y en a avec des baromètres exceptionnellement élevés depuis plusieurs jours.

Cependant on peut être à peu près certain qu'il n'y aura pas de mistral avec baromètre très bas. C'est une prédiction négative, mais c'est tout de même de la prévision.

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Les pêcheurs estiment que le baromètre haut et la très nette vue de la côte dans tous ses détails sont signes de mistral pour les heures prochaines.

Lorsque, le baromètre restant toujours haut, les Cévennes paraissent légèrement embrumées, on peut annoncer un petit coup de vent de nord à nord-ouest pour le lendemain.

Un coucher de soleil rouge est un signe de mistral pour la nuit ou les premières heures du jour.

Les étoiles très scintillantes donnent une probabilité de mistral pour le lever du jour.

Si, lorsque règne un petit mistral, il y a des effets de mirage, c'est signe d'aggravation de temps par renforcement du vent.

Des cirrus échevelés, orientés ouest à est, sont aussi un bon signe.

De même les cirrus lenticulaires appelés, suivant la région, « os de seiches » ou « ventres de lapins » annoncent une possibilité de mistral un jour ou même deux à l'avance (mais il ne s'agit là que d'une possibilité).

Il y a encore beaucoup d'autres signes avertisseurs de la venue de ce vent. Ils sont tirés du comportement des oiseaux, des animaux domestiques ou sauvages ... Ils n'ont guère d'autre utilité que de donner du travail aux éditeurs d'almanachs, et on retrouve à peu près dans toutes ces règles le travail initial d'« Aratus », qui écrivait, je crois, environ trois siècles avant J.-C. et qui avait copié lui-même je ne sais sur qui.

En plus de tous ces signes, les premiers étant sérieux, les seconds n'étant qu'une plaisanterie, il existe toute une collection de proverbes : n'y croyez pas trop. Ils sont surtout jolis et vous ont une petite apparence de loi du meilleur ton !

Quand, il se lève le lundi

Il dure trois jours ou un.

Quand il se lève le jeudi

I1 dure six jours ou neuf !

Pourquoi ? Rétablissons le texte provençal et nous allons comprendre :

Quouro se lèvo lou dilun

Dura très jours ou un.

Quouro se lévo lou dijôu

Dura sieis jours ou nôu !

On avait purement sacrifié la vérité à la nécessité de la rime, et c'est peut-être là une des bases de la loi dite des « 3, 6, 9 » ! ...

Le parlement, le mistral et la Durance,

sont les fléaux de la Provence ! ...

Évidemment, il s'agissait du parlement de Provence, le parlement actuel ne bornant pas ses « bienfaits » à cette seule région !

En voici encore un où on a sacrifié à la rime :

S'il se lève le jour, il dure trois jours,

S'il se lève la nuit, il dure le temps de faire cuire un pain !

Aucune raison, mais en provençal on disait :

Se se levo lou jour, duro très jours

Se se levo la nué, duro un pan cué !

Et voilà encore une vérité !

Il y a encore des dizaines et des dizaines de proverbes sur ce sujet. Arrêtons-nous là.

J'espère que, à l'avenir, quand votre « poste » parlera de mistral et de tramontane, vous saurez un peu mieux qu'auparavant de quoi il s'agit, et c'est là le seul but que je m'étais proposé.

PYX.

(1) Voir Le Chasseur Français de juillet et octobre 1950, janvier et février 1951.

Le Chasseur Français N°651 Mai 1951 Page 316