En admettant que gardes ou propriétaires de chasses aient
sérieusement purgé leur territoire des nuisibles pendant l'hiver et le
printemps, il ne faut pas croire qu'ils puissent s'endormir sur leurs succès.
Si le piégeage, le poison et les gaz ont fonctionné à plein rendement, il ne
faut pas oublier qu'en dehors de ces territoires de chasse bien entretenus et
protégés il faut toujours compter sur les invasions de rescapés des chasses
voisines et sur les « usines à chats » que sont les villages voisins.
Or, parmi les plus dangereux des ennemis du jeune gibier, nous devons placer
les belettes, les chats, les corneilles et les pies.
La belette.
— Sa petite taille, son extrême souplesse et son agilité
font de ce petit mustélidé à l'appétit jamais inassouvi un véritable fléau du
gibier. Elle pénètre partout et est continuellement en chasse. Bien souvent
questionné par des correspondants au sujet de sa destruction, je ne peux que
répéter ce que je leur ai dit. La belette ne se prend bien que dans les belettières,
ou petites boîtes tendues en bordure de bois, en talus bien exposé, ou sur les
bords des sentiers aménagés, dits sentiers à fauves. Les clôtures serrées
(grillages) ou la base des murs sont également ses parcours de choix. C'est là
qu'il faut tendre ces boîtes. Les autres pièges sont d'un rendement médiocre,
car la majorité ne sont pas faits pour se détendre ou pour capturer un si petit
animal. Ceci d'autant plus que la belette ne dévore le plus souvent (surtout en
été) que les proies qu'elle capture ou saigne elle-même. Exceptionnellement une
tapette à rats, moins rarement une nasse en auront raison. Chassant de jour
comme de nuit, il n'est pas rare de la voir « ramper » sur les
bordures ou le long des ruisseaux, et parfois en famille. Que le garde ou le
chasseur ne regrette pas la cartouche qu'il lui enverra, il n'a que de gros
bénéfices à en retirer.
Le chat.
— Je ne suis pas l'ennemi de cet animal, bien loin de là.
Mais depuis plus de trente ans j'ai vu trop de ces animaux opérer comme des
bandits vis-à-vis du gibier pour leur faire grâce. Un chat qui a pris
l'habitude de braconner délaisse complètement la maison pour se livrer à sa
passion.
Je dis « passion », parce que le logis qui
l'héberge peut fourmiller de rats, il ne s'en occupe pas. Ce qu'il cherche,
c'est la campagne, l'approche de tout ce qui vole ou court, ou l'affût patient
à la gueule des terriers d'où sortent les lapereaux sans défense. Même sort est
réservé aux nids à terre ou bas perchés. Et il ne faut pas croire que c'est le
manque de nourriture qui le pousse à ces hécatombes. J'ai eu et j'ai vu des
chats parfaitement soignés et nourris se transformer en braconniers et se
conduire en écumeurs de chasses.
Les pies.
— Très destructrices, particulièrement pour les nids de perdrix
et de faisans (sans compter tous les autres nids), elles sont relativement
faciles à supprimer. Un dénichage, opéré judicieusement quand les petits sont
nés et prêts à s'envoler, en limite le nombre. Cette limitation est d'autant
plus facile qu'on aura opéré des coupes sombres de novembre à mars parmi les
rassemblements de ces oiseaux qui couchent alors en dortoirs. Le poison n'y
sera jamais aussi bien employé, car c'est pratiquement le seul procédé à gros
rendement. Mais, pour tout ce qui touche au poison, il faut du doigté, car
c'est une question très délicate.
Les corneilles noires.
—Très dangereuses pour les couvées et les nichées (levrauts,
lapereaux), elles sont malheureusement beaucoup plus difficiles à réduire. En
hiver, le poison en supprimera quelques-unes, s'il est employé sur une grande
surface en même temps, mais le nombre de victimes est minime comparativement au
nombre de ces oiseaux sédentaires ou migrateurs. En été, seuls les couples
sédentaires font souche en France, et seule la destruction des nids, et si
possible des adultes, est le moyen de lutte efficace. Ne pas avoir peur de
tirer à balle dans ces nids dont l'épaisseur est à l'abri des plombs neuf fois
sur dix, et n'opérer que lorsque les jeunes sont prêts à s'envoler ou avant quand
la femelle couve.
N.-B. — Nous rappelons que le droit de destruction des
animaux nuisibles est assorti de certaines dispositions légales, variables avec
le mode même de destruction (pièges, poison, fusil) et qu'il convient de se
conformer très exactement, pour opérer ces destructions, aux indications
contenues dans les arrêtés permanents sur la chasse, affichés dans toutes les
mairies et variables dans chaque département.
A. CHAIGNEAU.
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