Comme le développement du trafic ferroviaire l'avait nécessité
il y a cinquante ans, l'accroissement du trafic aérien nécessite un vaste
programme d'infrastructure, de développement et d'équipement d'aérodromes. Nous
assistons actuellement, à travers le monde, à l'édification d'immenses aérodromes
qui répondront demain aux besoin de ce que sera ce trafic.
Il ne faudrait pas croire que l'édification de ces
aérodromes et leur aménagement se font suivant les idées personnelles ou les
plans des techniciens et des architectes. C'est un organisme international, le
Conseil de l'Organisation de l’aviation civile Internationale (O. A. C. I.),
siégeant à Montréal, qui étudie et adapte les standards internationaux et les
pratiques recommandées, relatifs à la construction d'aérodromes terrestres et
d'hydroaérodromes modernes adaptés aux besoins de l'aviation internationale.
Cet organisme vient d'adopter récemment les standards et
pratiques fixant les caractéristiques physiques et autres, ainsi que
l'équipement que devront posséder les aérodromes utilisés par les aéronefs
effectuant des vols internationaux. Ces nouveaux standards sont surtout
consacrés à la question du balisage diurne et du balisage lumineux des aérodromes,
ainsi qu'à l'installation d'aides visuelles facilitant le repérage des
aérodromes et l'exécution des manœuvres d'approche, d’atterrissage, de
circulation au sol et de décollage. Ils comportent des spécifications relatives
aux signes d'identification des aérodromes et aux phares d'aérodrome, aux marques
des pistes et des voies de circulation, aux feux de piste et de voie de
circulation, aux feux de chenal pour les hydroaérodromes, au balisage diurne et
au balisage lumineux des obstacles, ainsi qu'aux dispositifs lumineux
d'approche à faible intensité. Des spécifications sont fixées pour les couleurs
des feux (rouge, bleu, jaune, vert et blanc) et des surfaces de balisage
(rouge, orange, blanc et noir). En effet, il y a transition graduelle entre les
couleurs successives du spectre lumineux, et seule la normalisation des limites
chromatiques des couleurs utilisées peut garantir aux pilotes que les diverses
couleurs seront identifiées sans risque de confusion.
Ces standards traitent aussi du dégagement des obstacles aux
abords des aérodromes et de la réglementation des constructions nouvelles dans
les zones où celles-ci risquent de constituer un danger pour les aéronefs
pendant l'approche et le décollage.
Orly et Nice.
— Actuellement, d'immenses travaux sont en cours à Orly. Ils
feront de cet aéroport français un des plus grands centres aériens du monde. Le
budget de départ a été fixé à un milliard de francs, et l'on espère pouvoir
porter sa superficie totale à 1.800 hectares. Le problème de l'expropriation n'est
pas des plus aisés à résoudre, de nombreux chalets ou cottages se trouvant en
effet inclus dans le nouveau plan. Et si, en 1950, Orly a pu recevoir un
million de passagers, ce relais du monde, dont tous les compartiments auront
été agrandis, pourra en recevoir six millions en 1960, avec le maximum de
confort.
La ville de Nice a aussi entrepris un effort qu'il n'est pas
exagéré de qualifier de colossal. De gigantesques travaux sont actuellement en
cours, dotés de crédits considérables. Il est fort probable que l'aéroport de
Nice sera le second de France et un des plus importants d'Europe. Les Niçois,
avec beaucoup de peine sans doute, n'ont pas hésité à sacrifier leur fameux
hippodrome de Californie à l'aviation commerciale.
Nice a déjà, et veut intensifier ses liaisons aériennes
directes avec New-York et les principales villes d'Amériques du Nord.
Plusieurs autres villes françaises ont établi des projets
pour l'agrandissement de leurs aérodromes.
D'autre part, l'aménagement des aérodromes dits de dégagements
est prévu dans le plan français d'infrastructure aérienne.
L'équipement des aérodromes.
— Les pistes futures atteindront plusieurs kilomètres de
longueur et les bâtiments des installations au sol (aérogare, hangars, ateliers
radio, gonio, etc.) seront importants. Il n'en restera pas moins que la
signalisation des aérodromes pour les vols de nuit demeurera toujours un souci
essentiel : phares et balisages lumineux au sol font actuellement l'objet
des recherches des techniciens spécialisés.
Le dernier-né des phares pour l'identification des aéroports
vient d'être installé au London Airport. Il se compose de 36 tubes
fluorescents de chacun 2m,60 de long, qui, cinq fois par minute, projettent les
lettres indicatives de l'aérodrome.
Outre qu'ils sont plus puissants que les modes ordinaires
d'éclairage, les tubes fluorescents peuvent être facilement colorés en
employant une teinte spéciale de poudre de revêtement : le phare du London
Airport émet une lumière verte. Chaque tube est scellé à l'intérieur d'un revêtement
pour lui donner le maximum d'efficience par temps froid.
Selon les autorités de l'aérodrome, le nouveau phare est
tellement lumineux que les avions se dirigeant sur Londres peuvent, dans de
bonnes conditions, le voir à 36 kilomètres de distance. Son rendement, mesuré
en unités standard, est de 180.000 lumens, soit deux cents fois le rendement
d'une lampe électrique ordinaire.
Hangars.
— Un autre aspect des problèmes liés à l’infrastructure est
celui de la construction des hangars. Actuellement, certains géants des airs
sont obligés de coucher à la belle étoile sur certains aérodromes.
L'édification d'un hangar n'est pas aussi simple qu'on
pourrait le croire. Quelques-uns de ces derniers sont des chefs-d'œuvre de
construction, au même titre que certains des plus audacieux ponts métalliques
construits à travers le monde.
Les Anglais viennent de mettre au point et de construire,
sur l'aérodrome de Londres, un nouveau type de hangar entièrement en alliage
d'aluminium. Il n'entre pas dans le cadre de cette étude d'en décrire les
particularités techniques.
Disons cependant qu'elles sont fort astucieuses et qu'elles
bouleversent totalement la méthode de construction traditionnelle des hangars
d'aviation.
Hydroaérodromes et hélicoptères.
— Les controverses passionnées auxquelles se livrèrent il y
a une quinzaine d'années les partisans de l'avion et ceux de l'hydravion ont
tendance à revenir d'actualité, du fait de certains événements militaires.
L'hydravion a démontré à cette occasion qu'il avait certains avantages sur
l'avion terrestre, puisqu'il reste indépendant des grands aérodromes.
L'on a évidemment pensé à faire profiter l'aviation
commerciale de ce dernier avantage. Si les tenants de l'hydravion marquent
prochainement des points, il faudra certainement en tenir compte dans les plans
futurs d'infrastructure.
Quelques mots sur les hélicoptères. Leur utilisation se
développe considérablement en Amérique, en Angleterre et en France. Pour eux,
le problème des immenses bandes d'atterrissage ne se pose pas. Leur faible
vitesse de croisière actuelle ne les destine guère pour les grandes liaisons
internationales, mais ce sera certainement le moyen de locomotion idéal pour
relier les grands aérodromes aux centres des villes dont ces derniers
dépendent.
Maurice DESSAGNE.
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