De même qu'en période d'abondance de légumes il faut prévoir
que, la mauvaise saison venue, on sera bien heureux d'en retrouver une partie
et il faut, pour cela, en mettre en conserves, il n'est pas dépourvu d'intérêt
de songer à conserver, pour en parer le home au cours de la période hivernale,
quelques-unes des nombreuses fleurs qui décorent actuellement le jardin.
Toutes, d'ailleurs, ne s'y prêtent pas, mais il en est
quelques-unes dont la conservation est des plus facile, et c'est précisément de
celles-ci que nous voudrions aujourd'hui entretenir nos lecteurs.
D'abord quelques graminées.
— Le Gynérium argenté, connu aussi sous le nom de Roseau
à plumes, ou encore sous celui d'Herbe à plumets, est une des plus
belles graminées. Les inflorescences doivent en être coupées au moment où elles
finissent de sortir de leur gaine, c'est-à-dire avant complet épanouissement et
par temps sec, lorsque la rosée a complètement disparu. C'est à ces conditions
seulement qu'elles garderont leur couleur blanc argenté et que les aigrettes ne
se détacheront pas lorsqu'on les secouera.
Le séchage s'opère à l'ombre, soit en étendant les panicules
à plat, soit en les suspendant par la tige ; il doit se faire assez
rapidement pour que l'éclat n'en soit pas altéré. On peut alors les teindre de
différentes couleurs en les trempant dans des bains appropriés. Pour terminer
la préparation, il ne reste plus qu'à les exposer, en les agitant légèrement, à
distance suffisante, à un foyer ardent, sans flamme ni fumée, ce qui fait
épanouir les fleurettes de l'inflorescence et donne à l'ensemble l'aspect léger
et vaporeux qui en fait le charme.
La Brize à gros épillets et la Brize à petits
épillets, bien connues sous le nom d'Amourettes, beaucoup plus
modestes, ont également leur intérêt. On dessèche les inflorescences en les
coupant avant complète maturité et en les plaçant dans un lieu obscur où on les
suspend, la tête en bas. Elles se gardent fort longtemps, ce qui permet d'en
orner les suspensions, les vases, les jardinières en appartement, en les y
associant avec d'autres fleurs dites « perpétuelles ».
Le Lagurus ovatus, appelé couramment Gros minet,
est encore une graminée qui forme de petites touffes, de 25 à 30 centimètres
de hauteur, surmontées par une agglomération d'épillets constituant par leur
ensemble un épi ovale assez serré. Coupés et séchés avant maturité, les épis se
conservent assez bien et peuvent servir dans les mêmes conditions que les
plantes précédentes. On peut également les teindre, si on le désire, de
diverses nuances.
Ensuite quelques plantes vivaces.
— Rappelons d'abord à nos lecteurs que ce terme de « plantes
vivaces » s'applique à des plantes herbacées qui peuvent, sans précautions
spéciales en ce qui concerne celles que nous indiquons ci-après, rester
plusieurs années sur le même emplacement.
La Gypsophile paniculée, souvent appelée Brouillard
ou encore Œillet d'amour, forme des touffes d'environ 1 mètre de
haut et de même largeur, dont les branches, très ramifiées, se terminent par d'innombrables
fleurettes très fines, simples ou doubles, qui, coupées au début de
l'épanouissement et séchées, se conservent fort bien et donnent aux bouquets
perpétuels une grande légèreté. La variété Bristol Fairy est
particulièrement méritante.
Le Statice à larges feuilles a des fleurs de couleur
bleu azuré, très petites, mais très abondantes et formant de vastes panicules
de forme pyramidale atteignant 50 à 60 centimètres de haut. Les conditions
de conservation en sont les mêmes que celles de la Gypsophile : les couper
avant épanouissement des petites fleurs et les faire sécher à l'ombre, la tête
en bas.
L'Echinops ritro ou Boule azurée, plante ayant
un peu l'aspect d'un chardon, a aussi des fleurs d'un beau bleu métallique,
réunies en boule très régulière au sommet d'une tige de 70 à 80 centimètres
de hauteur et s'épanouissant en juillet-août. Coupées au début de
l'épanouissement des fleurons qui les composent, débarrassées des feuilles et
séchées à l'ombre en gardant les tiges de toute leur longueur, les boules
gardent leur belle coloration et peuvent, par la suite, s'employer en mélange
avec certains feuillages d'hiver de couleur rouge ou jaune.
Et enfin quelques plantes annuelles ou bisannuelles.
— L'Immortelle annuelle, désignée, sur les marchés
aux fleurs, sous le nom d'Œillet de Belleville, est une des plus
populaires. Il en existe maintenant de nombreuses et jolies variétés à fleurs
blanches, rouges ou violettes. Le mode de séchage est le même que pour les
plantes précédentes, et la coloration des fleurs se maintient longtemps. La
vapeur du soufre est parfois utilisée pour aviver la couleur des fleurs séchées
de la variété violette, l'une des plus belles, qui devient alors d'un beau rose-carmin.
Mais le résultat est beaucoup plus certain si l'on expose quelques instants ces
fleurs à des émanations d'acide azotique (eau-forte).
L'Acroclinium rose, et surtout ses variétés à fleurs
doubles roses ou blanches, est encore une composée assez voisine de
l'Immortelle. Dans la variété simple existe un disque jaune qui dépare quelque
peu la fleur et qui, dans les doubles, est remplacé par des fleurons roses ou
blancs gardant longtemps leurs vives couleurs, même après séchage.
Le Rhodanthe de Mangles, et surtout la variété à fleurs
pleines, est une autre composée voisine des précédentes et même plus
ornementale, mais aussi de culture un peu plus délicate, car elle ne réussit
bien qu'en terre de bruyère. Séchée, cette jolie plante garde, comme les
Immortelles, ses couleurs vives, et le feuillage même en reste assez vert.
Signalons enfin, pour terminer, une plante fort connue, la Lunaire
annuelle, appelée, suivant les pays, Monnaie du pape, Herbe aux écus,
Médaille de judas, Passe-satin, etc., etc. Celle-ci est une
Crucifère, non pas annuelle, comme son nom semble l'indiquer, mais bisannuelle.
Après ses fleurs, violettes ou blanches selon la variété, se forment de larges
siliques aplaties à cloison brillante et satinée, que l'on peut dessécher
facilement pour les faire concourir à la formation des bouquets perpétuels.
E. DELPLACE.
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